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Oedipe, Fatalité ou Parcours?


Ce document est la suite de Trois niveaux d'Organisation
* Plan

Introduction

1. Le Mythe Grec

2. Une lecture ethnique d'Oedipe

3. Échange de femmes entre hommes

Conclusion


* Introduction

Nous venons d'étudier le rôle de médiation que joue l'organisation Crusoé entre l'individu Robinson et l'île du Désespoir, entre l'individu et la nature. La situation particulière du naufragé solitaire, loin de l'ethnie, facilite la dissolution des institutions sociologiques. Mais elle n'assure pas automatiquement leur remplacement par des instances psychiques. Robinson aurait pu sombrer dans la folie et ne pas réussir cette transformation fondamentale. Ce que nous appelons l'organisation Crusoé lui a servi de transition. L'organisation Crusoé est à la fois une institution comme toute entreprise et une instance comme le serait le Nom-du-Père. Elle permet un dialogue intérieur. Pour Robinson, il n'y a jamais de rupture entre le psychologique et l'économique. C'est ce qui fait la richesse de ce mythe littéraire et "scientifique".

Nous étudierons les transformations que cette organisation autorise dans les relations du sujet de désir avec dame nature. Pour le naufragé, la nature proche fut tout autant l'île du Désespoir, l'île de Robinson et le domaine du Gouverneur. Elle fut sa matrice, sa protectrice, sa nourrice et sa partenaire. Pendant longtemps il a pu penser qu'elle serait son dernier séjour. Mais, sur l'île ou ailleurs, la nature veillera son dernier sommeil. Il lui rendra ses emprunts de matière.

Nous comparerons ces transformations psychiques à celles qu'opère la dynamique oedipienne dans la constitution du sujet. Mais laissons au complexe d'Oedipe le temps de s'instaurer. Ce n'est certainement pas avec la rédaction d'Oedipe Roi par Sophocle qu'il se met en place. Il faudra attendre de nombreux siècles, et la transformation des relations des sujets et des objets dans les machines sociales. Par contre, la reconnaissance de la fractalité des relations psychologiques et sociologiques et le prise en compte de trois niveaux d'organisation facilite la comparaison d'Oedipe Roi avec les lectures qu'en fait la psychanalyse.


* 1. Le Mythe Grec

Hellénistes et psychanalystes ne sont pas d'accord sur Oedipe. Les uns parlent de fatalité. Les autres parlent de désirs sexuels infantiles. Se pourrait-il que tous aient simultanément raison? Mais pour des raisons différentes et sur des plans différenciés.

Rappelons d'abord les grandes lignes du mythe.

Oedipe est le fils de Laïos, roi de Thèbes, et de Jocaste son épouse. L'oracle de Delphes avait prédit à Laïos et Jocaste que s'ils avaient un fils, il tuerait son père et qu'il épouserait sa mère. C'est ainsi qu'à sa naissance, Oedipe fut abandonné par ses parents. Pour réduire ses faibles chances de survie, ils lui percèrent les pieds. Ceux-ci gonflèrent. D'où son nom d'Oidipous qui signifie "au pied gonflé".

Le serviteur chargé d'exposer l'enfant sur une colline n'eut pas la cruauté d'accomplir l'ordre royal. C'est ainsi qu'Oedipe fut sauvé. Recueilli par le roi Polybos, il est élevé princièrement à la cour de Corinthe, ville fondée par Sisyphe. Parvenu à l'âge adulte, Oedipe apprend qu'il est un enfant trouvé. Intrigué, il consulte l'oracle de Delphes. Celui-ci répète la terrible prédiction. Mais il ne lui dévoile pas sa filiation. Affolé, supposant que ses parents s'y trouvent, Oedipe décide de quitter Corinthe.

Sur la route, conduisant un char rapide, un étranger vindicatif lui cherche querelle et le frappe de son fouet. Ils se battent. Sans savoir qu'il s'agit de son père, Oedipe le tue, ainsi que ses gardes.

Parvenu aux portes de Thèbes, il rencontre le Sphinx. Ce monstre est une chimère, un être composé d'objets partiels. La tête et le buste d'une femme, des ailes d'aigle, surmontent la partie postérieure d'un lion. Le Sphinx avait coutume de poser une énigme aux voyageurs de passage. Il possédait sexuellement puis dévorait les malheureux qui ne trouvaient pas de réponse. Sous la question, en apparence insoluble: "Quel animal loquace a quatre pieds le matin, deux à midi et trois le soir?", Oedipe suppose une métaphore. Et c'est ainsi qu'il répond: "L'homme". Dépité de cette solution à l'énigme, le Sphinx tombe de son éminence et meurt.

