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Encyclopédie d'Entreprise
PlanIntroduction
1. L'ingénierie de la formation
2. Le produit de formation
3. La population en formation
4. Les types de formateurs
5. Les domaines de la connaissance
6. Les réseaux de connaissances
7. Les relations sémantiques entre les thèmes
Conclusion
Introduction
Le premier but d'une encyclopédie d'entreprise est la capitalisation des connaissances créées, utilisées et transmises dans l'entreprise. Dans une logique d'ingénierie de la formation, elle cherche à rationnaliser les dépenses de formation. Au premier chef, il s'agit d'éviter la perte des connaissances qui sont à la base des performances et de la compétitivité de l'entreprise. Ces dernières années, la tendance à l'externalisation des activités non stratégiques s'est traduite par une sous-traitance généralisée des stages de formation. Cette externalisation peut devenir catastrophique si l'entreprise ne contrôle plus la transmission des informations grâce auxquelles s'effectue le partage des connaissances. Tout l'apprentissage organisationnel peut être remis en cause si l'entreprise perd la trace des connaissances qui sont à la source de son existence sur le marché.
1. L'ingénierie de la formation
On peut définir l'ingénierie de la formation en disant qu'elle applique les méthodes industrielles à la conception simultanée des produits de formation. Sachant que la conception simultanée conçoit en parallèle le produit et le processus, l'ingénierie de formation s'efforce de concevoir un produit de formation en fonction des besoins de la population concernée avec une utilisation optimale des ressources de formation disponibles dans l'entreprise ou dans son réseau de fournisseurs partenaires de la méthode. Dans une première approche, un produit de formation est un stage, un ensemble de stages, un manuel d'auto-apprentissage ou une session d'enseignement assisté par ordinateur (EAO). Autrement dit, un produit de formation peut aussi bien être un composant (stage, manuel, session) qu'un ensemble structuré de composants. Un produit de formation complexe est construit comme un ensemble de produits de formation simples. L'ingénierie de la formation cherche à construire des produits simples ou modules dont la combinaison permettra de produire le plus grand nombre de produits complexes avec un maximum d'efficacité pour les apprenants et le minimum de coût pour l'entreprise. L'ingénierie de formation consiste donc à concevoir des modules de formation qui seront transmis par un formateur en vue de leur assimilation par une population ciblée.
2. Le produit de formation
Envisagé sous l'angle du résultat, un produit de formation s'adresse à une population ciblée. Il se manifeste alors comme l'assimilation d'une séquence de modules de connaissances. Envisagé sous l'angle du processus, un produit de formation est activé par un formateur. Il se manifeste alors comme la transmission d'une séquence de thèmes. Le transfert de connaissances d'un individu (modèle mental) à un autre requiert une explicitation des connaissances. Cela s'effectue par leur traduction sous forme d'informations. C'est le rôle de l'ingénierie de la formation. Il incombera à la population en formation (apprenants) de transformer ces informations objectives en connaissances subjectives. C'est le processus d'assimilation. Pour l'animateur (ex post), un produit de formation requiert l'application d'une démarche pédagogique à un objectif pédagogique. Pour le concepteur (ex ante), l'objectif pédagogique est à la fois la transmission d'un contenu de connaissances et son assimilation par une population concernée. La démarche pédagogique fait partie de l'information partagée (modèles mentaux partagés) par le concepteur et par le formateur. Ce partage est assuré par l'encyclopédie d'entreprise. Dans la conception d'un module, la démarche pédagogique sera choisie, dans un recueil, pour sa double adéquation au contenu de connaissances et à la population en formation.
En conséquences, pour l'ingénierie, un produit de formation est déterminé:
Autrement dit, concevoir un produit de formation, c'est prévoir l'application, par un animateur, d'une démarche pédagogique choisie en fonction d'un double objectif de transmission et d'assimilation d'un contenu de connaissances par une population. C'est aux concepteurs qu'incombe la traduction des connaissances en informations. C'est aux animateurs qu'échoit le travail de transmission des informations et le souci de faciliter l'assimilation des connaissances.
Étant données les trois déterminations d'un produit de formation, il s'ensuit qu'un même contenu de connaissances doit aboutir à plusieurs produits de formation selon la démarche pédagogique choisie et/pour la population concernée.
