Réalité indépendante


(a) La réalité indépendante désigne le fait que le réel existe même quand nous cessons de penser à lui, ou même quand nous cessons de vivre.


- <<Certes, le point de vue positiviste possède une indéniable valeur. Il a contribué à clarifier le sens des propositions physiques, à séparer ce qui était prouvé par l'expérience de ce qui ne l'était pas, à faire justice de préjugés entretenus par la routine, en un mot à aplanir la voie de la recherche. Mais c'est une attitude avant tout critique, tournée vers le passé, qui ne communique aucun élan à l'investigation. Pour progresser, celle-ci a besoin d'idées neuves, de questions jamais encore formulées, toutes choses qui ne peuvent découler du seul résultat des mesures et auxquelles le positivisme oppose une fin de non-recevoir. Il est significatif, à ce propos, que les positivistes de toutes nuances se soient rebellés jusqu'à la fin contre l'introduction d'hypothèses atomiques et n'aient pas voulu reconnaître les constantes universelles. Celles-ci, en effet, constituent un témoignage manifeste de l'existence dans la nature d'une réalité indépendante de toute mesure humaine. Aujourd'hui, même un positiviste conséquent pourrait ne voir dans les constantes universelles que des inventions qui se sont simplement révélées utiles parce qu'elles permettent de décrire d'une manière exacte et complète les résultats des mesures les plus diverses. Mais on ne trouverait guère de physiciens pour se rallier à une telle interprétation. Les constantes universelles n'ont pas été inventées à des fins de commodité, mais se sont imposées aux savants et nous savons avec certitude que toutes les mesures à venir nous ramèneront aux mêmes constantes. En résumé, nous dirons donc que la physique postule l'existence d'un monde réel indépendant de nous, monde que nous n'appréhenderons certes jamais d'une manière directe, mais seulement grâce à nos perceptions sensorielles et aux mesures que nos sens nous communiquent. (Max Planck, "L'Image du monde dans la physique moderne", 1933, traduction Cornélius Heim, Gonthier, 1963, page 127)>>.


(b) La réalité indépendante est l'autre que le solipsisme de Berkeley tente d'éliminer. Connaître la réalité indépendante, malgré son immense complexité est le projet d'intelligibilité ou de rationalité de la science.


(c) Citation :


- <<le réalisme physique n'est autre que la thèse selon laquelle l'expression <réalité indépendante> (indépendante de l'homme s'entend) non seulement a un sens mais encore désigne une entité connaissable en droit grâce à la science (même si elle n'est pas dès maintenant entièrement connue). Lorsque cette thèse est adoptée l'on doit, à l'évidence, considérer que le but de la science est la connaissance en question et l'on doit d'autre part considérer aussi qu'un savoir relatif aux règles efficaces de prédiction et d'action, même s'il constitue, comme on l'a souligné, une connaissance authentique, ne peut manifestement à lui seul être identifié à la connaissance cherchée. Comme d'autre part, la connaissance scientifique a un caractère de certitude (au moins relative) qui la différencie des pures et simples conjectures, la personne qui estime que le réalisme physique est une thèse juste s'attend à ce que, au fur et à mesure de son développement, la physique développe des théories de plus en plus générales et qui ne soient jamais durablement rivales. Dans chaque domaine, ces théories doivent ainsi être uniques aux tâtonnements éphémères près, et elles doivent être formulables comme des descriptions du réel. La seconde de ces conditions s'exprime aussi en disant que ces théories doivent pouvoir être énoncées en termes d'objectivité forte. Or, si l'on considère la formulation habituelle (universellement acceptée avec quelques variantes qui ne portent pas sur le fond) de la mécanique quantique on constate qu'elle satisfait bien à la condition d'unicité mais non à celle d'objectivité forte. Et si l'on considère au contraire les diverses tentatives passées ci-dessus en revue on constate au contraire que celles d'entre elles qui aboutissent (variables cachées non locales, relativité des états...) satisfont à cette dernière condition mais que, à l'évidence, elles sont multiples, sans qu'un moyen existe de scientifiquement les départager. Il faut conclure de là, me semble-t-il, que le réalisme physique représente un idéal dont nous sommes extrêmement loin. Et une comparaison avec les conditions qui ont régné dans le passé nous montre même que nous sommes considérablement plus loin de la réalisation de l'idéal dont il s'agit que nos prédécesseurs ne pensaient l'être il y a cent ans. (Bernard d'Espagnat, "Une incertaine réalité", Gauthier-Villars, 1985, p. 146)>>.


(d) Le principe de la réalité indépendante n'est pas la négation de l'influence du sujet observateur sur l'objet observé ou de l'expérimentateur sur l'expérience. Il est vrai que sur ce plan, la démarche scientifique reste très distante à l'égard de ce fait troublant, découvert par la physique quantique. La manière dont le matérialisme scientifique escamote certaines questions et nie certains faits équivaut à la formulation (restant implicite) de postulats métaphysiques (cachés). En ce sens, le scientiste tombe dans les travers et dangers de l'Inquisition et du fondamentalisme qu'il dénonce. Si la réalité indépendante peut être connue, asymptotiquement, c'est par la multiplication et la conciliation théorique des points de vue. Ainsi l'optique est-elle en mesure d'expliquer les illusions d'optique. Cela suppose une certaine révision de la définition de l'objectivité.


- <<Il faut également convenir que la métaphysique scientifique évolue elle-même très vite, en fonction de l'émergence des nouvelles sciences ou procédures de recherche. Contrairement à ce qu'affirme Wallace, le réalisme (il existe un réel indépendant de l'observateur) est de plus en plus remis en cause, comme nous l'avons plusieurs fois montré dans nos chroniques. De la même façon, loin de considérer que le sujet doit être évacué dans la formulation des connaissances, beaucoup de disciplines, à commencer par la mécanique quantique, prennent en considération la relation sujet observant et entité observée. Plus exactement, le constructiviste postule que le monde des connaissances se construit par une interaction permanente entre les sujets-acteurs et un univers indescriptible en soi. Ceci constitue indéniablement un nouveau type d'option métaphysique, mais beaucoup plus ouvert à la subjectivité que le réalisme pur et dur. (Jean-Paul Baquiast, notes sur "The Taboo of subjectivity. Toward a new science of consciousness", 26 juillet 2004, site "Automates Intelligents", http://www.automatesintelligents.com/biblionet/2004/aout/taboo.html)>>.


(e) Voir Deux réels. Réalité concrète. Science.


(f) Lire "Inclusion Exclusion". "Réalité Représentations". "Trois Niveaux".




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Auteur.

Hubert Houdoy

Mis en ligne le Lundi 30 Juin 2008



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