Concept


(a) Un <concept> (terme de 1404, sous la plume de Christine de Pisan) est une idée, une notion, inventée par l'esprit, le logos ou la pensée et dont l'inventeur est plutôt fier.


(b) En science, un concept est une notion solide et rigoureuse.


- "En arrivant, j'avais de vagues notions. Maintenant, je maîtrise les concepts !"


- <<La science est la tentative de faire correspondre la diversité chaotique de notre expérience sensible à un système de pensée logiquement unifié. Dans ce système les expériences particulières doivent être mises en rapport avec la structure théorique de telle sorte que la coordination résultante soit unique et convaincante. Les expériences sensibles forment la matière qui nous est donnée ; mais la théorie qui doit les interpréter est faite par l'homme. Elle est le résultat d'un processus d'adaptation extrêmement laborieux : hypothétique, jamais complètement achevée, toujours sujette à la controverse et au doute. La manière scientifique pour former des concepts diffère de celle que nous employons dans notre vie quotidienne, non pas quant à la base, mais seulement par la définition plus précise des concepts et des conclusions, par un choix plus laborieux et plus systématique de la matière expérimentale et par une économie logique plus grande. Par cette dernière nous entendons l'effort de réduire tous les concepts et toutes les corrélations à un nombre aussi petit que possible de concepts et d'axiomes fondamentaux logiquement indépendants. (Albert Einstein, "Les fondements de la physique théorique", 1940)>>.


(c) Mode ou jargon professionnel. Pour un architecte, pour un concepteur ou pour un designer, toute invention de leur part est un "concept", puisque leur métier est la conception. Une nouvelle technique de vente, la nouvelle organisation spatiale d'une agence bancaire, seront la mise en oeuvre d'un "nouveau concept".


(d) Etymologie. Le mot latin <conceptus> est le participe passé du verbe <concipio, is, concepi, conceptum, concipere> signifiant "recevoir", "prendre", "réunir", "recueillir", "faire tenir ensemble (dans un vase)", "devenir enceinte", "formuler", "déclarer dans les formes prescrites", "recevoir en soi", "contracter (une maladie, une mauvaise habitude, un vice)", "germer", "bourgeonner", "pousser", "recevoir (dans son esprit)", "percevoir", "ressentir", "éprouver", "avoir l'idée de", "former une conception", "comprendre", "saisir".


(e) Remarque. La femme n'est qu'un vase. Le verbe <concipere> a pour premier référent une activité féminine, considérée par beaucoup (René Descartes, Sigmund Freud) comme passive voir honteuse (saint Augustin, saint Jérôme), que le logos spermatikos n'a eu de cesse d'attribuer aux hommes. Il n'est donc pas surprenant que <concept> et <conception> soient entourés de connotations bavardes.


(f) Avec le retour du temps, de l'événement et du chaos, la pédagogie du concept est plus importante que l'illusion de sa rigueur. Il est une réalité philosophique, comme il existe une réalité psychique qui ne se confond pas avec la réalité indépendante. C'est à cause de ces différences que Bernard d'Espagnat peut parler de réel voilé.


- <<Les philosophes ne se sont pas suffisamment occupés de la nature du concept comme réalité philosophique. Ils ont préféré le considérer comme une connaissance ou une représentation données, qui s'expliquaient par des facultés capables de le former (abstraction, ou généralisation) ou d'en faire usage (jugement). Mais le concept n'est pas donné, il est créé, à créer il n'est pas formé, il se pose lui-même en lui-même, auto-position. Les deux s'impliquent, puisque ce qui est véritablement créé, du vivant à l'œuvre d'art, jouit par là même d'une auto-position de soi, ou d'un caractère autopoïétique à quoi on le reconnaît. D'autant plus le concept est créé, d'autant plus il se pose. Ce qui dépend d'une libre activité créatrice, c'est aussi ce qui se pose en soi-même, indépendamment et nécessairement le plus subjectif sera le plus objectif. Ce sont les post-kantiens qui ont porté le plus d'attention en ce sens au concept comme réalité philosophique, notamment Schelling et Hegel. Hegel a défini puissamment le concept par les Figures de sa création et les Moments de son auto-position les figures constituent le côté sous lequel le concept est créé par et dans la conscience, à travers la succession des esprits, tandis que les moments dressent l'autre côté suivant lequel le concept se pose lui-même et réunit les esprits dans l'absolu du Soi. Hegel montrait ainsi que le concept n'a rien à voir avec une idée générale ou abstraite qui ne dépendrait pas de la philosophie même. Mais c'était au prix d'une extension indéterminée de la philosophie qui ne laissait guère subsister le mouvement indépendant des sciences et des arts, parce qu'elle reconstituait des universaux avec ses propres moments et ne traitait plus qu'en figurants fantômes les personnages de sa propre création. Les post-kantiens tournaient autour d'une encyclopédie universelle du concept, qui renvoyait la création de celui-ci à une pure subjectivité, au lieu de se donner une tâche plus modeste, une pédagogie du concept, qui devrait analyser les conditions de création comme facteurs de moments restant singuliers. Si les trois âges du concept sont l'encyclopédie, la pédagogie et la formation professionnelle commerciale, seul le second peut nous empêcher de tomber des sommets du premier dans le désastre absolu du troisième, désastre absolu pour la pensée, quels qu'en soient, bien entendu, les bénéfices sociaux du point de vue du capitalisme universel. (Gilles Deleuze, in Chimères, n° 8, mai 1990)>>.


(g) Philosophie. Après le choc de la Solution finale, la philosophie de la caresse dénonce les prétentions totalitaires du concept, élaborées par Hegel ou par Martin Heidegger.



- <<Elle dénonce, en fait, les défauts du concept qui résultent d'une fixation et d'un durcissement de la pensée. En effet, la réduction du concept vise un «être-ensemble» qui repose sur une entente. Le concept est né pour éviter les «malentendus», le concept manque, dans la généralisation, les différences individuelles des choses et des hommes. Il ne respecte rien. Dans le monde du concept, monde de la prise (la griffe du Begriff), la force fondamentale est une dynamique immanente de la mise en demeure où la communication est réduite à la mise en relation de « moi » substantiels et, semble-t-il, exclut le dialogue où pourrait s'exprimer transcendance et altérité. Le monde du concept, prise et emprise, est le monde du «main-tenant», annulation de la possibilité même du temps. Il est toujours présent comme quelque chose de représentable, de communicable, d'explicable, d'accumulable. Le monde du concept apparaît toujours pour Levinas comme le résultat de l'impuissance originaire à supporter un monde qui serait pur chaos, devenir contradictoire, informe et informulable. Contre l'être en devenir la temporalité de la prise du concept est celle de la présence, de l'instant sorti du flux du temps, instant figé, gelé à la limite du hors temps : présent éternel. (Nicolas Antenat, "Respect et vulnérabilité chez Levinas", Le Portique, Le Respect, document du web, mis en ligne le 15 décembre 2005)>>.


(h) Voir Conception Assistée par Ordinateur. Deleuze et Guattari. Qu'est-ce que la Philosophie.


(i) Lire "Souris Hommes".






* * *


Auteur.

Hubert Houdoy

Mis en ligne le Mercredi 2 Juillet 2008



Explorer les sites.

Réseau d'Activités à Distance

A partir d'un mot

Le Forez

Roche-en-Forez



Consulter les blogs.

Connaître le monde

Géologie politique


Nota Bene.

Les mots en gras sont tous définis dans le cédérom encyclopédique.