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Glossaire Détaillé, Lettre L, numéro 15

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Les deux trinités . (a) Les deux trinités est le titre d’un tableau de Bartolomé Estéban Murillo (Séville, Espagne, 1618-1682). Peinte vers 1675-1682, cette vaste huile sur toile de 293 x 307 cm est à la National Gallery à Londres. Le tableau représente deux trinités:

sur Terre, la Sainte famille (Jésus, Marie, Joseph) et
dans le Ciel, la Sainte Trinité (Père, Fils, Saint-Esprit).

(b) La sainte famille est peinte avec beaucoup de tendresse et d’ humanité. Elle est représentée dans l’horizontale du tableau. Dans un paysage incertain, puisque les nuages semblent toucher les ruines, Joseph et Marie entourent Jésus. Ils lui donnent chacun une main, comme pour accompagner ses premiers pas sur terre. Marie est assise sur la dalle sur laquelle marche Jésus. Joseph est mi-accroupi, mi-agenouillé devant le fils de Dieu. Il est le seul à tourner son visage vers nous. Marie regarde vers Jésus et Jésus-Christ regarde vers Dieu.

(c) La Sainte Trinité est représentée dans la verticale qui, bien sûr, est la plus grande dimension du tableau. Jésus est en bas. Par lui, le verbe se fait chair. Ses pieds touchent la terre par une dalle qui pourrait bien être une pierre tombale. Pour l’instant, son visage a la douceur de l’agneau. Juste au-dessus de lui vole une colombe, le Saint-Esprit de la parole et du don des langues (Pentecôte). Dieu le père est au zénith du tableau. Ce vieillard à la barbe blanche est Le Créateur . Il pose une main sur un globe terrestre. Sa main droite est ouverte dans le geste de celui qui lâche une colombe ou un pigeon voyageur. Il n’y a plus d’ échelle de Jacob . Le Messie est venu sur terre.

(d) Tout empreint d’ élévation, ce tableau n’a aucune profondeur. Les caresses des mains de Jésus à celles de Marie et de Joseph sont des caresses distraites . Grimpé sur son bloc de pierre, l’enfant Jésus ne pense déjà qu’à s’élever, quand ses parents ont encore la responsabilité de son élevage. Dieu repose sur des nuées peuplées de six angelots. Les nuages qui les portent bouchent toute perspective.

Voir Joseph (saint) . Jésus de Nazareth . Jésus-Christ. Bouc émissaire . Christ mort .

Les Écuries d’Augias . (a) Nettoyer les écuries du roi Augias est un des 12 Travaux d’Héraclès . Pour cela, il détourna ni plus ni moins le cours d’un fleuve pour le faire couler dans les écuries.

(b) Henri Pourrat nous explique que les habitants des Monts du Forez et de Limagne font de même dans les burons ou les jas de leurs jasseries.

(c) On peut voir un béal et une vanne rudimentaire, prévus à cet effet, au lieu-dit Les Chambons près de Roche-en-Forez.

Les égarements . “Les Égarements du cœur et de l’esprit “ (1736) de Claude-Prosper Jolyot de Crébillon (Crébillon fils, 1707-1777). Ce roman inachevé décrit l’initiation mondaine d’un jeune homme de dix-sept ans qui ignore tout de l’ amour, des femmes, du désir et de la séduction. Le livre est écrit à la première personne et au passé. Monsieur de Meilcour écrit ses mémoires après quelques années de libertinage. En moins de deux semaines, un naïf devient un “homme du monde”. Outre Versac, digne du Valmont des “Liaisons Dangereuses”, trois personnages féminins participent à son initiation.

(a) Une amie de sa mère, la marquise de Lursay, une coquette qui sait utiliser la force de la beauté, fait au jeune homme des avances qu’il ignore. Mais cela contribue à le flatter et à guérir sa timidité.

(b) Une jeune fille, Hortense de Théville, vierge sage qui résiste à Versac, lui fait comprendre la différence entre le goût et la passion.

(c) “Les Égarements” s’achèvent par le dépucelage du jeune homme par Madame de Senanges. Pour cette femme, <toujours au dessus du préjugé>, il s’agit d’un caprice. Versac et son entourage libertin considèrent ce dépucelage par une femme mûre comme un passage obligé dans un jeu de l’oie ou une Carte du Tendre: <<Vous êtes trop jeune pour ne pas avoir Madame de Senanges. Vous avez actuellement besoin d’une femme qui vous mette dans le monde>>.

A la fin du roman, le héros hésite encore entre la séduction et l’amour.

Voir Cinq sens . Sens du goût . Sens de la vision . Captation visuelle du désir .

