illustration

Réseau d'Activités à Distance

rad2000.free.fr

Sommaire



Vous lisez

http://rad2000.free.fr/chomclas.htm


Théorie classique du chômage




La théorie classique du chômage est inséparable du modèle de l’Équilibre Classique.


* Plan


1. Les prétentions du modèle

2. Les conditions du modèle

3. Le chômage classique





1. Les prétentions du modèle


La théorie de l’équilibre classique, encore très littéraire dans les textes de ses fondateurs (Adam Smith , Thomas Robert Malthus, David Ricardo, Jean-Baptiste Say), a été fortement mathématisée par les successeurs. Cette modélisation donne une plus grande élégance aux démonstrations. Mais cette formalisation comporte un risque. Elle pourrait dresser la liste des hypothèses implicites de la théorie. Elle contribuerait alors à montrer la virtualité du modèle. Ce qui correspondrait à l’ intention politique des classiques.


Mais la formalisation peut ne pas s’accompagner de ces précautions. Elle peut provoquer une confusion entre les propriétés formelles du modèle mathématique et celles de la réalité. On entre alors dans une mystification idéologique. Les auteurs disent rarement que le modèle, comme un principe d’organisation est tourné vers l’avenir, comme un projet. Les auteurs disent rarement que le modèle, comme un principe d’intelligibilité est tourné vers la construction d’un nouveau modèle d’intelligibilité . Les modèles et leurs auteurs prétendent souvent refléter la réalité du moment. Beaucoup de discours économiques jonglent hardiment avec ces deux points de vue (projet, reflet). Au moins serait-il bien de les faire alterner sciemment. C’est le rôle que l’on pourrait assigner à une Théorie de la Valeur , distincte d’une Théorie des Prix (Keynes).


Considérons les courbes continues et dérivables représentant des fonctions de production pour l’entreprise et des niveaux de satisfaction pour le consommateur. Leur élégance a un intérêt pédagogique évident. Mais nous risquons de prendre la forme et la position relative des courbes pour une description fidèle et exhaustive du réel. Quand la formalisation est tournée vers la simplicité, elle ne peut prétendre “reproduire” la réalité. Il n’y a pas une telle continuité ni une telle dérivabilité dans la fractalité de la réalité quotidienne des entreprises et des consommateurs.


D’une certaine manière, les auteurs classiques faisaient le pari de l’ harmonisation des intérêts . Les intérêts individuels pouvaient trouver à se concilier sans intervention autoritaire. Ils refusaient d’obéir à des règles, prétendument éternelles, découlant d’une scolastique moyenâgeuse. Ils voulaient prendre en main leur destin selon leur libre arbitre. Ce pari, plus que jamais, reste à gagner, après un siècle de totalitarismes. Cela ne veut pas dire qu’ils voyaient, dans l’égoïsme le plus étroit et le plus aveugle, la main invisible guidant le plus grand nombre vers la richesse.


Le modèle d’équilibre doit être apprécié pour:


Il a montré sa richesse par les développements mathématiques qui ont suivi.


La croissance économique constatée dépasse probablement leurs espoirs les plus secrets.


Les étudiants de première année apprennent les mécanismes de l’offre et de la demande. Ils découvrent successivement les marchés des biens, des services, du travail et des capitaux. Ils assimilent ainsi les multiples interdépendances qui font la complexité de la vie économique, sociale et politique. Cette simplification, optimisée pour l’apprentissage, n’est pas un reflet de la réalité. En attendant mieux, elle peut être considérée comme une profitable propédeutique.


Les premiers auteurs classiques voulaient construire un autre système économique. Ils ont réussi. Mais la valeur épistémologique de leur discours est bien émoussée. Les succès exploratoire, prophétique et pédagogique ne peuvent empêcher une grave obsolescence de leur représentation. Pour la production de connaissances nouvelles, le modèle de l’équilibre a épuisé sa vertu. Dans les sciences physiques celui-ci n’a cessé d’être remis en cause. Le scandale a débuté avec la découverte du problème des trois corps par Henri Poincaré. Les fonctions continues et non dérivables (Peano) ont retourné le fer dans la plaie des scientistes. Actuellement, les théories du chaos, les fractales et les théories non linéaires ont renouvelé le paradigme scientifique.