Pour ce prodige, Oedipe est accueilli en libérateur. Créon, frère de Jocaste et dont le fils avait été violé et dévoré par la Sphynge, avait promis la couronne royale et la main de la reine Jocaste à qui chasserait la chimère. Le vainqueur du monstre est proclamé roi de Thèbes. En totale méconnaissance de son acte fatidique, Oedipe épouse sa mère. Leur mariage donne quatre enfants: Etéocle, Polynice, Antigone et Ismène.

Quelques années plus tard, une épidémie de stérilité s'abat sur la ville de Thèbes. Les rumeurs se répandent. On cherche une cause humaine: un crime est resté impuni. Consulté, l'oracle rappelle le meurtre du roi Laïos. Sûr de sa bonne foi, Oedipe promet de trouver et de châtier le coupable. Par le témoignage d'un valet survivant du combat entre Oedipe et Laïos, les souverains découvrent la vérité. De détresse, Jocaste se pend. Oedipe se crève les yeux de culpabilité. Chassé par ses fils, accompagné de sa fille Antigone, Oedipe part en exil.

Le destin

Le mythe grec relève du fatalisme. Il est centré sur un destin inéluctable, une vision de la réalité subie. La malédiction annoncée (le meurtre du père et les épousailles de la mère) est incontournable. Toute tentative pour l'éviter est inopérante. Car le mythe décrit une nécessité naturelle. Mais il la maquille. Il la cache dans des métaphores (inceste, meurtre du père). Cet habillage permet au discours de parler à plusieurs instances psychiques, de condenser, d'amalgamer plusieurs niveaux d'organisation.

Comme nous l'indique l'énigme du Sphinx, c'est sur l'homme que cette histoire nous renseigne. Mais, comme le montre la réponse d'Oedipe, c'est métaphoriquement qu'elle en parle.

Nous formulons l'hypothèse que le mythe concerne la relation générale de l'homme avec la nature. Nous appelons nature ce qui est déjà-là quand un homme ou une génération humaine apparaît. Toute vie individuelle se détache de ce déjà-là. Toute mort individuelle est un retour à ce toujours-là.

Et, c'est même de la lutte entre père et fils, à propos de la fertilité de la mère, qu'est née Aphrodite, déesse de l'amour passion. Superbe résultat d'une sombre histoire de castration à la faucille d'or.

Bien avant l'amour courtois, dame nature est connue de la mythologie grecque. Cette métaphore ne date pas d'aujourd'hui. Nouveaux-nés, nous sommes la chair de sa chair. Notre matière vient toujours de la sienne. Elle est notre matière première. Et, par la suite, chaque fois que nous produisons quelque chose, nous la retrouvons comme femme partenaire. Comme le disait William Petty, le travail est le père et la nature est la mère. Aussi est-il impossible de ne pas épouser, un jour ou l'autre, celle qui fut notre mère.

L'inceste naturel

En somme, c'est le travail productif qui mène à l'amour ou l'inverse. C'est pourquoi nous les considérons comme les deux pôles des activités. Comme l'affirme le mythe d'Oedipe, c'est notre destin. Il est inévitable de se trouver en situation de co-conception avec l'origine de notre existence. Cet inceste naturel est matériellement inévitable. Ou plutôt cette indifférence à l'inceste symbolique est nécessaire. Cet amour de l'homme, comme cette fertilité de la nature, sont nécessaires au travail productif:

Mais tout cela se passe dans un monde achronique et impersonnel. Loin de la théâtralité oedipienne, des névroses, des psychoses, du cabinet du psychanalyste. Loin de la technicité pragmatique de la réalité empirique. Le mythe décrit le monde de la réalité indépendante, avant sa connaissance, tant qu'elle fut vécue comme une fatalité, comme une réalité subie.

Le don du réel

Toute activité, productive ou non, laborieuse ou amoureuse, manifeste une dissymétrie fondamentale. Par rapport à l'être humain, la nature est déjà-là et toujours-là. C'est elle qui fait les apports matériels et énergétiques. Ce don naturel est transcendental.

Chaque activité, fut-elle aussi légère que la parole, se passe matériellement dans la nature. Aucune activité n'est possible sans la matière naturelle. Toute activité a un support, un lieu et un minimum de matière première. Notre vie est un don corporel de la nature. Accepter de vivre, c'est accepter de recevoir ce don: ses ressources et ses contraintes. Mais le seul contre-don correspondant implique notre mort: le retour à la terre mère. Accepter la perspective de mourir, c'est admettre la nécessité du contre-don, c'est accepter le don, c'est accepter qu'il y eut un don. Notre corps retournera inévitablement dans la nature. Pourtant, bien des pratiques symboliques, sociales ou religieuses, tentent de nous cacher cette fatalité. Le mythe d'Oedipe affirme cette nécessité. Mais il cache, métaphoriquement, son domaine de validité.

