Evolution



(A) Sens courants.



(a) Une évolution est un ensemble de mouvements coordonnés. C'est ainsi que les soldats évoluent, "en ordre serré", dans la cours de la caserne.


(b) Pour l'enfant, les jeunes plantes et les jeunes animaux, leur évolution n'est autre que leur croissance ou leur développement biologique.


(c) Dans ce sens, le contraire de l'évolution est l'involution (une régression).


(d) Voir Evolution de la conscience. Evolution du Surmoi. Evolution du terme scieur de long. Evolution sémantique. Progrès.



(B) Evolution des espèces.



(a) Le devenir des espèces vivantes a été affirmé par Anaximandre de Milet (VI ème siècle avant Jésus-Christ) puis par saint Augustin.


(b) Son contraire, le fixisme, se fondait sur l'autorité d'Aristote et de la scolastique. Il répondait surtout au récit de la Genèse dans la Bible. Le fixisme ne semble pas être un véritable système dans les paradoxes de Zénon d'Elée.


(c) L'évolutionnisme s'affirme avec "La Philosophie zoologique" (1809) du chevalier de Lamarck (1744-1829).


(d) Le transformisme démontre son intérêt avec "L'Origine des espèces" de Charles Darwin.


- <<Je m'aperçus vite que la sélection représente la clef du succès qu'a rencontré l'homme pour créer des races utiles d'animaux et de plantes. Mais comment la sélection pouvait-elle être appliquée à des organismes vivant à l'état de nature ? (Charles Darwin, "Vie et Lettres")>>.


(e) L'évolution ne décrit pas une ligne droite vers un but final, mais la multiplication de variantes dans lesquelles le milieu et les événements font une sélection plus ou moins drastique, toujours aveugle.


- <<Et puis se dessine doucement le monde extraordinaire des Australopithèques qui va s'épanouir de la mer Rouge au Cap entre 6 millions d'années, peut-être plus, et un million d'années, peut-être moins ; monde extraordinaire, parce qu'il va nous donner la première image d'Hominidés incontestables, redressés en permanence sur leurs pattes postérieures, et qui annoncent l'Homme tout en réalisant "autre chose". L'histoire des êtres vivants nous offre de multiples exemples de ce genre ; celui qui donne naissance à une forme nouvelle ne va pas pour autant cesser de développer sa descendance "traditionnelle" ; un ancêtre est donc aussi un cousin. On l'a vu dans cet ouvrage tout au long de l'histoire des Primates. Même si les Australopithèques sont à l'origine de l'Homme, ils n'en ont pas moins poursuivi, pendant plusieurs millions d'années, leur destinée originale d'Australopithèques après que l'homme, le genre Homo, est apparu ; les Hommes descendent donc très probablement de certains Australopithèques (ceux de 5 ou 6 millions d'années peut-être, nos ancêtres), mais n'en coexistent pas moins avec d'autres Australopithèques (ceux de 4 ou 1 million d'années sans doute, nos cousins). (Yves Coppens, "Le Singe, l'Afrique et l'homme", Fayard, Paris, 1983, pages 81-82)>>.


(f) Cette cœxistence explique aussi que quand une nouvelle branche est détectable, grâce à des fossiles, elle est déjà toute faite et nombreuse. On a très peu de chance de trouver l'individu qui a connu la première mutation génétique qui transforme peu à peu sa population d'appartenance.


(g) Pour Sigmund Freud, l'évolution n'est qu'un détour de production, provoqué par des événements extérieurs, sur un fond de compulsion de répétition.


