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Nouveautés du Glossaire (78)

Mots définis entre le 10 Octobre 1999 et le 12 Octobre 1999

Souderie. texte. (a) Les moulins à papier (Moulin Richard de Bas ) n’étaient pas la seule industrie du pays d’ Ambert. L’activité industrielle était d’autant plus nécessaire que la terre ne nourrissait pas tant d’hommes. Des essarts abusifs avaient de quoi justifier, pour d’autres, l’ inhibition au défrichement :

<<Abattant, défrichant, essartant, au temps où il y avait tant de bouches à nourrir, les paysans avaient mis en cultures des collines trop élevées, trop pauvres. Ces terres sont redevenues bois ou pâtures. (Henri Pourrat , “En Auvergne, les Limagnes”, Les Monts du Livradois)>>.

(b) Près de Saint-Amant-Roche-Savine, le Monestier compte un hameau nommé <La Souderie> en souvenir d’une fabrication de soude. Extraite de la fougère locale par calcination, la soude était ajoutée à de la silice pour produire du verre.

<<Pays de la Fougère. Au-dessus des varennes se vallonne le plateau. Des sapins, des pacages, des ruisseaux bruns, sinuant sous les mottes; puis encore des sapins. Elles sont belles, ces forêts de l’État, au voisinage de Saint-Germain-l’Herm. (Henri Pourrat, “En Auvergne, les Limagnes”, Les Monts du Livradois)>>.

(c) La silice résultait du concassage de morceaux de quartz. Le granite du Forez , souvent à gros grains, en contient parfois de beaux morceaux. Il y a même des filons de quartz pur entre Péragut et Les Poizats , deux hameaux de Verrières . Passant sous la Souderie, le ruisseau de Favatelles suit la direction d’une faille tectonique du horst fractal . Puis il se jette dans un affluent de la Dore qui change de noms pour mieux alimenter plusieurs moulins: ruisseau de la Rousse, ruisseau de Blanval, ruisseau des Escures. Blanval pourrait tenir son nom de l’extraction du quartz. A la Mine, il y eut une mine d’argent.

(d) La silice et la soude étaient mélangées et chauffées avec du bois de hêtres (fagus, fayard). A cette altitude (940 m), les hêtraies (Le Fay, la Faye, la Fayolle) ne manquaient pas. D’autant que le domaine qu’achetera Jean-Pierre Grange comprendra, outre le Bois des Escures, les Bois Noirs (1205 m au Chei de l’Ermite) jusqu’à Tire-Vache. Un lieu-dit se nomme encore <Charbonnier>. Aujourd’hui, à Saint-Éloy-la-Glacière (63890), la Ferme des Bois Noirs (1075 m à Monghéol) est un musée de la vie paysanne.

(e) Avant 1789, une telle exploitation ne pouvait appartenir qu’à une famille noble ou bénéficier d’une charte de monopole (otium et negotium). A la Souderie, les maîtres verriers étaient des gentilshommes originaires de La Chaise-Dieu . A quelques kilomètres à l’Est, le hameau de Boisserolles garde la trace de la famille de Boissieux (ou l’inverse).

(f) Le verre, soufflé ou moulé, était transformé en bouteilles, en coupes, en fioles ou en verres à pied.

(g) Dans la vallée du Fossat , au-dessus des moulins de la Fortiche, se trouvait la verrerie des Roches Brunes, sur le ruisseau du même nom. On ne serait pas surpris que le maître verrier ait été propriétaire <Chez Lemaître>.

Voir Chez-X. Épaisseur ténébreuse des forêts .

Texte Le Forez en définitions.

Pierres d’évêques . texte. (a) Les pierres d’évêque que Jean-Pierre Grange allait vendre en Espagne, depuis que les bijoutiers Toulousains et Catalans ne venaient plus les choisir et les faire extraire, sont des améthystes d’Auvergne. Elles servaient pour des ornement d’église et pour les parures féminines aux XVII ème et XVIII ème siècles.