Construit pour permettre une réflexion en chambre, le modèle classique ne présente guère de ressources pour les praticiens. Ni pour la survie du producteur, ni pour la satisfaction du consommateur. Pour des raisons polémiques, les économistes néo-classiques ont prétendu éliminer la théorie de la valeur. Pour des raisons de généralité, ils ont escamoté la valeur d’usage. Ils ont présenté les prix comme des sources nécessaires et suffisantes d’information . C’était passer du projet d’avenir à la mystification sur le présent. Il semble pourtant que le système économique manque sérieusement de boussole. Curieusement, les entreprises réinventent l’Analyse de la Valeur et le Dialogue Technique.





2. Les conditions du modèle


Les critiques formulées par les marxistes, les keynésiens ou les néo-ricardiens ont permis de dresser un inventaire des conditions simplificatrices du modèle pédagogique.


Le modèle Walraso-Parétien est un modèle de concurrence pure et parfaite . Il suppose:


Chaque offreur est une goutte d’eau dans l’océan de l’offre. Chaque demandeur est une goutte d’eau dans l’océan de la demande.


- l’homogénéité du produit

Même fabriqués dans des conditions différentes de coût, les produits sont identiques.


- la mobilité parfaite des capitaux

Une totale liberté / fluidité permet d’entrer ou de sortir instantanément du marché d’un produit.


- la transparence parfaite des marchés

Nul n’est sensé ignorer les prix, les coûts, les quantités, les techniques et les besoins de tous.


Moyennant ces conditions, il est possible d’analyser l’équilibre de l’entreprise ou celui du marché aussi bien à court terme qu’à long terme. On peut alors montrer que l’entrepreneur maximise son profit en choisissant de produire la quantité pour laquelle le coût marginal (coût de la dernière unité produite) est égal à la recette moyenne, soit le prix unitaire constaté par le marché. La maximisation du profit est devenu l’indicateur de la marche vers l’équilibre général. Pour l’ harmonisation des intérêts , le démon de Maxwell est au service de la main invisible .


Bien sur, les économistes n’en sont pas resté là. Chaque hypothèse a donné naissance à de nouveaux modèles de concurrence, plus sophistiqués: monopole, concurrence monopolistique, monopsone, oligopole, duopole, etc. Puis la Théorie des Jeux a multiplié les situations combinant une dose de coopération et une dose de compétition. En tout cas, la réalité décrite par ces théories économiques se limite à l’ économie de marché . Par définition de l’économie et par construction du modèle, l’économie de marché ne concerne que la partie de la vie sociale qui réussit à s’insérer dans les échanges marchands.


En période d’expansion, le marché intègre de plus en plus de monde. Nous parlerons d’ inclusion.


En période de récession, le marché exclut de plus en plus d’ entreprises, de ménages voire d’États. Nous parlerons d’ exclusion.


Il nous faut donc une théorie de l’insertion de l’économie capitaliste dans l’économie marchande. Il nous faut aussi une théorie et une pratique (R.A.D.) de l’insertion de l’économie marchande dans l’économie non-marchande. Cette économie solidaire est parfois nommée, à la suite de Mauss, l’économie de don.


Selon les écoles, cette inclusion exigera (Marx, Keynes) l’aide de l’État (économie publique) ou la refusera (ultra-libéraux). Reste à savoir, problème pratique d’aujourd’hui, si l’État est le mieux placé pour remettre dans le circuit social tous les exclus du marché ?





3. Le chômage classique


Par construction du modèle classique, tous les prix sont déterminés par le marché. Ils assurent l’équilibre de l’offre et de la demande. Ils traduisent l’ensemble des anticipations, des offres et des demandes de tous les acteurs des marchés. Pour Walras, tous les prix de tous les marchés sont les solutions instantanées d’un vaste système d’équations simultanées. Ce système décrit la structure des offres et des demandes.