- <<Beaucoup d'entre nous se résigneront difficilement à renoncer à la croyance qu'il existe, inhérente à l'homme même, une tendance à la perfection à laquelle il serait redevable du niveau actuel de ses facultés intellectuelles et de sa sublimation morale et dont on serait en droit d'attendre la transformation progressive de l'homme actuel en un surhomme. Je dois avouer que je ne crois pas à l'existence d'une pareille tendance interne et que je ne vois aucune raison de ménager cette illusion bienfaisante. A mon avis, l'évolution de l'homme, telle qu'elle s'est effectuée jusqu'à présent, ne requiert pas d'autre explication que celle des animaux, et s'il existe une minorité d'êtres humains qu'une tendance irrésistible semble pousser vers des niveaux de perfection de plus en plus élevés, ce fait s'explique tout naturellement, en tant que conséquence de cette répression d'instincts sur laquelle repose ce qu'il y a de plus sérieux dans la culture humaine. L'instinct refoulé ne cesse jamais de tendre à sa complète satisfaction, laquelle consisterait dans la répétition d'une satisfaction primaire ; toutes les formations substitutives et réactionnelles, toutes les sublimations sont impuissantes à mettre fin à son état de tension permanente, et la différence entre la satisfaction obtenue et la satisfaction cherchée constitue cette force motrice, cet aiguillon qui empêche l'organisme de se contenter d'une situation donnée, quelle qu'elle soit, mais, pour employer l'expression du poète, le "pousse sans répit en avant, toujours en avant" (Faust, I). Le chemin en arrière, vers la satisfaction complète, est généralement barré par les résistances maintenues par les refoulements, si bien qu'il ne reste à l'organisme qu'à avancer dans l'autre direction, encore libre, sans l'espoir toutefois de venir à bout du processus et de pouvoir jamais atteindre le but. (Freud, "Au-delà du principe de plaisir")>>.


(h) Référence :


- <<L'évolution sculpte les corps des vivants au moyen de la mort [l'apoptose ou mort cellulaire programmée]. Que change celle-ci et comment les hommes et leur corps ne se transformeraient-ils pas ? La mutation fait émerger de nouveaux vivants. Qu'ils paraissent et comment notre temps ne bifurquerait-il pas ? Que la mort, le corps et la vie prennent un autre visage et comment, sous cette poussée d'évolution, l'humanité même ne changerait-elle pas ? Ces morts inattendues et ces reproductions nouvelles suscitent un vent d'«immortalité». Une utopie neuve nous entraîne. Nouvelle, vraiment ? Elle inspirait déjà les erres de Gilgamesh, notre plus lointain ancêtre et, plus avant, celles et ceux qui domestiquèrent le bœuf et plantèrent le blé. Condamnez-vous les utopies ? Avons-nous jamais construit un avenir sans elles ? Au moins celle-là ne fait de mal à personne puisqu'elle défie la mort. Je persiste donc et signe : oui, aux nouvelles morts s'associent des rêves d'« immortalité », aussi neufs qu'antiques. Mes petits-enfants se plaindront-ils de vivre sains jusqu'à plus de cent vingt ans ? Avec des hauts et des bas, blessures et guérisons, un mélange inanalysable d'imprévisible et de rationnel, notre aventure chaotique et contingente ne nous délivre-t-elle pas, aussi malaisément qu'on le voudra, de la Nécessité ? (Michel Serres, "Hominescence", Le Pommier, 2001, page 11)>>.


(i) Evolution biologique et Géologie Politique. L'évolution biologique a fait disparaître les conditions biologiques qui ont permis la constitution de gisements de charbon, au Carbonifère.


- <<Si les pétroles se forment à partir de la matière organique déposée dans les océans, les charbons eux se forment à partir des végétaux terrestres qui s'accumulent dans les zones anoxiques, comme les grands marécages. C'est d'ailleurs là une limitation au développement de dépôts de charbon : les végétaux terrestres ne sont apparus en abondance qu'il y a quelques 360 millions d'années (Ma). Inutile de chercher dans des roches plus vieilles que cet âge. Les charbons sont particulièrement abondants dans les couches de la période Carbonifère, c'est-à-dire cette période géologique qui se situe entre - 360 et -285 Ma. Il y a deux raisons à cela : d'abord l'avènement des végétaux terrestres en grande abondance à la fin du Dévonien - début du Carbonifère, puis possiblement le fait que les spécialistes de la dégradation biologique des végétaux ne semblaient pas avoir encore inventé les bons mécanismes et avoir acquis une grande efficacité pour débarasser la surface terrestre de ces végétaux qui s'accumulaient. (Bourque, Université de Laval, "L'exploration pour les combustibles fossiles : hydrocarbures et charbons", document du web)>>.


(j) Voir Darwinisme. Fossiles humains. Histoire. Néodarwinisme. Origine du pétrole. Phénomène d'émergence. Transformisme.



(C) Religion chrétienne.



(a) L'évolutionnisme implicite de saint Augustin est une conséquence de la théorie du péché originel.


(b) Le péché est transmis par la génération. La génération, le coït des parents, n'est possible que grâce à la concupiscence des parents. Cette concupiscence est un mal, qui transmet le mal à l'enfant. D'où la nécessité de baptiser les enfants pour leur éviter l'Enfer, en cas de mort précose.


