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"Certaines entreprises s'organisent autour d'un noyau restreint qui en forme le coeur stable et permanent, tandis que le maximum d'opérations sont déléguées à l'extérieur." (Ph. Séguin)
http://rad2000.free.fr/noyrestr.htm
Ce phénomène récent est fondamental.
Il est significatif de la réduction de l'emploi salarié. Lié à la mondialisation, il marque une étape dans le développement de la culture d'entreprise. Beaucoup de licenciements massifs correspondent à l'abandon de divisions industrielles jugées non stratégiques. Chaque entreprise externalise les activités pour lesquelles elle n'a pas une part critique du marché. Car une action stratégique implique d'avoir un poids suffisant pour être maître de ses mouvements.
Mais pourquoi un tel mouvement se développe-t-il aujourd'hui? Ce phénomène marque l'arrêt des prétentions autarciques des grandes entreprises. Comme pour la décolonisation, nous assistons à la fin d'une croissance extensive des entreprises. La volonté de puissance ne suffit plus. Il faut être utile au consommateur. En leur temps, la villa esclavagiste et le domaine féodal ont connu une telle crise. Aujourd'hui, une entreprise qui fabrique des automobiles ne peut plus se permettre d'inventer et de vendre des logiciels de conception assistée par ordinateur. Personne ne sait tout faire à la fois. Une entreprise qui vise le leadership mondial de la distribution électrique ne peut plus construire et vendre des appartements à la montagne. Chacun son métier!
La diversification dans toutes les directions a fait son temps. Pourquoi? Parce qu'il ne suffit plus de produire pour vendre à un consommateur ébahi. On ne cherche plus à créer des conglomérats pour réduire les risques conjoncturels. Les activités industrielles ne sont plus combinées comme des actions dans un portefeuille boursier. Le problème est plus complexe que la compensation statistique des risques. L'industrie est un métier. Ce n'est pas un loisir de spéculateur. La cause de ce "downsizing" réside dans la gestion de la complexité croissante des métiers.
Le temps n'est plus à la croissance extensive. Car nous passons de marchés de vendeurs, dominés par la technostructure, à des marchés d'acheteurs, perturbés par les fluctuations de la demande. Nous passons d'une économie poussée par la réduction des coûts (économies d'échelle) à une économie tirée par la valeur d'usage (conception en partenariat). Le client, consommateur final ou industriel, se fait plus exigeant car il ne ressemble plus à son voisin. Lui même doit se spécialiser. Les petites séries ont considérablement modifié les conditions de la production de masse. La spécialisation est cumulative et contagieuse.
Ce qui est plus important, c'est que même le métier de base n'est plus réalisé dans une seule entreprise. Il y a déjà longtemps que les constructeurs d'automobiles, d'avions, de fusées ou de chars ne fabriquent plus qu'une faible partie du produit (15 à 20%). Ils sont devenus des assembleurs dans une entreprise étendue. Ce mouvement d'implosion de la grande entreprise a atteint une dimension critique. Si le produit ne requiert plus un producteur unique, peut-on imaginer un producteur par pièce? Où se situe la limite?
Spécialisation.
Ce n'est pas le travail qui disparaît. C'est une certaine concentration des travaux sous la même autorité. Les activités abandonnées sont reprises par d'autres entreprises. Nous assistons à une accentuation de la division sociale du travail. Chaque entreprise est plus spécialisée et réactive. Pour ne pas être dépendante d'un seul client elle travaille pour plusieurs. La spécialisation est le seul moyen d'être à la pointe d'un art complexe. Cela justifie de recruter des compétences. C'est une nouvelle manière de réaliser des économies d'échelles. Car, dans le coût d'un produit, la part de la transformation matérielle diminue chaque jour. Le coût des compétences est croissant. Il faut les utiliser et les amortir. C'est sur elles que doivent porter les nouvelles économies d'échelles. Nous sommes entrés dans une société d'information qui ne cesse pour autant d'être une société de production matérielle. C'est une conséquence de notre haut niveau de vie global. Ne nous désespérons pas d'avoir des problèmes de riches. Mais regrettons que notre richesse soit si peu homogène. Car il est difficile de gérer simultanément la richesse et la misère.
Ce mouvement d'externalisation et de spécialisation est probablement irréversible. La compétence est dans la tête de celui qui pratique le métier, jour après jour. Le recours à la sous-traitance n'est pas une plaisanterie de collégien. Il devient difficile aux donneurs d'ordres de rapatrier les productions dont ils ont perdu l'expertise. Le sous-traitant spécialisé est un expert incontournable. Ceux qui ont survécu à la concurrence par les coûts ont fait la preuve de leurs capacités. La spécialisation et la division du travail ont toujours été des facteurs importants de la croissance économique. Ce sont les domaines d'application qui changent au cours des époques successives. Nous passons du travail manuel au travail intellectuel.
Un domaine de compétence souvent abandonné ou externalisé par les entreprises est celui de l'informatique. Le "facility management" consiste à confier à une entreprise spécialisée l'exploitation des programmes informatiques. On évite de se trouver avec des ordinateurs qui ne sont pas de la bonne taille ou de la bonne génération. On élimine le délicat problème de l'embauche de spécialistes coûteux dont on n'est pas sûr d'avoir un besoin permanent. Une société qui assure l'exploitation informatique de plusieurs entreprises peut acquérir des matériels mieux adaptés et embaucher des spécialistes permanents. De part et d'autre, on constate une spécialisation des compétences.