Au plus haut niveau d'organisation, celui de la nature ou de l'Univers, l'existence est un don initial. Transcendental, unique, il ne saurait être rendu. Ce don est la présence du réel. Il est ce fait ontologique qu'il y ait quelque chose plutôt que rien. Car toute existence particulière suppose ce déjà-là. Toute activité transforme ce déjà-là que nous nommons "nature", réalité concrète ou changeante. La nature est déjà-là pour chaque génération. Nous en venons. Nous en descendons. Nous sommes tous fils et filles de la nature. Nous semblons n'avoir qu'un géniteur, la nature, notre mère à tous. Et tous, fils ou filles, indépendamment de la différenciation sexuelle, en amont de cette différence, nous épousons nécessairement notre mère. Cette permanence, cette éternité, du réel abstrait rend toutes les générations humaines indistinctement incestueuses. Ce n'est pas le rapport au réel qui nous distingue. C'est la filiation qui instaure un temps sociologique.

Le désir primitif

Le désir, la pulsion de vie, la libido, avant même d'être sexués, portés par des personnes, sont déjà incestueux ou plutôt indifférents à l'inceste. Ça désire des flux et des coupures de flux. De pures intensités. C'est ce que disent Gilles Deleuze et Félix Guattari dans l'Anti-Oedipe. "Ce qui est désiré, c'est le flux germinal ou germinatif intense, où l'on chercherait en vain des personnes et même des fonctions discernables comme père, mère, fils, soeur, etc, puisque ces noms n'y désignent que des variations intensives sur le corps plein de la terre déterminé comme germen. On peut toujours appeler inceste, aussi bien qu'indifférence à l'inceste, ce régime d'un seul et même être ou flux variant en intensité d'après des disjonctions inclusives (p. 191)".

Nous sommes tous, indistinctement, Gaïa, Ouranos, Cronos, Rhéa et Zeus. L'inceste primitif du chaos primordial nous concerne aussi. Avant ou hors la différenciation des sexes. Avant ou hors la prohibition de l'inceste. Uneabsence de temps précède et accompagne la succession des générations. Une achronie du réel abstrait. Celle des structures sémiotiques profondes.

Il existe un niveau d'organisation, non-oedipien, dans lequel l'inceste n'existe pas. Là où il existe, l'inceste n'est pas physique, mais symbolique. Il concerne une relation d'adulte à enfant. De celui qui a l'autorité (logos, auctoritas) à celui qui ne parlera pas (infans). Car la possibilité de l'inceste suppose l'instauration de règles de filiation. A ce niveau primitif, des symboles asignifiants, des machines désirantes, les règles de la filiation ne sont pas instaurées. Elles ne peuvent être transgressées.

C'est justement la règle de la prohibition de l'inceste qui instaure la filiation, l'alliance et la possibilité de l'inceste. Ce mouvement est celui du mythe fondateur. Pour faire de l'inceste un crime, il faut déshonorer le coupable. Une forme de rétroactivité du droit. Il faut l'accuser d'un désir ignoble. Il faut l'accuser d'un autre désir que le sien.

Le désir primitif et microscopique ignore l'irréversibilité du temps. Il échappe à la filiation. C'est le discours qui produira la filiation et le temps sociologique. Pour l'inconscient, le syncrétisme primaire, l'adualisme initial, le fantasme des parents combinés, témoignent de cette achronie primordiale.

Le Sphinx

Qu'est le Sphinx, sinon la représentation du fantasme des parents combinés? Le sein et le pénis fusionnés. Il sort d'un monde, l'inconscient moléculaire, où la distinction des sexes n'est pas assimilée, car elle est institutionnelle, définie par des rôles, des normes de comportement. Où la question: <un seul sexe ou deux sexes?> n'a pas encore de sens, pour la même raison, malgré une indéniable différence morphologique. Le Sphinx appartient au monde du sexe non humain. Le monde naturel où les insectes participent à la reproduction des plantes. Où <le désir par la castration> est anachronique.

C'est un visage de femme qui s'adresse à Oedipe. C'est un buste de femme séductrice qui trouble les esprits des passants. C'est un aigle qui les emporte. C'est un mâle léonin qui abuse sexuellement de ses victimes. Est-ce un lion affamé ou une mère possessive qui dévore les voyageurs? Sont-ils terrorisés par la peur du lion? Sont-ils envoûtés par la beauté de la femme fatale? A ce niveau, la réponse est sans intérêt.

