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7. Les paramètres fondamentaux


Pour Keynes, le fonctionnement du système économique n'est pas réglé par les marchandises. Il dépend du penchant des individus à dépenser et de celui des entrepreneurs à investir. D'où les deux premiers paramètres keynésiens qui sont: la propension à consommer et l'incitation à investir.

1. Propension à consommer

Les individus ne consomment pas tout leur revenu en biens de consommation. La consommation finale d'une communauté d'individus (nation économique) est donc inférieure au revenu global de cette même communauté. Il reste donc une quantité de monnaie non dépensée. Le seul achat des biens de consommation ne fait pas refluer vers les entreprises toute la monnaie qu'elles ont distribué à l'occasion de la production. Si les entrepreneurs n'ajoutent pas, de leur propre initiative, à la demande finale des consommateurs une demande additionnelle pour leur consommation productive, la boucle des revenus ne se referme pas. Il n'y a donc pas de reproduction automatique de la société sur la seule base des contraintes de reproduction des individus. Georges Bataille parlait de la Part Maudite, pour désigner cette partie considérable de la production qui, dans toute société, n'est pas affectée à sa reproduction.

2. Incitation à investir

Les entrepreneurs n'investissent que lorsque le jeu, pour tous, en vaut la chandelle, pour eux. Il ne comblent pas automatiquement le déficit de la demande de consommation finale. D'où l'importance de leurs anticipations. Car si les entrepreneurs croient que la demande finale sera forte, ils augmentent leur production, donc leur consommation productive et, partant les revenus distribués. Leurs anticipations positives donnent à la demande un niveau suffisant qui confirme leurs anticipations. Mais, à l'inverse, si leurs anticipations sont négatives, ils restreindront leurs investissement et peut-être même leur niveau de production. Ils auront alors la mévente qu'ils craignaient. Tout est une question d'opinions. L'avenir proche dépend autant des idées du présent que des faits du passé immédiat.

Puisque la propension à consommer est inférieure à l'unité, l'offre ne crée pas automatiquement sa demande. Il faut donc s'intéresser à la demande effective qui résulte des propensions des uns et des incitations des autres. Ce sera l'objet du texte suivant: Le principe de la demande effective.

3. La préférence pour la liquidité

Par ailleurs, Keynes propose une nouvelle explication du taux d'intérêt.

Les classiques voyaient le taux d'intérêt comme un prix d'équilibre. Ils le situaient à l'intersection "de la courbe de l'offre d'épargnes et de la courbe de la demande d'investissement (Keynes, p. 11)".

Dans la Théorie Générale: "le rôle du taux de l'intérêt est de maintenir en équilibre, non la demande et l'offre de biens de capital nouveaux, mais la demande et l'offre de monnaie, c'est à dire la demande d'argent liquide et les moyens d'y satisfaire (Keynes, p. 12)".

Le taux de l'intérêt ne règle donc pas le marché des capitaux mais celui de la monnaie. Vue de loin, cette modification peut paraître mineure. Il n'en est rien, car elle multiplie considérablement le nombre des agents économiques qui interviennent dans ce phénomène. Ce ne sont pas 200 familles qui influent sur la marché du capital, mais des millions d'individus qui, jour après jour, prennent des millions de micro-décisions relatives à la monnaie qui passe entre leurs mains. Et, comme en mécanique, quand le nombre des acteurs est plus grand que deux, si le déterminisme ne disparaît pas, la prévisibilité s'effondre. Ce qui revient au même pour ceux qui rêvent d'une théorie qui pourrait prédire le résultat des actions des autres. C'est bien en quoi la Théorie Générale appartient au XXème siècle, comme la Relativité et la Physique Quantique.

La vision keynésienne du taux d'intérêt introduit un nouveau paramètre culturel. Keynes le qualifie de variable psychologique. Nous nous écartons encore plus de l'économisme des néo-classiques ou de ce que Marx aurait qualifié de matérialisme vulgaire. Ce troisième paramètre est la préférence pour la liquidité. C'est en fonction de sa valeur que se détermine le taux de l'intérêt. Et c'est à cet étalon que les entrepreneurs compareront l'efficacité marginale de leur capital productif. Les entrepreneurs investiront dans la mesure où l'efficacité du nouveau capital est supérieure à l'intérêt qu'il pourrait leur rapporter.

Sur cette nouvelle base, l'argumentation keynésienne prend un autre tour. Les mécanismes économiques s'expliquent par la résultante des penchants de millions d'individus.

