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Productivité
Le “paradoxe de la
productivité”. “La croissance de la
productivité au niveau agrégé a été, dans
les pays de l’OCDE, plus faible au cours des deux dernières
décennies que durant les années 60 et le début des
années 70.” (Ph. Séguin)
Les années 60
Les
années 60 marquent la fin de la décolonisation
et l’abandon d’un mode de développement
extensif . Le pays se concentre sur la métropole et se lance
dans une croissance intensive. Les gains de productivité se concentrent
dans la production industrielle.
On passe d'un accroissement de
la production pour satisfaire des besoins évidents à un
accroissement de la production pour réduire les coûts et couler
le concurrent. La mécanisation puis l’automatisation de la
transformation matérielle provoquent une baisse des coûts et
permettent de maîtriser la production de masse.
Tandis que
celui de la domination politique se maintient dans l'Orient
soviétique, le discours de la séduction
marchande se renforce en Occident. La grande entreprise adopte une
organisation caractérisée par la filière
inversée . Le consommateur achète toute innovation
conçue par la technostructure. Le contact avec le
consommateur et ses besoins concrets est perdu. Dès la fin des
années 60 le secteur tertiaire relationnel , dont
l’enseignement, semble laissé sur place par la marche
forcée du monde industriel. Les événements de Mai 68
manifestent bruyamment le constat de ce décalage.
Les années 70
Les
années 70 sont marquées par les chocs
pétroliers de 73 et de 79. L’augmentation de la facture pétrolière provoque, en Europe
et au Japon, une chasse au gaspillage énergétique. Le
système productif connaît une nouvelle vague de
mécanisation et d’automatisation pour réduire la
consommation de matière première et
d’énergie.
Pendant ce temps, les
pétrodollars et l’abandon de la convertibilité du dollar
en or (Nixon 1971) provoquent le développement des capitaux flottants,
sans contrepartie matérielle. Un écart se creuse entre le monde
des techniciens et celui des financiers de
l'entreprise. Les premiers raisonnent en terme de productivité des
équipements, les seconds en termes de rentabilité des capitaux
investis, aussi bien à la Bourse que dans les usines. On ne sait plus
très bien où se mesure ni ce que mesure la productivité.
Les années 80
Pendant les
années 80, la redistribution de la rente
pétrolière connait de nombreux avatars.
L’indiscipline de l’OPEP se retourne contre elle.
L’autonomie des capitaux tend à dissocier la
rentabilité financière sur les marchés de
l’efficacité matérielle dans les usines. La manipulation
des taux d’intérêts remplace les
fondamentaux de l'économie (termes de l'échange
, balance des paiements, équilibres budgétaires, niveaux des
prix).
Faute de guide objectif, les capitaux
s’investissent en fonction des opinions. Elles se créent dans le
microcosme boursier, fertile en rumeurs mimétiques. Les chocs boursiers
n’ont plus de cause matérielle évidente. La
productivité devient un fait d’opinion, une
représentation sociale . Elle est toujours
invoquée, de moins en moins définie, très rarement
mesurée.
Le développement de la bureautique, par
multiplication des micro-ordinateurs, est assimilé à une hausse
de productivité. Cette hausse est pourtant démentie par toutes
les mesures périodiques. Il peut y avoir un long processus de
modernisation sans hausse de la productivité. De nouvelles
possibilités existent, principalement pour la conception et la
simulation. Elles se payent d'un coût en matériel (stations de
travail), en logiciel (CAO, IAO), en formation (stages), en changement de
représentations (du dessin 2D au modèle 3D) et en durée
d'assimilation (reproduction de conceptions anciennes, pour
entraînement). La productivité n’est pas aussi forte
qu’on le suppose en lui attribuant la cause du chômage. Mais le
mot est devenu un fétiche incontournable.
Les années 90
Pendant les
années 90, le divorce entre la production matérielle et le
mouvement autonome des capitaux se développe. Les bulles
financières se gonflent avant d'exploser (crise asiatique en
1998). La chute de l'emploi est saluée par la Bourse.
