S'accuser d'un crime qu'on n'a pas commis
(a) S'accuser d'un crime qu'on n'a pas commis est très surprenant pour l'individu moyen.
- <<Perso je sais pas si Dils est coupable ou non. Il apparait que, d'après ce qu'on en sait, son dossier est vide hormis ses aveux... Or les aveux peuvent ê totalement faux, de nombreuses affaires ayant été faussement attribuées sur cette base jusqu'à ce que le vrai coupable soit finalement arrêté. Le problème est que dans l'inconscient collectif, on n'imagine pas qu'il soit possible de s'accuser d'un crime qu'on n'a pas commis. (Patrick Dils, Forum de discussion, extrait d'une contribution, document du web)>>.
(b) Le monde de la police et du crime organisé connaissent cela. Cet acte est désigné par une expression de l'argot : <porter le chapeau>.
- <<L'avocat de Pierre Alessandri, l'un des cinq membres du commando Erignac qui s'est accusé dans par lettre d'avoir tiré sur le préfet de Corse Claude Erignac, a déclaré à l'AFP qu'"on ne s'accuse pas d'un crime qu'on n'a pas commis". "Si Pierre Alessandri envoie un tel courrier, c'est qu'il a encore des choses à dire sur ce dossier", a ajouté Me Eric Barbolosi. "Je pense que dans une affaire d'une telle ampleur, un tel courrier n'a pas comme vocation de mettre hors de cause qui que ce soit", a par ailleurs estimé Me Barbolosi, faisant référence à Yvan Colonna, soupçonné d'avoir tué le préfet. En décembre 2000, Pierre Alessandri avait envoyé un courrier au juge d'instruction antiterroriste en charge de l'enquête sur l'assassinat du préfet Erignac dans lequel il mettait hors de cause Yvan Colonna. Pierre Alessandri doit être confronté aujourd'hui (jeudi) à Yvan Colonna dans l'enquête sur l'attaque de la gendarmerie de Pietrosella au cours de laquelle l'arme ayant servi à abattre le préfet avait été dérobée. Il ne devrait toutefois pas être interrogé sur son courrier, qui est lié à l'assassinat du préfet Erignac, un dossier instruit par un autre magistrat antiterroriste. (A Radio di a Corsica, Ajaccio, le 14 octobre 2004, communiqué, "Justice. L'avocat de Pierre Alessandri pense qu'on ne peut pas s'accuser d'un crime que l'on a pas commis")>>.
(c) Tribunal d'Inquisition. Le fonctionnement même de la justice peut y conduire. C'était le cas avec l'Inquisition.
(d) Littérature. Chez un écrivain comme Fédor Dostoïevski, on peut refuser de se justifier. C'est le cas de Dimitri, dans "Les Frères Karamazov". On peut s'accuser d'un crime, à la grande surprise de son auteur, c'est ce que constate Raskolnikov dans "Crime et Châtiment".
(e) Cinéma. "La Fleur du mal", le film de Claude Chabrol (avec Nathalie Baye, Benoit Magimel, Suzanne Flon, Bernard Le Coq et Mélanie Doutey), raconte "l'histoire d'une femme acquittée pour un crime qu'elle a commis et qui va s'accuser d'un crime qu'elle n'a pas commis".
(f) Références d'usage de la locution (ou de la réalité de l'acte) :
- <<D'abord, il nous confirme mot pour mot ce que j'avais dit : ne pas reconnaitre la contrainte - c'est à dire affirmer que le partenaire sexuel était consentant, est un motif d'enfermement ad vitam aeternam dans un centre de rétention de sûreté. Ainsi, celui qui voudra sortir devra dire haut et fort "je suis un violeur" même si cela est absolument faux, même si le consentement du partenaire était réel, même s'il n'y a pas eu la moindre contrainte : il faudra s'accuser d'un crime qu'on n'a pas commis pour espérer sortir : c'est là très précisément les méthodes utilisées pendant l'Inquisition. Pile je gagne, face tu perds : sois tu t'accuses d'un crime affreux (et tu seras châtié), soit tu le nies (et tu seras châtié pour avoir nié). Et si tu n'as commis aucun crime, c'est le même prix ! (Site "Et pourtant elle tourne", article "Rétention de sûreté : Des critères faussement objectifs de jugement de la dangerosité", document du web)>>.
- <<Un innocent, Marc Machin, a-t-il été conduit à s'accuser d'un crime qu'il n'avait pas commis ? Le jeune homme n'a jamais dénoncé de violences physiques pendant la garde à vue, juste la promesse d'une peine courte en échange de ses explications. Le policier qui a recueilli sa confession a ainsi résumé au juge d'instruction leur face-à-face : une «joute de force morale». C'est en effet souvent sur le terrain psychologique que se décide l'issue de la confrontation, comme l'ont illustré d'autres cas célèbres. Le sort de Patrick Dils, alors âgé de 16 ans, s'est joué le matin du 29 avril 1987. Après ses aveux, il fut accusé du meurtre de deux enfants de 8 ans, tués à coups de pierre à Montigny-lès-Metz (Moselle). Il resta en prison jusqu'en 2002, date du procès en révision qui l'a innocenté au bout de quinze ans d'incarcération. «La police finit toujours par trouver le point faible, précise-t-il aujourd'hui. Moi, c'était ma famille, mon centre d'intérêt vital. Quand il y a eu cette contradiction entre mes déclarations et celles de mon père sur mon emploi du temps le jour du meurtre, le policier m'a dit: "Ton papa, il ment pas." Moi, j'ai une foi absolue en mon père. J'ai craqué. J'ai avoué un crime que je n'avais pas commis.» (L'Express, Pascal Ceaux, Eric Pelletier, "Le procès des aveux", le 11 avril 2008)>>.
- <<Très affecté par le choc, il souffre de dépression. Il ne veut plus entendre parler de cinéma. Cynique et parfois violent, il demande des cachets extravagants aux producteurs. Barbara Minty le sort de son état. Il s'arrête de boire, de fumer et recommence à s'alimenter normalement. Il fréquente à nouveau le système cinématographique qui ne l'a pas oublié. L'envie de jouer et sa vénalité ayant disparu, des projets lui tendent les bras. Avant son décès prématuré, il n'aura le temps de ne tourner que 2 films : "Tom Horn", un western. Il y incarne un tueur à gages qui finit par s'accuser d'un crime qu'il n'a pas commis. Il tournera aussi “Le Chasseur” où il endosse le rôle d'un chasseur de primes. (Les légendes du cinéma, article "McQueen Steve, 1930-1980")>>.
(f) Voir Justification.
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Mis en ligne le Vendredi 27 Juin 2008
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