Réseau d'Activités à Distance rad2000.free.fr

Vous lisez

http://rad2000.free.fr/desitend.htm

Combiner, dans l'amour, le Désir et la Tendresse

1. Désir

2. Tendresse

3. Désir et tendresse

4. Désir ou tendresse

5. Désir tendre

6....

Le désir est microscopique. Il concerne des entités inférieures au niveau d'organisation de l'individu. Il ne prend pas sa source dans la conscience. Comme Vénus, il naît dans les profondeurs avant d'émerger adulte et nu. Le désir est la manifestation, à l'échelle individuelle, des machines désirantes de l'inconscient. Il branche des organes sur des flux. Il dérive des flux vers des organes. Il ne connaît pas les limites des corps pleins. Il ignore les barrières spécifiques. C'est lui qui réunit, dans l'amour, la fleur et l'insecte. Le désir ne connaît pas les sujets. Leur origine est langagière et sociale. Le désir se porte d'abord sur un objet partiel. Le sujet du désir entre dans une relation d'objet avec le mal-heureux élu. Car le désir impulse, chez l'individu social, des attitudes de possession. Confronté à la rivalité homosexuelle, il provoque des comparaisons d'objets. D'où la croyance qu'il est bon, utile, possible de transformer l'objet de son désir.

• Face aux autres hommes, l'amoureux se demande si l'objet de son désir le valorise aux yeux de ses pairs. En opposition avec les normes de comportement, il suggère des tentatives de transformation de l'objet.
• L'amoureuse s'efforce de corriger les défauts de celui qui la désire.

Poussés au paroxysme de la passion par leurs désirs, deux individus cherchent la fusion dans une totalité. La passion est une fiction totalitaire. Puisque le désir, quand il est seul, vise la possession d'objet, il entraîne la jalousie dans son sillage. Sa capacité à faire lien social en est réduite. D'autant que la propension du désir à se faire piéger par le spectacle social est époustouflante. Les rivalités homosexuelles y contribuent fortement. Mais le sens de la vue n'y est pas pour rien:

• Le rôle de la vision est considérable dans l'organisation sociale. Les positions sociales n'existent que si elles sont visibles. L'habit fait le moine autant que la majorette. C'est pourquoi la télévision est plus politique que la vie politicienne.
• C'est le plus souvent par l'oeil que se manifeste la flamme du désir. Quand il brûle au plus profond du corps, il est trop tard pour allumer des contre-feux.

La vision est ainsi le meilleur moyen de récupérer le désir. La séduction l'a compris depuis longtemps. Le marketing n'a rien inventé dans le domaine de la captation du désir. Il est assez facile de soumettre le désir au besoin de conformité. C'est ainsi qu'on lui fait prendre les apparences du spectacle pour la réalité. Le regard privilégie les objets normés. La captation du désir par le spectacle social produit des objets conformes. Elle est aussi le principal obstacle à l'amour comme au développement de sujets libres et autonomes.

De son côté, la tendresse est à l'échelle des sujets. Elle ne connaît pas les organes. Elle n'a pas d'objets où se matérialiser. Elle échappe ainsi à toute capitalisation. La tendresse s'adresse à un sujet global:

• Elle le reconnaît par la vision.
• Elle perçoit ses blessures narcissiques.
• Elle les soigne par des caresses.
• Elle n'exige aucune demande préalable.

La tendresse est un élan spontané qui vise la reconstitution du sujet blessé. Elle lui apporte réconfort, encouragement, approbation, protection, compréhension ou acceptation. Elle lui permet de reprendre sa marche. La tendresse est une expérience naturelle de l'oblation. Elle se retrouve chez tous les mammifères en présence des petits. Elle est déclenchée par la reconnaissance de ces traits qui donnent un aspect mignon à la silhouette. Elle provoque un mouvement de protection du petit. Cette attitude de donateur spontané inhibe provisoirement les pulsions agressives.

Le don de tendresse n'est pas social. Il n'attend aucun contre-don. Il ne comporte pas d'objet à donner, à recevoir ni à rendre. Il ne génère pas d'institution ni de commerce: ni kula, ni potlach, ni père noël, ni fête des mères. Le don de tendresse ne relie que deux sujets. Mais il développe leurs instances et permet d'autres relations. Instantané, il ne vise pas sa propre perpétuation. Pourtant la tendresse peut faire communiquer durablement deux personnes réunies par une autre relation. D'où la constance de la tendresse.