Les idées ont des ailes . (a) La formule <Les idées ou les mots ont des ailes> exprime cette difficulté que nous avons à les capturer et à les garder tant que nous ne leur avons pas donné une formulation matérielle plus lourde (papyrus, argile, pierre, papier, bande magnétique) ou une forme plus structurée (chant, poésie, rimes).

(b) Les muses, les sirènes, l’ amour, le désir, les idées sont volages, volants ou volatiles.

(c) Les idées, les inspirations des muses, restent insaisissables pour nous et incommunicables aux autres tant que nous ne les avons pas inscrites, couchées sur le papier. C’est toute la différence entre la virtualité et l’ actualité. Mais, pour coucher les idées sur le papier, il faut vouloir faire l’amour avec leurs inspiratrices. A priori, elles sont toujours d’accord. Ce qui tendrait à prouver qu’elles sont:

soit de nature divine. Les Muses ne sont-elles pas filles de Zeus et de Mnémosyné ?
soit, comme nos hypothétiques ancêtres féminines , comme les actuelles femelles singes, des êtres dangereux, maléfiques, pervers, démoniaques (c’est une religion refoulée qui le dit), dont le désir sexuel serait insatiable.

Voir Les muses ont des ailes . Les anges ont des ailes . Les muses ont un sexe . Les anges n’ont pas sexe .

Les Massons . texte. (a) Dans les Monts du Forez , le lieu-dit “les Massons”, jadis Maczon, sur le Vizézy est aujourd’hui un gîte rural. Il est installé dans un ancien moulin à eau alimenté par une conduite forcée. Il fait partie des soixante-dix moulins du Vizézy .

(b) La maison du propriétaire est un ancien moulin banal dont l’architecture témoigne de l’ancienneté de la construction (inscription de la date de 1575) et de la noblesse du propriétaire ou de son tenant-lieu. Même ce vieux bâtiment a du être précédé par d’autres constructions, plus rudimentaires, lorsque le comte Guy II de Forez confia aux moines de La Bénisson-Dieu les essarts de Roche-en-Forez. Le Béal Comtal (creusé en 1201 autour de 1200 mètres d’altitude) qui alimente la Traverse de Courreau montre tout l’intérêt stratégique de ce vallon du Vizézy pour les Comtes de Forez .

(c) Malgré des effondrements, il semble que le moulin des Massons et le château comtal de Fraisse (il reste la chapelle) aient été reliés par des souterrains. Or les souterrains sont avérés dans d’autres fermes fortifiées des environs comme Le Chevallard de l’Ollagneraie ou le “château” de Chavassieux, tous deux sur la Trezaillette.

(d) Ces maisons fortes, réserves de grains ou de farine pour les hommes, de fourrage pour les chevaux, voire de monnaie quand les redevances en nature deviennent des redevances en monnaie, sont assez nombreuses et réparties dans la montagne. Au-dessus de Roche, le vallon du Probois a aussi son Château Gaillard à 1280 mètres d’altitude. Tous témoignent d’un échelon de la hiérarchie féodale situé juste au-dessus des simples producteurs. Cet échelon est parfois, pour celui qui l’occupe, celui de l’ ouverture de la noblesse . Comme le sont souvent les petits chefs, une fois installés, il est peut-être, aussi, un facteur de l’ inhibition au défrichement .

Les mêmes causes ne produisent pas les mêmes effets , texte. Hommes et femmes de tous âges se débattent dans des liens difficiles avec leur proches. Bien souvent, ils ne comprennent pas la cause ni le sens de ces difficultés. Les exemples qui vont suivre sont très schématisés. Ils donnent quelques causes de blocages ou de pannes rencontrés par certains individus.

Soyons clairs. Quand nous donnons un exemple, nous nous efforçons de montrer comment tel vécu infantile a pu, chez telle personne, provoquer tel blocage 20 ou 30 ans plus tard. Mais il ne faut pas confondre la clarté de l’explication avec un déterminisme causal. Car, justement, dans ces domaines où les causes ne peuvent être isolées en laboratoire, les mêmes causes ne produisent pas les mêmes effets. Autrement dit, les obstacles ne sont pas systématiquement bloquants. Qui plus est, s’ils le sont, ils ne le sont pas à vie. C’est ce que nous appelons le processus fractal du futur . Cela veut dire que: même avec un vécu semblable à ceux évoqués plus bas, un individu n'est pas déterminé à produire des symptômes identiques.