(b) Cette variété violette du quartz, disposée en cristaux pyramidaux, se trouvait dans la région de Chaméane (les Claustres), le Vernet-la-Varenne (Pégut, la Reynerie) et Saint-Pierre-sur-Usson (Genestine). Certaines géodes étaient de taille humaine. Regardez où vous mettez les pieds ! Les débris d’hier sont répandus sur les chemins de randonnée d’aujourd’hui.

Voir Gaspard des Montagnes . Ambert. Saint-Amant-Roche-Savine.

Texte Le Forez en définitions.

Saint-Amant-Roche-Savine. texte.

(a) Saint-Amant-Roche-Savine est un carrefour de routes près du Col des Fourches (972 m). L’auberge de la Belette (969 m) dispensait d’entrer dans le bourg. Le col tient peut être son nom des fourches de justice (le gibet). Érigées par les seigneurs du lieu, pour affirmer leur rôle, elles étaient visibles de loin, comme dans les tableaux de Pieter Bruegel le Vieux.

(b) Du château carolingien, il ne reste que des vestiges, sur la butte de Roche Savine (1067 m). Au pied, les Escures seraient les anciennes écuries du château.

(c) Antoinette Micolon, issue d’une riche famille de papetiers, fondatrice du “couvent fermé” des Ursulines d’ Ambert, est née aux Escures le 16 mars 1592. Le château brûla en 1888. Il avait déjà brûlé dans un roman. C’est aux Escures qu’ Henri Pourrat situe une partie du drame de “ Gaspard des Montagnes ”.

(b) Gaspard vient de Sumontargues, un hameau de Champétieres-des-Vallons, plus au Sud.

<<Gaspard était encore un enfant de mamelle quand ses parents héritèrent d’un oncle une auberge achalandée, la fameuse auberge de la Belle Bergère, sise au lieu de Saint-Amant-Roche-Savine. Et là à Saint-Amant il porta le nom de Gaspard de Sumontargues, surnom qui devint Gaspard des Montagnes, quand il fut connu comme le loup blanc par tout le bas pays d’Auvergne. (Henri Pourrat, Gaspard des Montagnes, Le Château des Sept Portes , Deuxième veillée, Première pause)>>.

(c) “Au temps du grand Napoléon”, l’Auberge de la Belle Bergère est un relais de la Poste impériale. C’est un lieu stratégique pour retrouver la trace d’Henri, l’enfant disparu:

<<L’auberge de son père, la Belle Bergère, étant relais de poste, par les conducteurs et les postillons, par les rouliers, les voyageurs, les buveurs, les mendiants surtout, y passaient d’abord les nouvelles de quinze lieues à l’entour. A dater du jour où il le voulut bien, plus rien ne lui échappa: on ne cassa pas une écuelle, on ne marcha plus sur la patte d’un chien, qu’il ne le sût. (Henri Pourrat, Gaspard des Montagnes)>>.

(d) Les écuries carolingiennes étaient devenues une verrerie au temps de la famille De Boissieux, venue de la Chaise-Dieu .

<<Du temps des verriers, on était réveillé par un homme tout rouge qui tapait à la porte et demandait le maître des Escures. Cet homme rouge était comme le signe qu’il y aurait le feu un jour. (Henri Pourrat )>>.

(e) On commençait par produire de la soude grâce aux fougères du Livradois, dans les bois profonds de la Souderie.

<<Elles n’ont rien de trop gai, les forêts qui s’en vont sur ces plateaux, du côté de la Chaise-Dieu. Des sapins, des sapins, des sapins, jamais une âme. Les chemins sablonneux s’enfoncent de salle obscure en salle obscure, parmi la mousse et la fougère, sous ces grandes rames balançantes. Les grappes du sureau rouge tirent l’oeil, ou bien quelque pied de digitale pourprée. Il y a des endroits où le soleil semble n’avoir point percé depuis des mondes d’années: c’est sombre, c’est noir, c’est la mort. (Henri Pourrat, Gaspard des Montagnes, Le Château des Sept Portes, Première veillée, Deuxième pause, Les forêts de ces quartiers-là)>>.