Le Sphinx est une métonymie, une condensation, un collage d'objets partiels. Son discours est incohérent. Les passants ne le comprennent pas. Il s'exprime par cris, par métaphores ou par énigmes. Au Petit Prince de Saint-Exupéry qui lui demande: "Pourquoi parles-tu toujours par énigmes?", le serpent des sables, au venin foudroyant, répond simplement: "Je les résous toutes !". Pulsion de vie et pulsion de mort combinées, symbole asignifiant d'une vie et d'une mort indistinctes, faute de sériation chronologique, le Sphinx mobilise tous les processus primaires d'un inconscient qui ne veut rien dire.


* 2. Une lecture ethnique d'Oedipe

Oedipe ne connait pas sa filiation. Non pas que sa filiation soit absente, achronique, comme pour Gaïa, Ouranos et Cronos. Mais parce que cette filiation, établie dans un monde de personnes et de dynasties rivales, fut masquée par un infanticide manqué et par une adoption partielle. Toute la méprise est là. Tantôt il y a et tantôt il n'y a pas de filiation, pour Oedipe.

Tuer un agresseur en état de légitime défense n'est pas monstrueux. Oedipe ne peut pas tuer son "père". Il ne le connait pas. Il ne connait pas le Nom-du-Père. Il ne porte même pas le nom de son père. Et c'est pourquoi il est Oidipous.

Épouser une reine sans roi, pour un prince élevé dans une cour royale, rien de plus normal. Les rôles politiques s'accordent parfaitement. Aucune présentation disant: "Mère, voici ton fils !". Aucun nom rappelant: "Ceci est ta mère". Aucune représentation signifiante pour rappeler la filiation et prohiber l'alliance.

L'horreur n'est pas dans les faits. Ni dans la chair. Car Oedipe et Jocaste se sont aimés. Quel mal à cela? L'horreur est pour le verbe. L'horreur est dans les mots qui désignent les faits. "Maudits mots" ! Les mots sont là pour susciter la culpabilité. Ils créent l'horreur de l'inceste là où régnait l'indifférence à l'inceste.

Filiation problématique

Alors pourquoi cacher son origine à un enfant? Pourquoi lui refuser le nom du père? Pour que ces chevilles gonflent d'orgueil, Oidi-pous, faute d'un modèle limité par la concrétude quotidienne? Pour que la fille épouse le fils? Pour que la fille ignore le père? Pour que le père oublie la fille? Pour que le père nie son désir pour la mère? Pour qu'Aurore se lève dans le brouillard d'une filiation incertaine et cachée? Répondez Monsieur Montand. Mais il ne s'agit que d'un accident interpersonnel. Ce que nous cherchons, ici, c'est la nécessité naturelle (indifférence à l'inceste) ou l'institution ethnique (prohibition de l'inceste).

Pourquoi les sociétés ne disent-elles pas la vérité sur la filiation? Ou plutôt, pourquoi plusieurs filiations contradictoires coexistent-elles? Quels sont leurs enjeux respectifs?

Les systèmes de la parenté créent une représentation particulière de la filiation. Cette représentation s'écarte de l'histoire naturelle. Celle par laquelle nous sommes tous des fils achroniques de la nature. Cette représentation ne correspond pas, non plus, à la filiation dans le couple. Celle par laquelle nous sommes fils chronologiques d'un père et d'une mère. Fils de sujets qui transmettent la vie pour échapper, tant soit peu, à leur mort.

Les systèmes de parenté forment une organisation, un niveau intermédiaire. Ils nous font échapper à la nature comme au couple. Ils nous inscrivent dans la culture d'une ethnie. Ils nous comptent dans des lignages. Ils nous nomment dans une lignée. Les systèmes de parenté enregistrent nos naissances dans une filiation ordinale. Par eux, nous sommes marqués. Nous sommes dénommés. Nous devenons "fils de...". Nous sommes les relais d'une transitivité. Les systèmes de parenté nous codent, nous enregistrent, nous immatriculent. Ils produisent, de toutes pièces, une culture ethnique. Ils tissent, fil à fil, un tissu social.

La filiation scissipare

Cette filiation est apparemment simple. Pour de nombreuses sociétés, parmi les plus anciennes, c'est le principe de la filiation linéaire. Quelle soit patrilinéaire ou matrilinéaire, la filiation unilinéaire construit et impose l'image trompeuse de cette lignée. La transitivité des "fils de..." amorce la production de droites infinies. Euclide n'est pas loin d'Oedipe.

Pourquoi ces sociétés se donnent-elles, malgré des formes différentes, une filiation linéaire qui ne respecte pas la dualité des parents biologiques? Pourquoi la filiation n'est-elle pas un graphe, une réseau, un entrelacs d'arbres généalogiques? Quel est l'enjeu de cette représentation linéaire? Pourquoi construire, contre l'évidence fractale, une linéarité?