La
technostructure voit disparaître les conditions de sa floraison. La
direction des entreprises se fait plus difficile. Prise sous les fourches
caudines d'actionnaires aussi exigeants que les capitaux sont flottants, la
direction tente de reprendre en main le pouvoir confisqué par la
technostructure.
Les niveaux hiérarchiques successifs,
politique, stratégique et tactique, ne vivent plus dans le même
monde. Ils ne parlent plus le même langage.
Les projets techniquement les plus solides sont remis en cause par des
facteurs purement financiers.
Les
techniciens et les ingénieurs connaissent le trouble des
enseignants d’hier. Mais la liberté de parole n'est plus ce
qu'elle était dans les années 60.
Illusion ou fantasme ?
Il est bon
que l’OCDE réfute la croyance erronée en une hausse de la
productivité. On avait tendance à mesurer la productivité
par l’augmentation du chômage.
Par
définition, une hausse globale de la productivité
déplacerait les emplois sans produire de chômage durable.
En fait, le chômage
résulte d’une trop faible productivité globale. Mais
aucune mesure n'est possible de ce phénomène complexe. Le
secteur tertiaire, dont le tertiaire relationnel, n’a pas une
productivité suffisante pour abaisser le coût de notre mode de vie.
Poussés par le
mouvement des capitaux, les emplois se
déplacent vers les pays à faibles salaires. Les marchandises
reviennent vers les pays à fort niveau de vie. Ce mouvement met en
évidence une productivité des pays riches inférieure
à celle qu'ils s'attribuaient volontiers hier.
Le prix
Nobel d'Economie, Wassily Léontieff, attribuait au travailleur
américain une productivité très supérieure
à celle de tous les autres, pour nier les phénomènes
liés à l'usage du dollar comme monnaie internationale. S'il
avait eu raison et s'il avait encore raison, les délocalisations dans
les pays à bas salaires seraient totalement inexpliquables.
Comment définir la productivité ?
Il faut donc admettre que le taux de notre productivité
n'est pas celui que nous postulions dans nos modèles collectifs.
En contrepartie, nous y gagnions une intelligibilité de
la situation. Nous pouvons en dégager une ligne de comportement.
Un chômage bien compris est un
chômage à moitié résolu.
Plus
fondamentalement:
1. Il est fort probable que la
productivité ne soit pas ce que nous pensons.
2. Ce mot
passe-partout pourrait bien n'être qu'un très vieux
fantasme.
3. La productivité (lisez:
rentabilité) d'un projet est fonction des
rejets qui le délimitent. C'est donc une question de
délimitation des organisations réelles dans une
organisation potentielle englobante. Il faut toujours situer
le marché dans la société .
4. Nous avons déjà vu
que le multiplicateur d'investissement ne pouvait fonctionner
sans un mécanisme, plus profond, de percolation. Car
le profit ne peut être à la fois le revenu de
l'entreprise et l'indice de la productivité collective. Nos enveloppes sociales ne sont pas aussi
emboîtées que nous le pensons.
5. La reproduction
du système économique suppose une percolation des
revenus . Tel est le problème du bouclage du système des prix .
6. La production de la société
implique une percolation des émotions . Ce qui est
très différent. D'autant que, malgré le postulat du
holisme, il n'existe pas de loi de reproduction
automatique de la société .
Et maintenant ?
Il n'est pas
possible de construire sur une notion aussi insaisissable.
Produire plus en moins de temps. Cela semble simple. Mais comment additionner
les productions ? Et comment ajouter du temps au temps.
Le cycle de
Robinson Crusoé recherche ce qui se cache sous ce
terme trompeur de productivité.
Robinson Crusoé
L’île de Robinson
Une lecture familiale d’Oedipe
Comment le verbe se fait chair
Auteur
Créé le 28 Octobre 1996
Modifié le 25 Novembre 1999
Compléments
Concevoir le Produit et l'Usage
Graphe d'Exploration des Possibles
Définitions
Les termes
en gras sont définis dans le glossaire
alphabétique du Réseau d'Activités à Distance.
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