Les mêmes causes produisent les mêmes effets , texte. Les formules mathématiques des lois physiques sont “inventées” dans les domaines où les causes peuvent être isolées en laboratoire. Toute la difficulté des expériences scientifiques consiste justement à ne faire varier qu’une seule cause, toutes choses restant égales par ailleurs. On peut donc mesurer le phénomène en entrée (exemple: intensité du courant) et le phénomène en sortie (exemple: température de la résistance). On aboutit ainsi à des lois physiques montrant des corrélations strictes. Ces lois sont justes, vraies, valides, valables. Elles permettent de faire des prévisions, à la condition de bien connaître les conditions initiales. Mais les conséquences d’un phénomène ne sont prévisibles sur la base de ces lois que lorsque les conditions sont véritablement identiques. Dans la réalité quotidienne, il est beaucoup plus difficile de définir les conditions exactes. Et elles peuvent comporter tant de paramètres que nous ne savons plus prévoir les conséquences. Dans les cas de complexité, les effets de synergie font que les mêmes causes ne produisent pas les mêmes effets .

Les Muses . Personnages de la mythologie grecque .

(a) Les Muses sont les déesses de la mémoire ou du souvenir. Chacune d’elles est attachée à un type d’expression et de formulation des connaissances en informations. A l’origine, il y avait Trois Muses . Leur nombre s’est accru au fur et à mesure des inventions humaines. Il s’est définitivement fixé à neuf. Les noms et les rôles respectifs des muses furent tardivement définis:

Calliopé, “à la voix harmonieuse”, est la déesse de la Poésie épique. Apollon lui donna un fils célèbre: Orphée.
Clio, “célébrée”, est la déesse de l’Histoire. Mère de Hyacinthos.
Euterpè, “gaieté”, déesse de la Flûte.
Terpsichore, “joie de la danse”, déesse de la Poésie légère et de la Danse.
Erato, “aimable”, déesse de la Lyrique chorale.
Melpomène, “chant”, déesse de la Tragédie.
Thalie, “abondance, bonne chère”, déesse de la Comédie.
Polymnie, “plusieurs chants”, déesse de la Pantomime.
Uranie, “la céleste”, déesse de l’Astronomie. Serait la mère de Linos, qu’elle aurait eu d’ Amphimaros, à moins que ce ne soient Calliopé et Apollon ?

(b) Ces divinités secondaires dépendent d’un dieu prestigieux. Apollon, dieu de la musique et des devins, était le maître des Muses.

Jean Auguste Dominique Ingres a rendu hommage à l’ inspiration de Luigi Cherubini (1760-1842) et à la muse de la poésie lyrique dans un tableau (huile sur toile, musée du Louvre) intitulé: “Le compositeur Cherubini et la muse de la poésie lyrique”.

Voir Les muses ont des ailes . Les muses ont un sexe . Piérides. Pièros. Evippé. Nymphes. Sirènes. Plumes. Culot. Laisser des plumes . Thamyris. Rôle institutionnel des muses . Jalousie. La Dame de Brassempouy . La Vénus de Willendorf .

Les muses ont des ailes . (a) Les muses ont des ailes pour bien montrer que, même pour ceux qui sont chéris des dieux, l’ inspiration:

est volatile, instantanée, insaisissable par un désir distrait .
est dans l’air du temps . Si l’un ne sait pas la saisir, un autre le saura. Pour cela, il faut aspirer à la découverte . Pas question d’un désir tendu vers la cible, car c’est la cible elle-même que l’on cherche d’abord à imaginer.

(b) Pour recevoir l’inspiration, il faut n’émettre aucune restriction, aucune exigence a priori sur sa forme ni sur son apparence. La vérité sort du puits, mais toute nue . Celui qui ne la trouve pas assez belle la laissera tomber. Un autre saura peut-être la chérir. C’est pourquoi Georges Brassens fait l’éloge de Don Juan en ces termes: <<Cette fille est trop vilaine, il me la faut !>>.

(c) Celui-là (ou celle-là) ne trouvera pas l’inspiration s’il réserve son intérêt et son amour au seul (beau ou puissant) corps plein modelé pour la société. Utilisant les informations déjà produites et normalisées par la culture ethnique , il est sourd à l’ inspiration brute . Les muses iront la souffler ailleurs, l’inspirer à d’autres, l’incorporer dans un corps virtuel plus réceptif.

Voir Le verbe se fait chair . Les anges ont des ailes . Les idées ont des ailes . Apelle. La calomnie d’Apelle .

Les muses ont un sexe . (a) Si les muses ont un sexe, c’est pour faire l’amour tant avec leur dieu tutélaire Apollon (Calliopé lui donna un fils, Orphée) qu’avec ceux qu’elles inspirent (Clio eut du roi Pièros un fils nommé Hyacinthos), les poètes dont elles sont l’ inspiration.