Sans matérialisation, la tendresse est gestuelle. Elle ne fait circuler que des émotions. Le don de tendresse s'exprime par les caresses: celles des mains, celles de la voix ou celles du regard. Les caresses de la tendresse ne sont pas les gestes du désir. La caresse donne. Le geste prend. La tendresse renforce les sujets fragilisés, quand le désir se porte sur de beaux objets. Les caresses visent la reconstitution de l'intégrité corporelle ou psychique. Bien que transitoire, la tendresse permet l'ouverture des sujets à l'extérieur de la relation tendre. Car elle restaure la confiance. Elle renforce la capacité à faire confiance. Elle permet la transition vers un réseau ouvert.

La tendresse favorise la compréhension mutuelle des sujets. Souvent pré-verbale, infra-linguistique, la tendresse véhicule des émotions indicibles. Elle favorise la transmission des informations qui l'accompagnent. Être tendre, c'est chercher à se faire comprendre, parfois sans ne rien dire. La tendresse la plus silencieuse se contente de dire: "Je suis là pour toi". Ce message est tout le contraire de ce que cherche la sémantique logique: une parfaite dénotation et une absence totale de connotations. Par contre, il est la base de la sémantique psychologique, celle qui part de la mémoire corporelle et du langage du corps. Elle contribue à la connaissance.

La tendresse dépasse parfois les limites de l'ethnie (bon samaritain) et plus souvent celles de l'espèce (baleines et bébés phoques). Il n'est pas interdit de la murmurer à l'oreille des chevaux. Mais il ne faut pas exagérer. Contre les solidarités ethniques ou sociales exclusives, c'est elle qui peut inciter à épargner ou à relever l'ennemi tombé à terre. Sa capacité à faire lien social provoque l'appréhension des dominants. Comme le rappelle Jacques Brel, les dames patronnesses doivent s'en méfier. Dans sa ferme africaine, Karen Blixen en faisait parfois un peu trop. Sa capacité à produire des sujets conscients, autonomes et critiques explique qu'elle soit réservée aux femmes et que celles-ci soient maintenues à la maison, à l'école ou à l'hôpital. La tendresse de l'homme pour la femme pourrait remettre en cause les pyramides hiérarchiques.

Passe encore pour les femmes. La tendresse de l'homme adulte pour l'étranger doit être condamnée avec la dernière énergie. C'est tout le sens de la parabole du "Bon samaritain". Dans la plupart des totalités ethniques, les rites de passage masculins et les autres formes de bizutage dissuadent le jeune homme de montrer sa tendresse. Elle soulève trop de questions. Elle suggère trop de réponses. Et des réponses trop claires. Chercher à comprendre, c'est commencer à désobéir. La capacité critique de la tendresse est bien supérieure à celle du désir. A ceux qui misent sur le "désir de révolution" nous suggérons d'expérimenter la tendresse d'évolution.

La conjonction du désir et de la tendresse est un cocktail explosif. Trois situations, très différenciées, sont possibles:

• Quand le désir prime sur la tendresse, la relation d'objet l'emporte sur la protection des sujets. La pulsion tendre vers les petits, dont le corps est mignon, enflamme le désir au lieu de le freiner. C'est la pédophilie. Jusqu'à une époque très récente, la totalité ne s'en est jamais ému. Car la prohibition de l'inceste ne protège pas les enfants, mais la domination des hommes adultes. Elle est inventée par Laïos, un pédophile (envers Chrysippos) et un bourreau d'enfant (envers Oedipe).
• Quand la tendresse prime sur le désir, y compris celui de vivre, elle bouscule le pouvoir. (1) C'est la piété d'Antigone pour son frère, mort sans sépulture. La fille d'Oedipe brave l'interdit de Créon au risque de sa vie. (2) Les femmes de Mai réclament leurs enfants et clament leur souvenir. Sous une forme plus courante, la primauté de la tendresse sur le désir désigne celles qui sont plus mères que femmes. (3) La religion catholique sanctifie la Sainte Vierge. Elle cultive l'image de la pietà. La vierge de pitié. La mère de douleur (mater dolorosa) au pied de la croix. La tendresse de Marie pour le fils mort, sans le désir pour le père nourricier. Sanctification de la mort du fils (cf Abraham et Isaac) et de la douleur de la mère, pour mieux récupérer la tendresse et exclure le désir.
• Quand la tendresse est l'égale du désir, nous obtenons l'amour. La capacité subversive du désir est doublée par celle de la tendresse. C'est pourquoi le message d'amour (Bouddha, Jésus, Mani) n'est pas vraiment celui de la totalité sociale. Pour les amants, la frivolité du désir est compensée par la stabilité de la tendresse. De plus, l'amour combine les voies sensorielles: la captation visuelle du désir compose avec l'expression tactile de la tendresse. La tendresse pacifie le désir: la rivalité des sujets pour la primauté dans la relation d'objet est transformée par le respect et le développement du sujet. L'amour se développe pleinement dans la réciprocité. La combinaison du désir mutuel et de la tendresse mutuelle engendre le désir tendre. Le désir tendre favorise l'épanouissement du désir mutuel. Car si la satisfaction du désir est le plaisir, elle entraîne ensuite le déplaisir. C'est à ce moment là que se termine la relation sexuelle provoquée par la seule rencontre de deux désirs. Par contre, c'est alors que les amants donnent libre cours à la tendresse mutuelle. Dans l'amour tendre, les caresses de la tendresse prennent le relais des étreintes du désir. Ce sont les caresses du bonheur. Ce qui a pu se vivre, quelques temps, comme objet de désir, se trouve reconstitué comme sujet par la tendresse. L'amour est favorable à l'autonomie. Le sujet social ose reconnaître son désir. L'approbation met fin à la dialectique des deux désirs. Une relation de sujet à sujet s'instaure. Elle est renouvelée par la constance du désir tendre. L'amour est procréateur de véritables sujets. La soumission à la conformité (prise pour le réel) est remplacée par l'assomption de la réalité (sur base d'approbation).

Tendresse et déplaisir passagers...

Depuis l'échange des femmes entre des hommes, le désir et la tendresse sont le plus souvent séparés. Ils sont disséminés dans la population de la totalité ethnique. La culture, plus que la nature, confie le désir à l'homme et la tendresse à la femme. Leur réunion en chaque individu est trop dangereuse. Pour la totalité, pas pour l'individu.

Une telle division sexuelle des émotions bloque leur percolation dans le corps social. Elle favorise la multiplication des totalités de petite taille (couple, famille). Elle y instaure des relations hiérarchisées, comme dans l'ensemble de la société. La relation entre l'homme et la femme est hiérarchisée par le désir de possession. La relation entre la femme et l'enfant est ordonnée par l'institutionnalisation de la tendresse.

La religion (le groupe des prêtres) contribue à réserver la tendresse à la femme. L'ethnie organisée en totalité (par le pouvoir guerrier) en dissuade l'homme, par le bizutage. D'où la division sexuelle des émotions dans le cadre de la division politique du travail.

Bizutage...(désir sans tendresse) Chapitre - Renaissance

Excision du clitoris... (tendresse sans désir) Connaître le Clitoris

...(désie et tendresse mélés)

Créé le 1 Octobre 1998

Modifié le

Le traité des caresses

Docteur Leleu

Éditions J'ai lu 7004/5,

302 pages

34 francs

Le traité du désir

Docteur Leleu

Flammarion

Paris, 1997

357 pages

94 francs

Trouver les définitions des termes en gras dans le texte.

• Glossaire Alphabétique du Réseau d'Activités à Distance
• Glossaire Multi-Site

• Classement Thématique du Chapitre - Renaissance
• Classement Thématique des Pages du Réseau d'Activités à Distance
• Chronologie des Textes Publiés sur le Réseau d'Activités à Distance

Quoi de neuf sur le Réseau d'Activités à Distance?

Association R.A.D. - Chez M.Houdoy - 18, rue Raoul Follereau - 42600 Montbrison - FRANCE.

Fax: 04 77 96 03 09
Mise à jour: 16/07/2003