Il semble que ce soit une dualité entre la nature et la culture qui soit ainsi produite et surtout affirmée. La catégorie sémiotique nature/culture s'enracine dans les plus anciens systèmes de la parenté.

Ces systèmes de filiation unilinéaire se trouvent dans des sociétés qui gardent la trace des premiers peuplements humains. Ils remontent aux époques lointaines où l'humanité était plus que marginale dans la nature. Des groupes nomades se répandaient sur Terre, au fur et à mesure de leur accroissement démographique. La nature était gigantesque, la culture humaine minuscule.

Nos ancêtres, par leurs mythes fondateurs, produisaient les premières représentations de chaque ethnie. Ils produisaient simultanément leurs langues naturelles et leurs systèmes de parenté. Les systèmes de parenté construisent la première écriture, en trois dimensions, celle qui trace les lignes sur les corps et à partir des corps. La mise en scène du mythe Dogon. Celle qui fonctionne par la présentation gestuelle et immédiate, la base de la référence et du référent: "Celle-ci est ta mère. Tu n'épouses pas!". "Celui-ci est ton oncle. La femme passe par lui!". L'écriture en actes. Le symbole asignifiant. Les flux qui passent et ceux qui coupent. La présentation, bien avant la représentation par un double. Avant le dédoublement du signe entre signifiant et du signifié.

Par elle-même, comme le signe, cette filiation est arbitraire. Ce qui importe, c'est que la filiation crée les lignes d'une chaîne. Que l'alliance crée les lignes d'une trame. Que les fils de la trame, déplacés par la navette, croisent les fils de la chaîne. Que la trame de l'alliance croise la chaîne de la filiation. Que les uns se déplacent. Que les autres restent. Et qu'ainsi se forme le premier tissu social. A chaque ethnie le soin d'inventer ses propres motifs.

La filiation est le lien de parenté qui unit l'enfant à ses parents. Elle attribue, aux uns et aux autres, des droits et des devoirs économiques. L'alliance est l'ensemble des procédures au terme desquelles un couple, en se constituant, lie les familles des deux conjoints. Filiation et alliance sont arbitraires, mais ensemble, elles forment système. Elles créent des relations de parenté.

Par l'échange des femmes qu'elle instaure, l'exogamie, la prohibition de l'inceste, crée un lieu commun, une surface d'inscription, entre les peuples nomades. Elle constitue des systèmes de filiations. Ils instaurent une succession des générations. Ils introduisent l'échange entre les groupes. Ils fixent les groupes sur leur territoire, par la même opération. Les relations de parenté sont un élément des relations d'échanges. Cela permet non seulement des échanges matrimoniaux, mais des échanges linguistiques, économiques, politiques. Cet échange réversible entre les humains masque l'échange avec la nature. Un principe de réciprocité règle ces échanges de femmes. Les dons appellent des contre-dons. Ils font la navette entre les groupes locaux (partialité) pour que l'ethnie se ferme sur elle-même (totalité), s'ouvre sur l'extérieur (échanges), fonctionne dans l'espace (alliance) et se prolonge dans le temps (filiation).

La prohibition de l'inceste est une machine sociale comme le sera le marché capitaliste beaucoup plus tardivement. Elle utilise les machines désirantes par un branchement particulier de leurs flux. Elle n'est pas sans analogie avec une machine technique: le métier à tisser. Son but est bien de produire le tissu social. Les femmes et les biens dotaux font la navette entre les fils de la chaîne des filiations. Ces flux d'objets de valeur assurent les alliances entre les groupes.

Filiation linéaire et alliance transversale créent une représentation sociale en acte, un premier théâtre. Elles masquent la filiation achronique avec la nature. La filiation du niveau supérieur. Elles masquent aussi la filiation désirante individuelle. Celle du couple parental. Les relations interindividuelles du niveau inférieur.

L'ethnie impose donc une troisième filiation. Elle crée la première organisation réelle. Une première forme de comptabilité d'entreprise. Car l'ethnie se constitue par un codage de ses objets partiels sur le corps plein de son territoire. La prohibition de l'inceste a essentiellement pour effet de permettre un codage des flux matériels ou énergétiques au sein de cette nature indifférenciée. A partir de ce chaos initial, elle établit un clivage entre ce qui sera nature et ce qui sera culture. La filiation naturelle étant refoulée, la filiation ethnique semble purement culturelle, spectaculaire.

