Nomade



(A) Généralités.



(a) Apparition. L'adjectif <nomade> apparaît en 1540, dans le vocabulaire juridique. En 1730, il signifie "qui change souvent de résidence".


(b) Définition. Soit adjectif, soit nom commun, <nomade> a pour signification courante "qui n'a pas de domicile fixe", "qui erre".


(c) Etymologie. Le pluriel latin <nomades> est copié d'un mot grec qui signifie "pasteurs". Il vient du verbe grec <nemein> qui signifie "faire paître". De là dérive l'adjectif latin <nomas, adis> "nomade", "qui erre avec ses troupeaux".


(d) Références littéraires :


- <<Sans ces derniers mots, Raphaël eût été séduit par la fausse bonhomie du mielleux médecin, mais il était trop profond observateur pour ne pas deviner à l'accent, au geste et au regard qui accompagnèrent cette phrase doucement railleuse, la mission dont le petit homme avait sans doute été chargé par l'assemblée de ses joyeux malades. Ces oisifs au teint fleuri, ces vieilles femmes ennuyées, ces anglais nomades, ces petites-maîtresses échappées à leurs maris et conduites aux eaux par leurs amants, entreprenaient donc d'en chasser un pauvre moribond débile, chétif, en apparence incapable de résister à une persécution journalière. Raphaël accepta le combat en voyant un amusement dans cette intrigue. - Puisque vous seriez désolé de mon départ, répondit-il au docteur, je vais essayer de mettre à profit votre bon conseil tout en restant ici. Dès demain, j'y ferai construire une maison où nous modifierons l'air suivant votre ordonnance. (Honoré de Balzac, "La Peau de chagrin", 1831, III, L'Agonie)>>.


- <<- Pourquoi donc avoir tiré sur elle avec tant d'adresse ?

- Parce que je la voudrais morte ou dans vos bras. Oui, monsieur, j'ai pu aimer le marquis de Montauran le jour où j'ai cru voir en lui un héros. Maintenant je n'ai plus pour lui qu'une douloureuse amitié, je le vois séparé de la gloire par le coeur nomade d'une fille d'Opéra. (Honoré de Balzac, "Les Chouans", 1829, III, Un jour sans lendemain)>>.


- <<Cette simplicité de moeurs, cette pauvreté insouciante et joyeuse de tant de jeunes gens, cette vigoureuse et saine existence, sans fausse politesse ni fausse sensibilité, cette allure mâle donnée à tout, cette uniformité de sentiments imprimés par la discipline, sont des liens d'habitude grossiers, mais difficiles à rompre, et qui ne manquent pas d'un certain charme inconnu aux autres professions. J'ai vu des officiers prendre cette existence en passion au point de ne pouvoir la quitter quelque temps sans ennui, même pour retrouver les plus élégantes et les plus chères coutumes de leur vie. Les régiments sont des couvents d'hommes, mais des couvents nomades ; partout ils portent leurs usages empreints de gravité, de silence, de retenue. On y remplit bien les voeux de Pauvreté et d'obéissance. (Alfred de Vigny, "Servitude et grandeur militaires", 1835, Livre II, Chapitre I, Sur la responsabilité)>>.


- <<On fit trente pas à peu près et l'on s'arrêta sur une petite esplanade tout entourée de rochers dans lesquels on avait creusé des espèces de sièges, à peu près pareils à de petites guérites où l'on monterait la garde assis. Alentour poussaient, dans des veines de terre végétale quelques chênes nains et des touffes épaisses de myrtes. Franz abaissa une torche et reconnut, à un amas de cendres, qu'il n'était pas le premier à s'apercevoir du confortable de cette localité, et que ce devait être une des stations habituelles des visiteurs nomades de l'île de Monte-Cristo. (Alexandre Dumas père, "Le Comte de Monte-Cristo", 1845, Chapitre XXXI, Italie. Simbad le marin)>>.


- <<L'Espagne est un des pays où se trouvent aujourd'hui en plus grand nombre encore, ces nomades dispersés dans toute l'Europe, et connus sous les noms de Bohémiens, Gitanos, Gypsies, Zigeuner, etc. La plupart demeurent, ou plutôt mènent une vie errante dans les provinces du Sud et de l'Est, en Andalousie, en Estramadure, dans le royaume de Murcie ; il y en a beaucoup en Catalogne. Ces derniers passent souvent en France. On en rencontre dans toutes nos foires du Midi. D'ordinaire, les hommes exercent les métiers de maquignon, de vétérinaire et de tondeur de mulets ; ils y joignent l'industrie de raccommoder les poêlons et les instruments de cuivre, sans parler de la contrebande et autres pratiques illicites. Les femmes disent la bonne aventure, mendient et vendent toutes sortes de drogues innocentes ou non. (Prosper Mérimée, "Carmen", 1845, Chapitre IV)>>.


