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Réseau d'Activités à Distance

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L'Origine Complexe des Organisations Virtuelles


* Plan

Introduction

1. La concurrence hétérogène

2. La sous-traitance

3. L'entreprise étendue

Conclusion provisoire


* Introduction

Même si l'Europe, et tout particulièrement la France, sont en retard dans ce mouvement, le développement des organisations virtuelles est sorti du domaine de la fiction. C'est maintenant un fait avéré. De nombreux exemples sont publiés sur internet, leur lieu de prédilection. Plusieurs termes circulent pour les désigner. Dans un ouvrage récent, "The new business revolution", James Martin utilise celui de "Cybercorp". Jack Nilles, le gourou américain du télétravail, qui a déja forgé le mot "telework", propose l'expression "evanescent organization". En France, Denis Ettighoffer a vulgarisé les "entreprises virtuelles". Par contre, il est plus difficile d'obtenir une définition précise de ce phénomène multiforme.

Nous donnerons une définition assez générale, proposée par Jack Nilles lors d'une discussion électronique. Tout d'abord, il faut noter que "de telles organisations n'existent que parce que leurs employés sont capables de télétravailler". Par "organisations évanescentes" Jack Nilles désigne des "organisations de n'importe quelle taille qui comprennent une direction centrale (responsable du marketing, des finances, des ressources humaines, de la direction des projets) et un ensemble variable de travailleurs à distance dont la plupart sont affectés projet par projet. La direction centrale (permanente) peut elle-même être constituée de télétravailleurs sans que deux ne vivent dans la même commune".

Trevor Locke, secrétaire du projet Européen Télénet, a créé un réseau de télétravailleurs dans l'Est des Midlands. Il note que les télécottages, créés pour le partage d'un matériel informatique coûteux et de compétences rares, deviennent beaucoup moins nécessaires avec la standardisation et la vulgarisation des outils d'Internet. C'est pourquoi les télécentres tendent à être remplacés par des cottages virtuels. Ainsi, Brian J Goggin a-t-il créé "Wordwrights" pour la formation permanente. Une vingtaine d'intervenants se répartissent entre les projets. L'un d'eux réside aux Etats-Unis. Les autres sont dispersés entre Irlande et l'Angleterre.

Nous pensons, comme Peter McConologue, que " chaque télétravailleur peut voir, dans chaque autre télétravailleur, la perspective d'un collègue de travail ". Et si, comme le rappelle Nicole Turbé-Suetens, Internet ne fournit pas de solution miracle à l'angoissant problème du chômage, les télétravailleurs ont d'autant plus besoin de partager un marketing commun. Dans ce but, Dave Eastabrook, qui milite pour l'autonomie économique des handicapés, préconise la création de sites web spécialisés. Et Kari Burns, qui met ses compétences en marketing au service de telles organisations, prodigue des conseils sur la manière de créer un anneau ou un train de sites, par des liens hypertextuels optimisés. Pendant ce temps, à l'University College of London, dans le cadre du projet européen Event, Craig Pickup forme des chômeurs britanniques désireux de créer leur propre emploi. Parmi les études de cas soumises à leur sagacité se trouve notre "Réseau d'Activités à Distance".

Nous ne multiplierons pas les exemples. Ils sont toujours particuliers. Nous expliquerons simplement notre préférence pour le terme "organisations virtuelles". Le mot "organisation" est plus général que le mot "entreprise". Il permet d'inclure des associations voire des services publics. Le mot "virtuel" désigne non seulement la distance qui sépare les travailleurs mais l'absence éventuelle d'entité juridique au niveau le plus large. Une organisation virtuelle est donc une mouvance de compétences, appartenant à des structures juridiques diverses, coopérant à des projets multiples sans avoir de liens permanents subsistant à l'exécution de chaque projet. Une organisation virtuelle est une collection d'équipes de projet. De telles organisations virtuelles ne peuvent se créer sans un milieu propice aux échanges. L'interconnexion des sites webs et la participation à de nombreuses discussions thématiques sont la condition majeure de telles rencontres.

L'importance stratégique d'Internet dans le développement des organisations virtuelles et le scepticisme français à l'égard de cette " imitation américaine du minitel " pourraient faire douter du sérieux de cette tendance. C'est pourquoi nous irons chercher les racines beaucoup plus loin que dans le projet Arpanet du département américain à la défense. En traçant des repères historiques, nous voulons expliquer la profondeur de ce mouvement. Nous citons un ensemble d'évolutions convergentes. Toutes participent à la même transformation. Elles concernent le travail, les entreprises, le marché et nos sociétés industrielles.

NB. Les mots en gras, dans le texte, sont définis dans le Glossaire Alphabétique.