Il en est de l’imaginaire marché du travail comme de tous les autres marchés (biens, services, facteurs de production ou monnaie). L’offre d’emploi des entreprises fait face à la demande d’emploi des candidats à l’embauche. Le prix du travail en résulte. Il s’agit du taux de salaire. Il détermine la quantité de monnaie qui sera échangée contre une quantité unitaire de travail. C’est ce que l’on appelle le salaire nominal . Il correspond à la fiche de paye. Il ne se confond pas avec le salaire réel. Entre les deux se trouve le marché de la monnaie. Le salaire réel correspond à la quantité de biens et services que l’on peut acheter avec le salaire nominal. En cas de hausse des prix (inflation) il arrive que les salariés perdent d’un coté (baisse du salaire réel) ce qu’ils ont gagné de l’autre (hausse du salaire nominal). Sur le marché de la monnaie cela se traduit par une baisse du pouvoir d’achat de la monnaie . En effet, la théorie quantitative de la monnaie (David Ricardo) montre que si la quantité de monnaie en circulation augmente, toutes choses égales par ailleurs, le prix des marchandises (biens ou services) ne fait qu’augmenter en proportion.


L’équilibre partiel du marché du travail ne dépend que de l’offre et de la demande de travail. Le salaire dépend de l’offre et de la demande momentanées de travail. Le salaire n’est pas défini par des règlements corporatifs. Il fluctue en permanence. Cela correspond à la pratique actuelle de certaines entreprises qui modulent le salaire en fonction de l’activité mensuelle. Pour la théorie classique, la flexibilité du salaire assure l’équilibre du marché du travail . Du point de vue du seul marché du travail, un demandeur d’emploi reste au chômage s’il demande un salaire qui dépasse le produit marginal de son travail pour les offreurs d’emploi. Le chômage individuel provient de la demande d’un salaire nominal (exprimé en monnaie) trop élevé. Il y aura plein-emploi si les candidats savent demander le bon niveau de salaire.


Mais l’équilibre du marché du travail dépend aussi de l’équilibre sur tous les autres marchés. Nous avons vu que les marchés des biens et services jouaient un rôle central. Encore que cette formule n’ait pas beaucoup de sens dans un système d’ interdépendances (vertu épistémologique). Considérons-la plutôt comme une manière de dérouler notre raisonnement (vertu pédagogique).


Sur les marchés des biens et services, la flexibilité des prix assure l’équilibre de l’offre et de la demande. A l’équilibre, les offreurs réalisent un profit par la vente de leurs marchandises. En fonction des profits réalisés (disponibilités monétaires) et anticipés (espérance de gain), les entrepreneurs vont investir dans des matières premières et des machines. Ils accroissent la demande sur ces marchés. A l’équilibre, il y a pleine utilisation des capacités de production. Les entrepreneurs vont aussi embaucher sur le marché du travail. A l’équilibre, il y a plein emploi des candidats qui demandent le bon niveau de salaire.


Dans le modèle classique, le chômage ne peut correspondre qu’à un déséquilibre provisoire. En cas de déséquilibre, les ajustements sur les différents marchés provoqueront un retour à l’équilibre. Le salaire d’équilibre est celui qui correspond à la productivité marginale du travail. Supposons donc que le salaire soit provisoirement au-dessus de son niveau d’équilibre. Les entrepreneurs vont réduire leur embauche et réviser à la baisse leurs anticipations de production. Un chômage va donc se manifester. Les chômeurs qui désirent travailler à tout prix vont accepter un salaire réel plus bas que le niveau précédent. Le chômage se résorbe par la baisse des salaires. L’économie de marché se dirige de nouveau vers le plein-emploi, la pleine utilisation des capacités de production et l’équilibre général des marchés. Dans le modèle classique, le chômage ne peut provenir que d’un salaire réel trop élevé.