- <<Tandis que M. d'Arminges donnait les ordres pour que les chevaux, qui se rafraîchissaient, fussent mis en état de partir, les deux jeunes gens montèrent aux plus hautes fenêtres de la maison qui dominaient les environs, et virent effectivement poindre du côté de Hersin et de Lens un corps nombreux d'infanterie et de cavalerie. Cette fois, ce n'était plus une troupe nomade de partisans, c'était toute une armée. (Alexandre Dumas père, "Vingt ans après", 1845, Chapitre XXXVII, La veille de la bataille)>>.


- <<Et ce qu'il y a d'extraordinaire, c'est qu'en même temps que déborde l'inégalité des fortunes et qu'une aristocratie commence, la grande impulsion égalitaire au dehors oblige les possesseurs industriels ou fonciers à cacher leur luxe, a dissimuler leurs richesses, de crainte d'être assommés par leurs voisins. On ne reconnaît point la puissance exécutive; on chasse à volonté les autorités locales que l'on a choisies, et on leur substitue des autorités nouvelles. Cela ne trouble point l'ordre; la démocratie pratique est observée, et l'on se rit des lois posées par la même démocratie, en théorie. L'esprit de famille existe peu; aussitôt que l'enfant est en état de travailler, il faut, comme l'oiseau emplumé, qu'il vole de ses propres ailes. De ces générations émancipées dans un hâtif orphelinage et des émigrations qui arrivent de l'Europe, il se forme des compagnies nomades qui défrichent les terres, creusent des canaux et portent leur industrie partout sans s'attacher au sol; elles commencent des maisons dans le désert où le propriétaire passager restera à peine quelques jours. (François-René de Châteaubriand, "Mémoires d'outre-tombe", 1850, Partie I, Dangers pour les Etats-Unis)>>.


- <<Hamilcar avait fait cela pour complaire aux instincts de son armée, et, par cette trahison, l'attacher à sa personne. Donc, la guerre était finie ; du moins, il le croyait ; Mâtho ne résisterait pas ; dans son impatience, le Suffète ordonna tout de suite le départ. Ses éclaireurs vinrent lui dire que l'on avait distingué un convoi qui s'en allait vers la Montagne-de-Plomb. Hamilcar ne s'en soucia. Une fois les Mercenaires anéantis, les Nomades ne l'embarrasseraient plus. L'important était de prendre Tunis. A grandes journées, il marcha dessus. (Gustave Flaubert, "Salammbô", 1862, Chapitre XIV, Le Défilé de la Hache)>>.


(e) Voir A partir d'un mot.



(B) Humain.



(a) Stricto sensu. Le nomade est "une personne qui n'a pas d'habitation fixe, qui se déplace fréquemment". Le nomadisme désigne la vie nomade.


(b) Un nomade est une personne en perpétuel déplacement. C'était le cas de la plupart des groupes humains au Paléolithique, avant la révolution du Néolithique. Le nomade primitif, des peuples de chasseurs-cueilleurs, pouvait se contenter de parcourir les mêmes territoire de chasse et de cueillette : il n'était pas encore un sédentaire. La sédentarité des uns (les cultivateurs) accentuera le nomadisme des autres (les éleveurs de l'empire des steppes).


- <<On peut ainsi très aisément imaginer des petits groupes de Tétons arrivant à pied, vers 1760, les poteaux de leurs tipis liés en faisceaux sur les flancs de leurs gros chiens, leurs femmes et leurs fillettes chargées de ballots, pour visiter les villages des Arikaras et leur demander du maïs, des courges séchées, du tabac, obtenant parfois quelques chevaux de leurs voisins compréhensifs. (George E. Hyde, "Histoire des Sioux. Le peuple de Red Cloud", 1975, traduction Philippe Sabathe, éditions du Rocher, 1994, page 37)>>.


(c) Le nomadisme moderne est la capacité, pour un travailleur, de pratiquer l'essentiel de ses activités pendant ses voyages. Le bureau permanent est remplacé par un bureau virtuel doté d'une certaine autonomie.


(d) Largo sensu. Dans un sens plus général, le nomade est celui qui n'est pas enfermé dans des frontières nationales ou professionnelles. La polyactivité et le télétravail sont les formes modernes du nomadisme. Nomade, parce qu'il ne connaît plus ni les cloisons de l'entreprise ni les frontières de l'État, le (télé) travailleur veille lui-même à son employabilité. Il négocie sa participation à des projets, quand il ne crée pas son activité indépendante.


(e) Voir Activités en réseau et à distance. Emploi autonome. Huns. Indépendance salariée. Mongols. Travois.



(C) Artefact.



(a) Un objet nomade (téléphone, ordinateur individuel, traducteur parlant, etc) est un objet technique conçu pour une certaine autonomie électrique (batteries d'accumulation) et une grande portabilité.


(b) De nombreux objets nomades deviennent aussi des objets communicants, entre eux. Ils peuvent communiquer entre eux, via Internet.


(c) Voir Communautés nomades. Nomade moderne. Robinson Crusoé.


(d) Lire "Réseaux Nomades". Souris Hommes". "Robinson Crusoé".



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Auteur. Hubert Houdoy Mis en ligne le Lundi 26 Mai 2008



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