(c) Mais cette transmission naturelle n'est pas un mal voulu par Le Créateur. Selon Augustin, ce serait blasphèmer que d'imputer un mal quelconque à La Création. Le mal vient d'un mauvais usage de leur libre arbitre par Satan puis par Adam. Voulu par Dieu, ce libre arbitre était un bien.


(d) Ce faisant, l'évêque d'Hippone introduit un hiatus entre La Création (conception fixiste de la nature) et la transmission naturelle du péché par les voies naturelles de la propagation de l'espèce ("l'acte de chair"). Telle est l'évolution augustinienne. Elle est plutôt dans le sens du mal : c'est la chute d'Adam.


- <<Vous dites, entre autres choses : «En voyant après le péché les premiers humains rougir d'eux-mêmes, et voiler ces membres, devenus le foyer de la concupiscence, j'y trouve la preuve que Dieu avait fait du mariage quelque chose de purement aérien». Si le mariage, sans la concupiscence, était purement aérien, les corps exempts de cette concupiscence ne seraient donc plus pour vous que des corps aériens ? Ou bien, n'auriez-vous pas pour la concupiscence un tel amour, qu'après en avoir fait une condition de l'existence de nos premiers parents dans le paradis terrestre, vous ne craindriez pas d'en doter nos corps, même après la résurrection ? Je n'ai jamais dit, comme vous le prétendez, qu'on ne doive pas regarder comme naturelle une chose sans laquelle «la nature ne saurait exister» ; j'affirme seulement qu'on appelle naturel ce vice que la nature apporte actuellement en naissant, quoiqu'elle ait été créée dans d'autres conditions. Dès lors, ce mal ne remonte pas à l'institution première de la nature ; il n'a d'autre origine que la volonté coupable du premier homme ; voilà pourquoi, ou bien ce mal sera condamné, ou bien il sera guéri. (Augustin, "Contre Julien", Livre IV, §54)>>.


- <<«Si», dites-vous, «cette passion se trouvait dans le fruit de l'arbre, elle est l'oeuvre de Dieu, et comme telle ne saurait qu'être bonne». Je réponds : La concupiscence n'était pas dans le fruit de l'arbre, voilà pourquoi l'arbre était bon ; ce qui est mauvais, c'est la révolte de la concupiscence, et cette révolte éclata au moment où l'homme, se séparant de Dieu, désobéit à son Créateur en mangeant le fruit défendu. A Dieu ne plaise que nous croyions jamais que le Créateur eût déposé dans un arbre naturellement bon la vertu propre à faire naître dans le corps humain une adversaire contre laquelle la pudeur aurait à soutenir un combat continuel. (Augustin, "Contre Julien", Livre IV, §63)>>.


(e) Cette idée de l'évolution de l'homme par le péché de l'homme est étrangère à Cicéron.


- <<Dans son troisième livre de la "République", Cicéron dit de l'homme, que «la nature s'est montrée pour lui, non pas une mère, mais une marâtre, car elle le jette sur la terre avec un corps nu, fragile et infirme, et avec un esprit anxieux dans les chagrins, humble dans la crainte, mou pour le travail et enclin à des passions de toute sorte : et cependant, au sein de ces maux, dont il est accablé, on trouve encore je ne sais quelle flamme divine qui constitue l'intelligence et le génie». Qu'opposez-vous à ce langage ? L'auteur ne voit pas, dans ces imperfections et ces maux de notre nature, le résultat de l'inconduite, mais l'oeuvre même de la nature. Il a pu constater les phénomènes, mais il en ignorait la cause. En effet, il ne savait pas pourquoi un joug bien lourd pèse sur les enfants d'Adam, «depuis leur sortie du sein de leur mère, jusqu'au jour de leur sépulture dans les entrailles de la terre ("Ecclésiaste", XL, 1)». Entièrement étranger à nos Livres saints, il n'avait aucune notion du péché originel. Toutefois, s'il avait applaudi à cette concupiscence que vous louez, il n'aurait pas gémi de trouver dans votre esprit une inclination si prononcée vers les passions. (Augustin, "Contre Julien", Livre IV, §60)>>.


(f) Voir Julien d'Eclane. La Cité de Dieu.






* * *


Auteur.

Hubert Houdoy

Mis en ligne le Mardi 1 er Juillet 2008



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