(b) Le sexe (genre) des muses n’a pas beaucoup plus d’importance que le sexe des anges . Ce qui importe pour les anges c’est qu’ils n’en aient pas. Ce qui importe pour les muses, c’est qu’elles en aient un. Les muses ont un sexe pour rentrer en rapport avec un autre sexe. Les poètes mâles se plaisent à penser que les muses sont de sexe féminin . Je les comprends. Mais Jean Cocteau n’a jamais manqué d’inspiration. La muse préférée de Sapho pouvait être une femme, qu’importe. D’autres poétesses peuvent penser que leurs muses sont de sexe masculin . Mon amie les comprend.

(c) Les Muses sont des virtualités. Les grecs les voyaient comme des divinités. Cela revient au même. Les muses ne peuvent se réaliser que par le contact avec les êtres humains. Elles sont des intermédiaires entre le verbe de Zeus et d’Apollon et la chair des êtres humains. Leur amour séraphique ne connaît pas la culpabilité.

Voir Le verbe se fait chair . Différenciation sexuelle . Le sexe et la mort . Homines intelligentiae .

Les ombres du coeur . (a) “Les ombres du coeur” est le titre d’un film de Richard Attenborough, avec Antony Hopkins (Le Silence des agneaux , Retour à Howard End, Les Vestiges du Jour, Légendes d’Automne) et Debra Winger. Il manifeste les évolutions que peut prendre la motivation et les mobiles qu’en conséquence il pense pouvoir ou ne pas pouvoir accepter ou assumer.

(b) Un professeur d’université, vivant tranquillement à Oxford, passe successivement par:

l’ amour de l’absente (sa mère est morte dans sa petite enfance),
l’ amour de l’absence (l’écriture de contes pour enfants, la production en série de conférences et de dissertations sur Dieu, l’évocation abstraite de la souffrance tandis que la sienne a disparu dans la sublimation et un certain refus d’ être amoureux qu’il partage avec son frère),
l’ amour de la dame (une femme mariée puis divorcée), à distance respectable (échanges poétiques sur la poésie, sympathie, amitié, mariage blanc, affection, attentions),
l’ amour physique de la femme présente (le réveil du désir, l’audace du passage à l’acte sexuel, la fin de la sublimation, l’ acceptation des contraintes de la présence quotidienne, dont les remarques des collègues masculins),
en même temps qu’à la douleur de la mort annoncée de la femme malade et incurable. Cette douleur et ce refus de la mort est une souffrance jusqu’à ce que la femme aimée elle-même lui demande de vivre ici et maintenant avec elle tant qu’elle est vivante. Le film ne dit pas si elle était une disciple d‘ Emmanuel Swedenborg .
le refus de l’absence , provoqué par la mort de celle à qui son corps était maintenant attaché par les liens du plaisir (excitation) comme par ceux de la tendresse (consolation). D’où la tentation de la défiance et une véritable haine de l’absent (Dieu) maintenant que la souffrance est bien présente.
Par l’intermédiaire du frère et du fils de la femme, tous trois ayant connu l’ expérience de la mort de la mère, le professeur peut revenir à l’ amour de l’absent (sûrement la femme morte, sûrement son enfance perdue, peut-être encore l’amour de Dieu) sous une forme beaucoup moins théorique et beaucoup plus humaine. En témoigne son dialogue avec un ancien élève qui lui rappelle la formule de la joute intellectuelle: “Argumentez, je suis de taille” qu’il appliquait jadis aux dissertations livresques sur le “plaisir d’aimer sans l’oser dire”. A cette époque, l’élève, qui ne manquait ni d’ aptitudes ni de compétences, n’avait pas beaucoup d’ appétence pour ces jeux qui lui semblaient hors du réel. Il avait la prescience de ce que ce comportement impliquait de sélection et d’ élévation protectrice au-dessus de la mêlée. La relation sexuelle était alors sublimée dans une relation intellectuelle entre hommes où se jouait l’ exclusion du sexe et l’ exclusion de la femme .

(c) Si l’amour de Dieu a été préservé par cet homme qui avait d’abord fait le sacrifice de la femme à Dieu (Saliéri d’Amadéus ) c’est qu’il sera passé, par l’expérience de la mort de l’être aimé ou de l’objet de croyance, de la croyance de Dieu à l’extérieur à celle de Dieu à l’intérieur .

Voir Heureux mortel . Question de la mort . Mort de la chair . Ubi caritas . Perfusion . Refuser d’être amoureux . Ballet. Se payer de mots, entre hommes . Échange de femmes entre hommes . Vox clamens in deserto . Acceptation de la mort . Accepter de vivre .

Texte [hontsacr;Le Honteux et le Sacré]. La Castration Masculine.

Auteur

Hubert Houdoy

Créé le 12 Juillet 1999

Modifié le 1 er Octobre 1999

Suite

Glossaire Détaillé, Lettre L, numéro 16

Lettre M

Glossaire Détaillé, Lettre M, numéro 01

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Mise à jour: 24/12/1999