Partenariat
Il devient courant, même pour une entreprise industrielle, de sous-traiter la production des marchandises. Ce fait est préoccupant. La production ne serait-elle pas stratégique? Se pose alors la question de savoir où est le "coeur stable et permanent de l'entreprise". Se replie-t-on sur des positions préparées à l'avance? Ou cesse-t-on de reculer quand l'ennemi arrête d'avancer? La nuance est importante pour comprendre le processus. Les erreurs d'appréciation sont lourdes de conséquences.
Peut-on bien concevoir ce que l'on ne fabrique plus soi-même? Avec la conception simultanée du produit et du process, la réponse est négative. Lâcher la production implique de lâcher la conception. La solution consiste alors à intégrer le fournisseur sous-traitant dans la conception du produit. On lui délègue la conception de la pièce ou du sous-ensemble qu'il produira. Cette conception déléguée exige une grande confiance et la capacité de travailler en équipes mixtes. Elle modifie considérablement les échanges d'informations entre les entreprises. Le secret industriel n'est pourtant pas si lointain. Beaucoup d'entreprises n'ont pas supprimé de leurs contrats de travail les menaces sur ce point. Nous assistons à un conflit de valeurs et de normes de comportement. Les relations de partenariat entre client et fournisseur se développent au fur et à mesure du repli sur un noyau restreint. Et plus l'esprit de partenariat se développe, plus le noyau peut se restreindre. Cela ne va pas sans remises en cause du management au quotidien. La culture d'entreprise se transforme. Elle n'a jamais été homogène, malgré les discours officiels. Les composantes d'ouverture se développent au détriment des tendances grégaires, hostiles au "not invented here".
Implosion?
Une entreprise industrielle comporte trois domaines d'activité forts différents:
Dissocier ces trois activités est une entreprise à très haut risque. En cas d'échec, il ne sera plus possible de reconstituer l'unité préalable. Il y a un fort danger d'implosion. Celle-ci sera-t-elle fatale ou seulement critique? Les nouvelles technologies de la communication et de l'information facilitent le télétravail. De nouveaux comportements, développés par le partenariat et le groupware, réussiront-ils à créer de nouveaux sentiments de solidarité et d'appartenance? Avec la multiplication des licenciements collectifs, nous assistons à une course poursuite entre l'implosion de l'entreprise grégaire (réduction des coûts) et la création de l'entreprise étendue (synergie des compétences). Le divorce des trois domaines d'activité est-il envisageable? Quelle serait l'activité la plus stratégique? Concevoir, produire ou vendre? De nombreuses entreprises sont lancées dans ce processus de l'entreprise étendue. Toutes n'arriveront pas au même résultat, en fonction de leur situation et de leurs choix.
Pour cette raison, le mouvement de réduction sur un noyau restreint s'accompagne, le plus souvent, de partenariats et d'alliances stratégiques. L'informatique et les télécommunications connaissent ce type de restructuration. La seule dimension possible est la taille mondiale. A défaut de l'atteindre seul, il faut y parvenir avec d'autres.
Réseau international
Les alliances permettent de jouer un rôle dans la concurrence internationale. Mais les partenaires sont exigeants sur les performances. Personne n'aime combattre pour le Roi de Prusse. Ce que l'on fait mal, autant l'abandonner et concentrer ses efforts sur le noyau restreint.
Paradoxe apparent: c'est pour atteindre une taille mondiale que les entreprises se réduisent à un noyau restreint.
La mondialisation des marchés impose ses conséquences.La valeur ajoutée se répartit en couches superposées. Chaque couche est un réseau mondial. Par exemple, la concurrence sur les microprocesseurs et les mémoires est internationale. Sur cette première couche, s'érige le marché mondial des systèmes d'exploitation. Puis viennent les outils de développement et les logiciels applicatifs. Plus la couche est profonde plus la taille mondiale est requise. Les niches ne se conçoivent qu'au niveau supérieur.
Il est inutile d'être présent dans un niveau de la chaîne de la valeur sans être partenaire d'un réseau mondial. Il est difficile de se maintenir simultanément dans plusieurs niveaux sans faire des investissements massifs en recherche et en équipement. Il importe donc de bien choisir son niveau d'appartenance. Et le critère réside dans les compétences rares que l'on maîtrise. Encore faut-il satisfaire le consommateur.
Ces nouvelles contraintes de la mondialisation ne suppriment pas la concurrence. La spécialisation est source de différenciation. Les entreprises ne se ressemblent plus. Dans leur course à la productivité locale elles réclament des produits optimisés. D'où les petites séries. Les produits spécialisés sont complémentaires d'autres produits spécialisés. Dans le domaine réduit de sa compétence, l'entreprise doit diversifier son catalogue. Nous assistons à une intensification de l'exploration des possibles. L'émergence de la valeur d'usage accentue les contraintes de compatibilité entre les produits. Une innovation fonctionnelle se propage dans un réseau de complémentarité des marchandises. Le succès d'un produit entraîne le développement de certains autres. Le succès de Netscape redistribue les cartes dans la micro-informatique. Ces innovations en cascade provoquent des fluctuations de l'emploi. Les marchés chaotiques sont soumis au moindre "effet papillon" des opinions. Il faut assurer la convergence des anticipations pour éviter que les fluctuations n'empêchent l'investissement des entreprises. Soumises aux lois du marché, qu'elles renforcent en s'adonnant à une concurrence sauvage, les entreprises ne peuvent réguler les fluctuations économiques. Atténuer les conséquences sociales suppose que l'Etat sache voir plus loin que les marchés.
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Compléments
Concevoir le Produit et l'Usage
Graphe d'Exploration des Possibles
Nouvelles Technologies de la Communication et de l'Information
Définitions
NTCI et Développement local
Quelles Informations, quelle Communication ?
Quelles Nouvelles Technologies ?
Relations entre NTCI et développement du territoire
Initiatives illustrant l'impact des NTCI sur le développement