3. La population en formation
Au premières étapes de la conception d'un produit de formation, une population est une collection d'individus en formation. Pendant le déroulement de la formation, les individus seront regroupés ou isolés selon que le produit est un stage, un manuel d'auto-formation ou une session d'EAO. Dans le cas d'un stage, il incombe au concepteur de choisir la démarche pédagogique pour que l'animateur puisse transformer la collection d'individus en un groupe d'apprentissage. Dans ce cas, il y a à la fois un apprentissage individuel et un apprentissage organisationnel. Les individus assimilent des contenus de connaissances pendant qu'ils acquièrent des attitudes favorables au partage des informations et au transfert des connaissances. La démarche pédagogique peut jouer sur le registre de l'affectivité des participants à la condition qu'elle soit mise au service du double processus de d'explicitation des connaissances (en informations) et d'assimilation des informations (en connaissances). Toute tentative de transfert direct des connaissances, d'une tête à une autre, relève du fantasme pédagogique. Dans le meilleur des cas cela n'aboutit à rien. Dans le pire des cas, cette tentative, rendue ambiguë par les relations hiérarchiques, renforce la violence symbolique au sein des entreprises.
Pour le concepteur, une population en formation regroupe des individus caractérisés par:
La démarche pédagogique doit donc correspondre aux compétences et capacités actuelles autant qu'aux compétences futures, en fonction des coûts et délais qui sont impartis au produit de formation. Sur la base des compétences actuelles d'une population, le produit de formation vise à développer, dans cette population, une compétence nouvelle requise pour remplir efficacement et sereinement une mission déterminée. Cette mission est la valeur d'usage du produit de formation. L'ensemble des connaissances est déterminé par l'écart entre les compétences initiales et les compétences finales que le produit de formation doit combler. Cet écart entre les compétences requises et les compétences acquises est l'écart cognitif qui caractérise une action de formation.
4. Les types de formateurs
Ce sera la mission de l'animateur que de transmette et faciliter l'assimilation de cet ensemble de connaissances. C'est pourquoi chaque produit de formation place les individus d'une population, déterminée par l'écart cognitif, dans une situation de formation. Une situation de formation est donc déterminée par:
D'où il ressort qu'une situation de formation varie selon que le produit de formation est:
Le formateur d'un stage est un animateur humain, individuel ou collectif. Le formateur d'une session d'EAO est un animateur logiciel qui peut être implicite ou figuré. Le formateur d'un manuel d'auto-formation est un animateur sémiotique tantôt implicite tantôt figuré. Dans tous les cas, le formateur d'une situation de formation doit être en mesure de transmettre un ensemble de connaissances assimilables par une population en formation. Il est possible, dans un module de séparer les phases de transmission des informations et d'assimilation des connaissances. Les formateurs virtuels sont mieux adaptés aux situations de transmission d'informations. Les formateurs réels, animateurs humains, sont particulièrement utiles dans les situations d'assimilation. Mais il faudra toujours adapter les formateurs concrets aux situations réelles en se gardant des dogmes.
5. Les domaines de la connaissance
Nous avons vu que l'écart cognitif définit une population en formation. Il détermine aussi un ensemble des connaissances. On peut se représenter un ensemble de connaissances comme une liste simple ou structurée de thèmes devant être assimilés par une population en formation grâce à un produit de formation. Thème est un terme générique recouvrant des définitions, des notions, des concepts, des formules, des gestes, des manipulations (laboratoire) ou des attitudes (comportementales) faisant l'objet de la formation. Un thème de connaissance appartient à une subdivision élémentaire d'un domaine de la connaissance. Chaque entreprise fera un découpage plus ou moins détaillé des connaissances dont elle a besoin. A titre d'exemple, on peut découper, non exhaustivement la connaissance en grands domaines: Sciences, Droit, Histoire, Littérature, etc. A son tour, le domaine Sciences peut être découpé en Sciences Physiques, Sciences Sociales, Sciences Humaines, etc. Dans une entreprise donnée, le domaine de la Physique contiendra tout particulièrement: Accoustique, Électricité, Électro-Magnétisme, Magnétisme, etc. De manière arborescente, l'entreprise découpera récursivement chaque domaine en sous-domaines. Après plusieurs itérations, on aboutit à un domaine élémentaire. Un domaine élémentaire est alors une liste simple de thèmes.