(f) L’ érosion chimique du granite du Forez oxyde le mica et le fer qu’il peut contenir. Isolés, les cristaux de quartz et de feldspath forment un sol sablonneux où les rivières coulent en méandres sous les plaques de mousse. L’eau prend la couleur du fer oxydé, au ruisseau de la Rousse.

<<Or, ceux qui sont nés dans ces cantons les préfèrent aux plus beaux endroits de la terre... Ceux qui ne connaissent point cette vie de propriétaire forestier ne peuvent savoir quel plaisir et quel bien c’est là... Et certainement, il n’aurait jamais, lui, déserté Chenerailles sans le malheur de son Anne-Marie. (Henri Pourrat, Gaspard des Montagnes, Le Château des Sept Portes, Première veillée, Deuxième pause)>>.

(g) Anne-Marie Grange était venue de Chenerailles aux Escures , par la reboule de Champétières. Suivant l’ascension sociale de son père, elle avait traversé les bois de Virennes et de Tirevache. Après les avoir craint au Nord, elle les voyait au Sud. Elle avait cru et même voulu mourir à l’Arbre-Blanc. Le souvenir de la nuit terrible ne pouvait s’estomper dans son esprit:

<<Adossée au montant de la petite porte, elle regardait le bois noir qui montait vers Virennes: ces étages et ces étages de sapins, derrière quoi elle savait les creux de mousse ou de plantes pendantes et les retraites bouchées de fougères. Plus haut commençait le pays qu’elle avait devant soi, de la fenêtre de Balance. Et ce pays se confondait ce soir, dans son idée, avec ses années mêmes, avec son histoire à elle. Une étendue de bois hantés du loup et de la fouine, de long vallons à fontaines basses, à sentiers perdus, des pâtis, des fourrés de genêts, des sagnes mouillées d’une eau rouge , toute une contrée ouverte et déserte, mais pleine de secrets, de caches. Il y avait Gaspard et lui seul pour faire face à tout cela. (Henri Pourrat)>>.

(h) Avec “les rendez-vous de Gaspard”, c’est tout le canton (Bertignat, Grandval, Le Monestier, Saint-Amant et Saint-Éloy-la-Glacière) qui perpétue le souvenir du héros. Les associations “Gaspard en fête” (04 73 95 75 03) et “Avenir” (04 73 95 72 48) préparent festivités, spectacles et reconstitutions.

Texte Le Forez en définitions.

Loup. texte. (a) Les loups sont restés longtemps dans le paysage du Forez et plus encore de l’Auvergne. Les toponymes où <loup> et <louve> apparaissent sont multiples: Chanteloup, Chanteloube (à Chalmazel, à la Renaudie, à Saint-Martin-des-Olmes, aux Escures), Châteauloup (à Rozier-Côtes-d’Aurec), Font du Loup (à Saint-Georges-en-Couzan), la Croix de Loupeux (à Sainte-Agathe), la Font du Loup (à Apinac), la Loubière (à Augerolles), le Champ du Loup, le Creux du Loup (à Chabreloche), le Pra du Loup, le Saut du Loup, les Gorges Chioloup (à Chalmazel). Au Brugeron, le Cher du Loup est à côté du Cher des Chèvres, entre les Grandes Sagnes et Sagne Moussue. Mais au Jas du Compère, l’histoire de Roche-en-Forez ne dit pas s’il s’agit du loup ou de Goupil le renard.

(b) A défaut de galipote, certains marginaux étaient soupçonnés d’être des meneurs de loups.