* 1. La concurrence hétérogène

Contrairement au modèle explicatif de la théorie néo-classique de la concurrence, la structure des marchés industriels s'est transformé en un schéma à deux étages. La concurrence des grandes entreprises nationales pour atteindre une dimension internationale a provoqué la création du marché mondial. Les firmes multinationales rivalisent pour la capture des parts de marché. Mais cette augmentation de la taille des plus grandes entreprises ne s'est pas accompagné de la disparition des plus petites. De même que les céréaliers de la Beauce ont su mettre en avant les producteurs des terres moins fertiles et profiter d'une rente de situation, de même les grandes entreprises internationales ont maintenu un certain nombre de petites entreprises. Cette survie a provoqué la relation de sous-traitance. Cette évolution est contraire aux postulats classiques du modèle libéral. Mais elle pourrait s'expliquer dans le cadre keynésien du multiplicateur d'investissements.

Dans un marché de concurrence pure et parfaite où les unités sont toutes de petite taille, non seulement la politique des hauts salaires (Fordisme) mais l'incitation à investir (Keynes) ont une faible probabilité de réussite. Il y a peu de chance que les éventuels hauts salaires versés par une mine de diamants soient dépensés, au comptoir de la mine, par les femmes des mineurs. Le mécanisme du multiplicateur d'investissements est une réalité quand l'économie ne ressemble pas aux hypothèses ultra-libérales. Il suppose que le marché ne soit pas homogène. Il implique une industrie structurée. Il fonctionne avec de grandes entreprises motrices et des petites entreprises sous-traitantes. Il suppose enfin que les entreprises motrices fabriquent des produits très fortement demandés par les consommateurs locaux. Autrement dit, les produits et leurs utilités ne sont pas plus homogènes que les entreprises et leurs combinaisons productives. Les dirigeants des entreprises motrices versent de hauts salaires à leurs ouvriers, employés et cadres. Ils les voient revenir, souvent multipliés par le crédit à la consommation, sous la forme d'un pouvoir d'achat pour leurs produits. Dans cette situation, exceptionnelle, non généralisable, le rendement escompté des investissements des entreprises motrices est bien supérieur au taux de l'intérêt.

On explique alors la croissance des Trente Glorieuses par une structure hétérogène des marchés. La situation de l'emploi et la détermination des salaires nominaux est de plus en plus contraire aux postulats classiques. La concurrence n'est pas homogène. Les secteurs d'activités ne sont pas des marchés indépendants. Le pouvoir d'achat des salaires circule prioritairement vers les produits des entreprises leaders. Il revient vers les entreprises ordinaires dans la mesure où les entreprises motrices investissent leurs profits extra. Les profits ne sont pas égaux entre les secteurs et les capitaux ne quittent pas facilement un secteur pour se diriger vers un autre, plus profitable. Cette régulation n'est pas prévue par le modèle classique de l'offre et de la demande qui voit dans la concurrence la main invisible guidant chacun vers l'optimum social. Au contraire, ce sont les différences et les irréversibilités qui expliquent les mécanismes réels. Une théorie construite sur le principe de l'équilibre est mal adaptée pour expliquer la logique du chaos actuel.


* 2. La sous-traitance

Peu à peu, s'est instauré une nouvelle forme de division du travail: la relation de donneur-d'ordre à sous-traitant. Tandis que la division technique du travail désigne la spécialisation des compétences et des taches au sein de ce "travailleur collectif" qu'est l'entreprise, la division sociale du travail traduit la spécialisation des entreprises sur le marché. Cette organisation du travail au-delà des frontières de l'entreprise est une réalité qui contredit à la fois l'imaginaire des théories économiques et la symbolique de l'entreprise auto-suffisante.

Pendant de nombreuses années, la relation de sous-traitance a été régie par un comportement du donneur d'ordre qui satisfaisait contradictoirement l'imaginaire économique et la symbolique grégaire de l'entreprise. C'était l'époque de la technostructure dominante. Le développement des produits nouveaux suivait la filière inversée. La relation du donneur d'ordre au sous-traitant était la relation marchande d'un client à un fournisseur. L'essentiel du débat portait sur la valeur d'échange ou le prix. Il s'agissait, pour l'acheteur, d'obtenir le meilleur prix, c'est-à-dire le plus bas. En cela, le donneur-d'ordre se comportait comme un homo economicus rationnel. La situation ne correspondait pas aux hypothèses de la théorie, mais les acteurs se comportaient comme la théorie disait qu'ils devaient se conduire.

Pourtant l'acheteur s'adressait à un concurrent professionnel. Le bureau des méthodes qui sous-traitait la fabrication voire la conception d'un moule à un professionnel extérieur avait conscience d'externaliser le travail d'un ancien atelier de son entreprise. Parfois, c'était son ancien travail qu'il confiait à l'extérieur. D'où une relation beaucoup plus technique, basée sur la valeur d'usage du produit concerné. Mais aussi, un rapport très ambigu dû à la culpabilité de celui qui confie un travail " bien de chez nous " à un " estranger du dehors ". Pour se déculpabiliser et justifier son rôle, il s'efforçait d'obtenir le meilleur prix par une mise en compétition plus systématique que rationnelle. Cette relation complexe se traduisait par une perte du savoir-faire chez le donneur d'ordres et des conditions économiques très difficiles pour le sous-traitant. La lutte pour la survie fut intense chez les sous-traitants. Ceux qui ont survécu ont réalisé de grands investissements, techniques et humains, en qualité et en réactivité. Cette relation a changé quand le métier a été définitivement perdu chez le donneur d'ordre et considérablement amélioré chez le sous-traitant. C'est alors qu'apparaît l'entreprise étendue.