Grâce au repérage arborescent des domaines et des sous-domaines, la transmission d'un ensemble de connaissances peut apparaître comme la transmission séquentielle d'une liste de thèmes. Par contre, l'assimilation d'un ensemble de connaissances implique la synthèse cognitive de tous les thèmes de l'ensemble de connaissances. Les deux processus de transmission et d'assimilation sont très différents, mais ils ne cessent d'interférer. C'est le rôle de la démarche pédagogique que de faciliter l'assimilation tout en rabâchant la transmission. La démarche doit tenir compte de chaque thème. La transmission de chaque thème implique une démarche pédagogique adaptée à la population en formation et à la situation particulière. L'ordre dans lequel sont transmis les thèmes contribue à la définition précise des situations de formation. Autrement dit, chaque thème d'un ensemble de connaissances peut exiger une démarche pédagogique adaptée à l'assimilation du thème par la population concernée. Sachant que chaque individu devra accommoder ses schèmes antérieurs aux nouvelles connaissances pour se construire de nouvelles représentations mentales. Pour faciliter l'assimilation, il faut varier et répéter les séquences de transmission des thèmes. Ainsi, la transmission d'un ensemble de connaissances exige le séquencement d'un ensemble de démarches pédagogiques.
Mais la démarche pédagogique ne doit pas se limiter à la phase de transmission des connaissances préalablement traduites en informations. L'assimilation synthétique d'un ensemble de connaissances exige, en outre, une démarche épistémologique visant à relier les thèmes entre eux. Ce point là, à lui seul, peut justifier l'intérêt d'une encyclopédie d'entreprise. D'où le passage des ensembles de connaissances à des réseaux de connaissances.
6. Les réseaux de connaissances
On passe d'un ensemble de connaissances à un réseau de connaissances en constituant un réseau de relations entre les thèmes de l'ensemble. Ces relations sont épistémologiques ou sémiotiques. Pour relier, entre eux, les thèmes d'un réseau de connaissances, on dispose de plusieurs types de relations. Mais la qualité d'un réseau de connaissance provient de la quantité des liens qui relient les thèmes entre eux. Des thèmes fortement reliés entre eux constituent à la fois un réseau de relations et un réseau de connaissances.
Il faut apporter un soin particulier à la constitution des réseaux de connaissance, par le choix des thèmes, par la clarté et par la force des relations. On illustrera l'intérêt et la difficulté de cette opération en disant que les thèmes d'un réseau de connaissances peuvent être transmis séquentiellement ou indépendamment, mais qu'ils doivent être assimilés simultanément et synthétiquement. On comprend alors le secret du rabâchage efficace. Toute répétition ne fait pas un bon rabâchage. Le rabâchage vise à transmettre les thèmes dans des séquences diversifiées de manière à multiplier les relations nouvelles ou à les présenter sous un autre jour. Alors que le rabâchage semble une transmission répétitive, il opère comme une assimilation diversifiée.
A partir des relations épistémologiques ou sémiotiques que l'on envisage dans la création de l'encyclopédie d'une entreprise, nous devons veiller à créer des réseaux de connaissance fortement connexes en multipliant les liens de divers types entre les thèmes ainsi apparentés. Le principe de constitution d'un réseau de connaissance n'est pas la séquence de transmission des informations mais l'assimilation synthétique des connaissances. C'est pourquoi, l'ensemble des thèmes d'un réseau de connaissances devrait constituer un module d'assimilation.
7. Les relations sémantiques entre les thèmes
Un module d'assimilation est simultanément un module de connaissances impliquant une démarche épistémologique d'interdéfinition des thèmes et un module de formation impliquant une démarche pédagogique d'assimilation synthétique des mêmes thèmes. Il est construit pour optimiser les relations entre les thèmes qui le constituent.
Les relations reliant les thèmes sont des relations épistémologiques, des relations sémiotiques ou des relations sémantiques. Les relations épistémologiques sont des relations d'interdéfinition. Elles correspondent à l'arbitraire du signe et concourent à la définition simultanée de deux termes complémentaires. Ainsi "haut" et "bas" sont deux termes opposés (sens inverses), arbitraires (pourraient être différents) mais complémentaires puisque le "haut" n'existe que relativement au "bas". Il y a interdéfinition puisque la définition de l'un est impossible sans la définition de l'autre. Les relations épistémologiques sont les plus fondamentales des relations sémantiques. Les relations sémantiques contribuent à définir le sens des mots dans chaque langue. La sémiotique est une généralisation de la sémantique, elle définit le sens des termes dans des systèmes de représentation autres que les langues naturelles. Relèvent de la sémiotique les icones de signalisation du code de la route, les symboles graphiques du dessin industriel, les conventions des logiciels de CAO en trois dimensions, etc.