<<Depuis des siècles et des siècles, on crut en Auvergne à l’existence des hommes-loups, les “loups-garous” comme on les appelait, ou encore des “galipotes”. Ces êtres n’avaient, à vrai dire, rien d’humain et pas grand chose d’animal. C’étaient des sortes de masses noires quasi sans membres qu’on entrevoyait, dans la nuit, filer le long des haies ou des murailles. Elles guettaient les attardés, leur sautait sur le dos et exigeaient qu’ils les portassent. Il s’agissait, pensait-on, de bâtards que leur disgrâce aurait conduits à faire un pacte avec le Malin. A la pleine lune, ils se voyaient changés en loups et tous ceux qui les apercevaient pouvaient les prendre pour tels, revêtus qu’ils étaient de la peau remise par le Diable. Ils couraient sur les pieds et les mains avec une vitesse que jamais homme n’aurait pu avoir. (Annette Lauras-Pourrat, “Guide de l’Auvergne Mystérieuse”, Tchou)>>.

(c) La Bête du Gévaudan est devenue un souvenir indirect pour toute la France. “Danse avec les loups” avec Kevin Kostner, “Tibelle et le loup” de Marie-Isabelle Murat et le Parc des Loups du Gévaudan de Sainte-Lucie, près de Marvejols, tentent de réhabiliter son image maléfique.

Texte Le Forez en définitions.

Escures. texte. (a) Les Escures désignent des ruines, un étang, des bois et un château, à l’Ouest d’ Ambert, sur la commune de Saint-Amant-Roche-Savine.

(b) Le toponyme <Escures> viendrait des écuries de l’ancien château carolingien, plus que ruiné, de Roche Savine.

(d) Les hameaux de la Souderie(soude de fougère), de Blanval (extraction ou traitement du quartz pour la silice), de la Mine voire de Losfournet (les fours ?) et le Bois de la Charbonnière gardent le souvenir de cette exploitation industrielle, bien avant l’âge du capitalisme.

(e) Le château passa dans des mains bourgeoises, puisque Antoinette Micolon naquit aux Escures le 16 mars 1592.

(f) De Chenerailles aux Escures , pour la fiction littéraire, Henri Pourrat situe l’ascension sociale de Jean-Pierre Grange.

(g) On trouve <les Escurades> à La Renaudie, à 1 km des ruines d’un château.

Voir Col des Pradeaux .

Texte Le Forez en définitions.

De Chenerailles aux Escures . texte. (a) De la métairie de Chenerailles au château des Escures, quittant le Château des Sept Portes pour habiter l’ancienne verrerie de la famille de Boissieux, Jean-Pierre Grange marque le chemin de son ascension sociale.

(b) Pour Anne-Marie Grange, sa fille, il semble d’abord qu’elle quitte les lieux de la nuit terrible .

<<Il fallut partir pour les bois. Anne-Marie ne vivait plus. Elle sentait au-dessus d’eux tous quelque chose d’affreux en suspens. (Le Château des Sept Portes, Sixième veillée, Cinquième pause, Les bûcherons dans la forêt de Virennes)>>.

(c) Pourtant, aux Escures, l’incertitude est plus grande, les secrets plus épais et les chantages plus lourds de conséquences.

(d) Henri Pourrat a choisi d’inscrire la trame sociale, affective et criminelle de Gaspard des Montagnes sur un axe simple et dans un segment très réduit. Bien que Gaspard coure l’Europe, avec ou sans le grand Napoléon, l’essentiel se situe de part et d’autre du lieu de naissance de Gaspard, à Sumontargues.

(e) L’origine sociale de Gaspard n’est pas assez prestigieuse pour qu’il puisse épouser celle qu’il aime et qui l’aime. Et tout le drame vient de là. Si la Révolution et l’Empire n’ont fait que remplacer les monopoles des papetiers par l’affichage de la réussite des nouveaux riches, le monde du travail a connu une révolution, mais le monde de l’amour est resté inchangé.

Texte Le Forez en définitions.

Auteur

Hubert Houdoy