La filiation scissipare ethnique, en produisant une chaîne de filiation et une trame d'alliance, construit un tissu social, un corps social virtuel, au dessus du corps plein de la nature. Ce tissu social est une surface d'inscription et un écran. Il masque les échanges avec la nature. Il impose la réciprocité des échanges, mais entre les hommes seuls. A partir d'un premier spectacle de présentation, ce tissu social permet de marquer les individus dans un système à deux dimensions (filiation, alliance). C'est l'invention d'une géométrie plane, pré-euclidienne. La chaîne de filiation, chronologie des générations humaines, constitue la première mémoire diachronique. La trame des alliances est une ouverture du groupe, vers un extérieur, dans la synchronie. Cette première dialectique de la diachronie et de la synchronie est comme une très lointaine anticipation du marché capitaliste. Cette surface d'inscription, virtuelle, sémiotique, est une plus lointaine anticipation de notre World Wide Web.

Quelle soit patrilinéaire ou matrilinéaire, la filiation unilinéaire fait que le mariage ne soit surtout pas une histoire de couple (érotisme). Il est une alliance productive et politique de groupes. Il y va de l'intérêt de ceux-ci. C'est ainsi que Créon donne Jocaste à Oedipe, comme Ménoecée l'avait transmise à Laïos. La filiation unilinéaire (comme celles qui en dérivent) a pour effet de produire des lignages dans lesquels s'inscrivent les corps des individus. Certains sont fixés localement par l'interdit. D'autres sont libres voire désignés pour l'échange. Ils sont des valeurs d'échange. Les femmes et les biens dotaux sont produits comme réserves de valeur. Ils circulent comme symboles d'alliance entre les hommes.

Une machine sociale se met en place. Elle consiste à brancher des machines désirantes selon des règles syntagmatiques, en puisant dans un inventaire paradigmatique. Les systèmes de parenté comptent parmi les premiers systèmes d'écriture. Bien avant l'écriture cunéiforme, les premières narrations sont celles de la généalogie et de l'alliance. La société se raconte à elle-même. Le plus souvent dans un spectacle. Un rituel social. La première tentation d'une totalité culturelle. Par le refoulement de la nature et des machines désirantes qui nous y rattachent irrémédiablement.

La filiation scissipare ethnique invente le temps irréversible des humains, le temps sociologique. Celui de la physique, qui ne se confond pas avec le premier, sera découvert beaucoup plus tard. Mais cette filiation ethnique refoule la filiation scissipare naturelle, celle de Gaïa, Ouranos et Cronos. La filiation ethnique cache la filiation achronique des forces naturelles, du désir, de l'inconscient et des structures sémiotiques profondes. Elle masque aussi la filiation désirante de l'interindividualité. Celle qui pourrait produire des sujets.

A dire vrai, c'est la prohibition de l'inceste qui introduit la double représentation d'une nature maternelle et d'un pouvoir magique masculin. C'est elle qui crée cette distance entre représentant et représenté. Elle instaure une différence sociale, de rôles, entre masculin et féminin. Elle crée une différence radicale, à la racine du phallus, entre la nature féminine et le pouvoir politique. C'est là que commence la domination des guerriers sur les populations. En réponse, s'élabore la séduction féminine. C'est de là que naissent les premières représentations du monde.

Les machines désirantes et leurs branchement aléatoires, asignifiants, ne connaissaient pas une telle différence codifiée. Elles donnaient, à plaisir, un Sphinx, un Titan, un Cyclope, des Hécatonchires ou des Gorgones. Mais aussi un Dédale, un fil d'Ariane pour y entrer, un homme ailé pour en sortir. Les machines désirantes soutiennent aussi bien un branchement homosexuel (Laïos-Chrysippos) qu'une copulation hétérosexuelle (Oedipe-Jocaste). La prohibition de l'inceste régule les flux des producteurs et des reproductrices entre les groupes d'hommes. Ce faisant, elle instaure un pouvoir masculin et le symbole d'une puissance non-naturelle. C'est pourquoi le complexe d'Oedipe marquera la fin du stade phallique.


* 3. Échange de femmes entre hommes

Avec la prohibition de l'inceste, une première écriture se met en place. La société s'écrit, se dessine, se met en scène sur son territoire. Quels que soient les systèmes de filiation (patrilinéaire ou matrilinéaire) et les principes de résidence (patrilocale ou matrilocale), pour chaque couple, l'un des conjoints bouge et l'autre reste sur place. Les systèmes de parenté définissent ceux qui restent dans le groupe et ceux qui circuleront d'un groupe à l'autre. Le principe est arbitraire. Chaque ethnie peut inventer le sien. Elles n'y manqueront pas. Il faudra un Lévi-Strauss pour se retrouver dans ces structures élémentaires de la parenté.