Nous donnons quelques exemples de relations sémantiques. Elles fournissent un catalogue de liens susceptibles de relier les thèmes d'un réseau de connaissances:
Conclusion
Le projet d'encyclopédie d'entreprise que nous avons esquissé dans cet article se limitait à la sauvegarde du contenu des stages de formation nécessaires à la perpétuation des compétences de l'entreprises malgré un recours de plus en plus systématique à la sous-traitance de formation. Quoique limité, cet objectif est suffisamment stratégique pour justifier un projet d'entreprise. Il est une base d'expérimentation suffisante pour soulever de nombreux problèmes méthodologiques. Il provoque souvent un dialogue salutaire entre les services de l'entreprise. La constitution de cette première forme d'encyclopédie d'entreprise est aussi l'occasion de nouer des liens de partenariat avec un nombre restreint de prestataires de formations. C'est le moyen de réaliser des économies d'échelle et de profiter de l'avance méthodologique des meilleurs spécialistes. Un tel projet requiert la mise au point d'éventuels logiciels de consultation (recherche des stages, tri des populations, suivi des formations). Comme le montrent les exemples de notre revue de presse, un projet d'encyclopédie d'entreprise peut se coupler avec des efforts de "mise en expression" des salariés ou de formalisation collective des procédures opératoires et des savoirs-faire. Un tel projet est souvent l'occasion pour l'entreprise de retrouver la mémoire de son passé. Les entreprises qui sont allé le plus loin dans cette démarche ont vite compris l'intérêt de vendre ou diffuser une information pourtant stratégique. Le paradoxe n'est qu'apparent quand on découvre que l'entreprise a souvent perdu les compétences sur lesquelles elle croyait baser sa supériorité. Et tout le monde, un jour ou l'autre, a pu constater que les projets tournés vers la vente à l'extérieur sont suivis avec plus d'acharnement et de continuité que ceux qui ne concernent que la vie intérieure de l'entreprise.
le 30 Juin 1997
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le message:
"Merci de m'avertir des modifications à Encyclopédie d'Entreprise"
Bibliographie Compléments
Exemples de graphes d'écriture collective en groupe de réflexion.
Illustrations des Bases de Composants Mécaniques
Définitions
Revue de presse
- Entreprise & Carrières, 31 Janvier 1996
Etienne Dècle (responsable de formation) et Yves Vassart (ingénieur de production) des Papeteries de Golbey (88190 près d' Epinal, Vosges) font rédiger aux opérateurs de production (Bruno Pighetti) leur propre manuel de formation, pour aboutir à un langage commun et à des méthodes identiques entre les équipes.
- Le Monde, 13 Mars 96
- Le Monde, 26 Mars 96
- Le Monde, 10 Avril 1996
- Le Monde, 24 Avril 1996
- Courrier Cadres, 3 Mai 1996
- Courrier Cadres, 4 Octobre 1996
Site web à
découvrir
- Club pour l'Innovation en Informatique, CP2I.
http://www.cea.fr/~cp2i/club/clubmem/ctrb_authier.htm
http://www.cea.fr/~cp2i/club/clubmem/cm_index.htm
"... l'exemple d'une société d'ingénierie et de construction dont les efforts de capitalisation des connaissances ont échoué du fait que personne ne se souciait de réviser les connaissances formalisées et que ceux qui contribuaient à l'information n'incluaient pas leurs noms ce qui entraînait que personne ne savait vers qui se tourner lorsque des questions se posaient. La connaissance formalisée ne peut plus être mobilisée de manière efficace et elle tend à être abandonnée...(EDF) l'existence d'une base de données très détaillée et de procédures de formalisation fortes conduisaient, du fait de la lourdeur de leur manipulation, à une faible utilisation pratique et à l'adoption d'un mode de fonctionnement reposant sur des réseaux relationnels informels articulés sur des hommes piliers capables d'orienter les demandes des personnes vers les connaissances correspondantes.... Hedberg [1981] soutient ainsi que l'adaptation de l'organisation passe par "l'oubli" ou le rejet de certaines connaissances qui ne constituent plus les réponses appropriées aux évolutions de l'environnement. Le "paradoxe d'Icare" [Miller, 1992] qui entraîne les entreprises à leur perte à force de succès en est une illustration... La capitalisation, au contraire, s'efforce de développer des modèles de formalisation plus structurés et plus élaborés. Il ne s'agit plus de recueillir des connaissances éparses et hétérogènes pour les intégrer dans l'activité mais constituer un modèle global et cohérent de l'ensemble des connaissances attenant à un certain champ.
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