* 3. L'entreprise étendue

L'entreprise étendue désigne un mode de gestion de l'entreprise dans lequel le client et le fournisseur ne sont plus perçus comme des étrangers mais comme des partenaires. Cela suppose que la relation marchande dans laquelle ce qui est gagné par l'un (prix de vente élevé) est perdu par l'autre (prix d'achat élevé) soit complétée par une conscience très forte de la complémentarité technologique et cognitive. C'est la réduction des délais de conception (time to market) qui a provoqué ou accentué cette prise de conscience. Les lourds investissements consentis par les Bureaux d'Etudes dans les logiciels de Conception Assistée par Ordinateur ont accentué le phénomène. Une entreprise comme Aérospatiale a vite compris qu'il était impossible de réduire les délais de développement des produits si les logiciels de CAO utilisés par des sous-traitants temporaires n'étaient pas compatibles avec ceux du donneur d'ordre. Le remède a consisté à passer des accords de partenariat. Le donneur-d'ordres aide les sous-traitants sélectionnés dans l'achat des matériels et la maîtrise des logiciels. L'investissement est rentable pour les deux parties moyennant la garantie d'une charge de travail suffisante et prolongée. Cet accord financier s'est vite doublé de contacts méthodologiques. Car l'usage du même logiciel ne garantit pas la compréhension rapide de la construction des modèles géométriques. La prise en compte des contraintes méthodologiques des bases de composants mécaniques accentue encore le besoin de normalisation. Client et fournisseur réunis, c'est l'entreprise étendue qui se tourne vers les producteurs des logiciels de CAO pour leur demander des améliorations particulières définies en commun. Ainsi commence-t-on à concevoir le produit et l'usage.

Une nouvelle étape est franchie quand le développement de la conception simultanée pousse à une réorganisation de la division du travail au sein même de l'entreprise. Le dialogue avec l'extérieur requiert un décloisonnement interne. L'activité de conception est considérée comme le parcours d'un graphe d'exploration des possibles. Et c'est ainsi que Renault construit un Technocentre à Saint-Quentin-en-Yvelines de manière à ce que les spécialistes du client connaissent la réponse des spécialistes du fournisseur dans la demi-journée qui suit la question du concepteur. Même si, dans ce cas, plusieurs milliers de personnes sont réunies sur le même site, la pertinence et la garantie des réponses des spécialistes provient de leur contact permanent, mais à distance, avec leur entreprise d'appartenance. D'où la complémentarité du travail de proximité entre partenaires d'entreprises différentes et l'inéluctabilité du télétravail au sein de la même entreprise.

L'entreprise étendue, souvent basée sur des réseaux internes de lignes spécialisées, à haut débit et fort coûteuses, n'était pas dans les possibilités financières et technologiques de n'importe quelle entreprise. Il fallait ajouter le développement de logiciels spécifiques. Or c'est dans le même temps que les grandes entreprises ont commencé à ressentir les effets de la crise.


* Conclusion provisoire

Le développement des relations de sous-traitance avait atteint un seuil de maturité. Le partenariat commençait à rentrer dans les moeurs quand un ensemble de contraintes ont poussé les entreprises à l'externalisation de leurs activités soudainement jugées non stratégiques. En conséquence, les entreprises s'organisent autour d'un noyau restreint. Cette réduction des effectifs compte parmi les causes du chômage. Non pas que la productivité soit trop forte. Mais parce que les entreprises ne réussissent plus à maintenir le rythme de leur course à la productivité.

Alors, pourquoi l'externalisation?. Telle est la question à laquelle répondra l'article suivant.

Hubert Houdoy

Créé le 18 Mai 1997

Modifié le 23 Mars 1998


* Suite

Pourquoi l'externalisation?


* Adresses citées en exemples

http://www.aftt.net

infos@aftt.net

http://www.mygale.org/09/neuneu/

University College London

http://event.ucli.ucl.ac.uk

Technology Creating Jobs!

Elizabeth Royston, E.Royston@ucl.ac.uk

http://WWW.inforoutes-ardeche.fr

http://calvaweb.calvacom.fr/g-fedoce/

http://www.telecom.gouv.fr/francais/activ/techno/rapportpml00.htm

Publication de votre CV sur Internet.

http://www.reseau.org/emploi

ree@bigfoot.com

http://www.vercors-connect.gre.fr


* Définitions

Les termes en gras sont définis dans le glossaire alphabétique du Réseau d'Activités à Distance.


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Mise à jour: 16/07/2003