Le fixe n'est tel que par rapport au mobile. Et réciproquement. Chaîne ou trame. Phallus planté ou navette enfilée. Mais c'est ainsi que le groupe se territorialise, en même temps qu'il organise ses échanges. Le groupe humain installé n'est plus de la nature. Il s'érige sur la nature. La nature, la surface naturelle, est considérée comme territoire, surface de souveraineté territoriale imposée par les guerriers. A travers Jocaste, plusieurs rois (Créon = souverain) se refilent le pouvoir. Le groupe des hommes de guerre s'installe, marque le territoire, scarifie les visages, circoncit les prépuces, excise les clitoris, plante ses enseignes, érige ses habitations, édicte ses règles, contrôle les flux, domine les producteurs et possède la nature. Il faut marquer pour coder et coder pour contrôler.

Avec la prohibition de l'inceste, une première totalisation se déroule. Le groupe local enregistre ses objets partiels. La population compte ses organes: ses bras producteurs, ses bouches à nourrir, ses ventres reproducteurs, ses pénis inséminateurs. Tous sont nommés ou marqués. La première totalité comptable se constitue.

Avec la prohibition de l'inceste, la culture émerge. Dans le même mouvement, elle refoule ce qui se nommera nature. Un principe d'échange et de réciprocité se met en place. Dons et contre-dons n'en finiront plus de circuler. Mais le tissu social tend à monopoliser la représentation. La réalité apparente des échanges camoufle la production, la matérialité des échanges avec la nature.

Le tissage

La première image de cette culture ethnique, émergeant de la prohibition de l'inceste, est le tissage. Pour la première fois, l'homme se sent au-dessus de la nature-mère. Il la domine. Des pieux sont plantés en terre pour marquer une possession agressive. Vient l'entrelacs des branches pour constituer le caillebotis, la charpente et la couverture des toitures. Puis les premiers métiers à tisser. Ce sont des pieux phalliques que les hommes fichent dans le sol pour marquer la propriété locale du groupe et l'appartenance de cet objet technique à ce territoire. Puis les traverses de l'alliance et les montants de la filiation. Enfin, les fils de la chaîne, fixés solidement sur les traverses et, jour après jour, ceux de la trame qui constituent le tissu, d'emblée social.

Avec la prohibition de l'inceste, une Auctoritas, un pouvoir masculin s'érigent. La circulation des femmes entre les groupes fait des femmes des produits mobiles. Les hommes, " les vrais ", les guerriers bien sûr, sont les pivots fixes des groupes locaux. Car la prohibition de l'inceste organise un échange de femmes entre hommes. C'est une homosexualité masculine qui organise le commerce d'une hétérosexualité non pas érotique (excision) mais productive (de bras).

Jocaste est une navette qui passe de main d'homme en main d'homme. De son père Ménoecée à Laïos. De Laïos à Créon, lorsque le roi va consulter l'oracle. De Créon à Oedipe, lorsqu'il escamote le Sphinx. Et l'on retrouve, dans le mythe d'Oedipe, l'homosexualité de Laïos.

L'alliance entre hommes

C'est un crime homosexuel, pédophile, pédérastique à proprement parler, qui a provoqué la malédiction sur la descendance masculine de Laïos. Détrôné à Thèbes par Amphion et Zéthos, Laïos s'est réfugié à Pise chez le roi Pélops. En guise de remerciement pour cette hospitalité, Laïos séduisit le jeune Chrysippos, fils de Pélops, alors qu'il lui enseignait la conduite des chars. De honte, l'enfant se pendit.

"Partout où des hommes se rencontrent et se réunissent pour se prendre des femmes, les négocier, les partager, etc, on reconnaît le lien pervers d'une homosexualité primaire entre groupes locaux, entre beaux-frères, co-maris, partenaires d'enfance. Soulignant le fait universel que le mariage n'est pas une alliance entre un homme et une femme, mais une alliance entre deux familles, <une transaction entre hommes à propos de femmes>, Georges Devereux en tirait la juste conclusion d'une motivation homosexuelle de base et de groupe... L'homosexualité mâle est donc la représentation d'alliance qui refoule les signes ambigus de la filiation intense bisexuée. (Anti-Oedipe, p. 194)".

Avec la prohibition de l'inceste, des rôles sexuels et des pouvoirs sociaux se différencient. Ils résultent d'un codage des flux féminins et d'un marquage des pivots phalliques. Ils refoulent le fond initial d'une sexualité polymorphe spontanée. Dans ces rôles sociaux, c'est une masculinité dominatrice et une féminité séductrice, d'emblée culturelles, qui apparaissent. Elles s'inventent dans le refoulement d'une libido initialement polymorphe. L'Oedipe, comme complexe psychologique, ne peut pas être la cause initiale de tout ce système. Au contraire, il apparaît comme un résidu. La version familiale du couple et du complexe d'Oedipe ne sont que la projection de ce vaste système de rôles sociaux, dans le petit monde, très exigu, des relations interindividuelles. Il y faudra les conditions nouvelles de la propriété privée et de la famille restreinte.