"Puisque le penchant des individus à dépenser et à investir dépend lui-même de leurs revenus, une relation se trouve établie entre les épargnes globales et l'investissement global".

Et cette relation va déterminer le niveau de l'emploi. Sur ce point, qui explique "le paradoxe de la pauvreté au sein de la richesse", nous suivons pleinement Keynes. Mais, à cette étape de sa construction, Keynes rencontre une difficulté de taille. Comme bien souvent, quand le problème semble insoluble avec les outils d'intelligibilité ou les moyens de calcul de l'époque, on le résout par une pseudo nécessité logique. Ce faisant, on ne fait pas forcément un choix pertinent. Mais, on provoque une certaine clôture du système d'axiomes que l'on est en train de construire.

4. La nécessaire égalité de l'épargne et de l'investissement

Cette nécessité est, pour Keynes, l'égalité de l'épargne et de l'investissement. Pour lui, elle découle de l'égalité entre le revenu et la valeur de la production. Pour nous, il s'agit, ni plus ni moins, d'un axiome de son modèle. Autrement dit, un paramètre qu'il fixe à la valeur 1, en tous temps et en tous lieux (capitalistes). Nous discuterons plus tard ce postulat. En attendant, restons dans l'argumentation keynésienne.

Il ne suffit pas que les technologies soient disponibles, que les travailleurs soient formés et que les machines soient installées pour que la production et l'emploi s'établissent à leurs maxima. La production des marchandises et leur consommation résultent d'une longue chaîne de micro-décisions. Les opinions, les anticipations et la confiance jouent un rôle majeur que les calculs ne peuvent remplacer. Il n'y a pas de futur objectif. Pas de fatalité non plus.

"Le volume réel de la production et de l'emploi dépend, non de la capacité de production ou du niveau préexistant des revenus, mais des décisions courantes de produire, lesquelles dépendent à leur tour des décisions d'investir et de l'estimation actuelle des montants de la consommation courante et future".

La résultante des penchants individuels à consommer ou à épargner les revenus détermine, en cascade, la formation des revenus. En découlent le niveau de la production et de l'emploi qui assurent l'équilibre du profit.

A chaque étape, pour chaque acteur, un choix se pose quand à l'usage du revenu, entre l'épargne et la consommation. Les entrepreneurs ne peuvent espérer vendre leur production si leur confiance dans l'avenir ne les incite pas à investir. On ne peut compter sur une consommation certaine pour investir à coup sur. Il n'y a pas de loi de reproduction automatique de la société. Sans investissement, la demande effective sera insuffisante. Ce sont des vagues successives d'investissement, basées sur une confiance dans l'avenir, qui développent l'emploi, la consommation et les débouchés réels. C'est la base de la théorie du multiplicateur d'investissement. Elle explique les phénomènes de croissance de l'emploi. La croissance et l'équilibre n'étant plus automatiques, il faut freiner les emballements spéculatifs et relancer les économies languissantes. D'où le rôle dévolu, par Keynes, à l'Etat. La politique économique de l'Etat se joue dans la fourchette suivante: "un renforcement de la propension à épargner contracte les revenus et la production, tandis qu'un accroissement de l'incitation à investir les développe". Mais Keynes ne parle pas d'investissement direct par l'Etat.

Les phénomènes d'opinion, d'anticipation et de confiance dans l'avenir sont le véritable moteur. C'est l'ensemble des prévisions et non pas une main invisible qui détermine le volume de la production et de l'emploi. Tout manque de confiance augmente l'attrait de la monnaie et réduit les opportunités. Si la monnaie a deux faces c'est probablement pour que l'une consomme la confiance et que l'autre exorcise la suspicion.

"L'incertitude au sujet de l'avenir et le découragement qui accompagnent la chute de l'efficacité marginale du capital suscitent une forte augmentation de la préférence pour la liquidité et par suite une hausse du taux de l'intérêt (p. 329)".

Après avoir tracé les grandes lignes de l'apport keynésien, il est temps de rentrer dans le détail et la précision des concepts.

Hubert Houdoy

Créé le 2 Mai 1997

Modifié le 4 Novembre 1997.


* Précédents

1. Originalité de Keynes

2. Le chômage classique

3. Les postulats classiques

4. La loi des débouchés

5. Le chômage involontaire

6. Bref résumé de la théorie de l'emploi


* Suite

8. Le principe de la demande effective


* Définitions

Les termes en gras sont définis dans le glossaire alphabétique du RAD.


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Mise à jour: 16/07/2003