Selon le modèle classique, l’État ne peut remédier à une situation de chômage. Toute politique de l’emploi est vouée à l’échec. Toute hausse des dépenses publiques en faveur de l’emploi est prélevée (via l’impôt) sur les revenus disponibles. La demande des entreprises et des ménages diminue dans la proportion même où les dépenses de l’État augmentent. La consommation publique remplace la consommation privée sans augmenter l’offre d’emploi. Seule la baisse du salaire réel (moindre consommation) peut résorber le chômage et rétablir l’ensemble des équilibres. Ce point de vue sera critiqué par la Théorie Keynésienne du Chômage.





* Conclusion


Nous développerons, bien sur, les autres théories économiques du chômage, à commencer par la Théorie Générale de Keynes. Elles permettent de découvrir (vertu pédagogique) de nouveaux aspects de la réalité sociale. Contrairement au modèle classique de concurrence pure et parfaite , basé sur une flexibilité de tous les prix, elles insistent chacune sur des causes de rigidité.


D’une certaine manière, en prétendant critiquer le modèle classique, elles apportent de l’eau à son moulin. Les crises et le chômage sont dus à un manque de flexibilité des prix ou d’adaptabilité des agents. D’autant qu’elles ne sortent pas des présupposés de l’équilibre et qu’avec une mathématisation simpliste, une faible résolution mathématique , elles accentuent l’ économisme sous-jacent.


Mais nous n’oublierons pas que, par définition, les théories économiques concernées ne peuvent épuiser les questions qu’elles soulèvent. Pour cette raison, pas plus que dans le texte présent, nous ne sacrifierons à la formulation mathématique (voir notre bibliographie). Ce ne sont pas les mathématiques qui sont en cause, mais les hypothèses implicites qu’elles véhiculent. Pour rendre les modèles mathématisables, il faut leur donner des propriétés que la réalité concernée n’a pas forcément. Les mathématiques du chaos seraient plus adaptées. Mais il faudrait renoncer à l’équilibre et à la généralisation.


Nous insisterons sur la cohérence interne du discours (sémantique). Surtout, nous tenterons de montrer comment chaque micro-monde dont parle un modèle économique n’est qu’une partie de la réalité écologique ou sociale qui nous concerne.


Les théories du marché sont de belles constructions pédagogiques. Rendons-leur cet hommage. Mais si nous voulons explorer les voies pour sortir durablement du chômage, nous devons les interroger sur la manière dont elles prennent en compte l' emboîtement de la sphère économique dans la vie sociale (vertu épistémologique et vertu pratique).


Il nous importe de comprendre à quelles conditions (percolation des émotions , percolation des revenus ) le développement de l’économie de marché peut entraîner le développement durable des activités humaines. Mais pour cela, il ne faut pas se réduire à une analyse de la seule économie de marché. Il faut étudier tout le cadre politique, social et culturel dans lequel elle se développe.





* Auteur


Hubert Houdoy

Créé le 22 Mars 1999




* Bibliographie Économique


Théories Économiques





* Compléments


A la recherche des Déterminations Économiques de la Valeur

Statut de la valeur et de la plus-value dans le cadre d’une articulation entre économie et psychanalyse.

Causes du chômage

Le Dialogue Technique


Division du Travail

MAUSS. Économie de don

Projet de recherche


Théorie Keynésienne du Chômage

Critiques à Keynes


Production et Appropriation

Inclusion et Exclusion


Flexibilité, Inflation et Chômage

Mode de Vie et Chômage


Syndicats et Chômage

Vers la fin du travail?





* Définitions


Les termes en gras sont définis dans le glossaire alphabétique du R.A.D..









* Retours







* Pour votre prochaine visite


Quoi de Neuf sur le R.A.D. ?





Reproduction interdite
Association R.A.D. - Chez M.Houdoy - 18, rue Raoul Follereau - 42600 Montbrison - FRANCE.
* Fax: 04 77 96 03 09
Mise à jour: 16/07/2003