"Jamais l'alliance ne se déduit des lignes de filiation par l'intermédiaire d'Oedipe, elle les articule au contraire, sous l'action des lignées locales et de leur homosexualité primaire non oedipienne. Et s'il est vrai qu'il existe une homosexualité oedipienne ou filiative, il faut y voir seulement une réaction secondaire à cette homosexualité de groupe, d'abord non oedipienne. (Anti-Oedipe, p. 195)".

Alors Oedipe, comme complexe, sera devenu une machine à produire des instances psychiques. Mais, n'anticipons pas. Nous venons juste d'inventer la prohibition de l'inceste et le tissage des relations de parenté. L'histoire humaine ne fait que commencer. Le refoulement de la nature aussi. La révolution sexuelle (W. Reich), la libération des femmes (M.L.F.) n'ont pas eut lieu. Le réchauffement de la planète et le développement durable ne sont pas à l'ordre du jour quand les premières femmes commencent à tisser des liens entre les hommes qui se les refilent.


* Conclusion

Les hellénistes ont raison de rappeler que le mythe grec d'Oedipe a pour thème la fatalité du destin. Car il nous parle d'une réalité subie. Il nous parle aussi de l'émergence de la langue (mots, nom-du-père, métaphores, métonymies) et de la distance que le verbe creuse, peu à peu, entre la nature et la culture.

L'organisation potentielle de la nature a sa propre temporalité. Les processus énergétiques et désirants de la biologie ne s'inscrivent nullement dans la temporalité des systèmes de filiation et de parenté. A ce niveau supérieur d'organisation, l'inceste est inévitable. Mais il est totalement indifférent. Asignifiant, il ne saurait être un crime. Il exprime seulement la participation de toutes les machines désirantes à la production de la nature par la nature, à l'auto-production de l'Univers. L'extériorité des temporalités sociale (mots) et naturelle (choses) rend l'inceste positivement impossible. On ne saurait jouir à la fois du mot et de la chose. Mais toujours/déjà ce fantasme que le Verbe pourraît se faire Chair et venir habiter parmi nous.

Au niveau de l'organisation réelle de l'ethnie primitive, l'inceste est un crime. Il le devient parce qu'il est prohibé. Sa prohibition ne prouve nullement qu'il soit désiré. Ce n'est pas une pulsion d'inceste préalable qui pousse à sa prohibition subséquente. Il s'agit de la mise en place d'un système de délimitation territoriale et sociale de groupes. Des groupent de chasse prennent possession d'un territoire naturel. Des groupes de guerre le protègent des groupes rivaux. La surface du territoire délimite un tout. La première quantité spatiale. La première citadelle. Le premier quantum de richesses. Des tabous alimentaires hiérarchisés règleront la distribution des richesses de ce territoire dans la communauté. Ces groupes se constituent en totalités masculines. Le système de délimitation est très largement arbitraire, comme en témoigne la diversité culturelle. Il s'accompagne de règles d'échange entre les groupes. Des femmes, des paroles, des dettes, des biens dotaux circulent. Des hommes les font circuler. Des corps servent de pivots ou d'enracinement aux groupes. D'autres circulent entre eux. Ce fonctionnement est global. Il constitue une machine sociale par un certain branchement des machines désirantes. Filiations et alliances sont la chaîne et la trame de ce tissu social.

Un pouvoir masculin s'instaure. Il fait circuler des flux féminins. L'ethnie se donne une représentation d'elle-même, pour coder ses flux. La nature reçoit une symbolique féminine. Dans le même temps, elle est expulsée de la représentation de la production sociale. La filiation scissipare ethnique se substitue à la filiation scissipare naturelle. Elle masque aussi la filiation désirante des partenaires du couple. Les lignages de la filiation et les échanges de l'alliance tissent une socialité à dominante homosexuelle masculine. La symbolique du phallus vient recouvrir la nature. Devenue territoire du groupe, la nature tend à n'être plus qu'un support inerte. Tandis que le tissu social constitue une surface d'inscription. Les corps et les organes sont comptabilisés par leur mise en scène. Le tout premier système d'écriture s'instaure. Le territoire, socialisé, en est le support. Les corps de la population en sont le matériau vivant. La prohibition de l'inceste inaugure le premier parcours narratif. Très largement collectif, il relève du premier spectacle social.

Cette matérialité spectaculaire du signifiant restera marquée par la symbolique phallique. Cette symbolique n'a pas d'autre fonction que de refouler l'insignifiance des machines désirantes. Elle masque ou nie la totale indifférence à l'inceste au niveau de l'organisation potentielle de la nature. D'où la prégnance du signifiant phallus comme disait Jacques Lacan. En fait, il n'y a aucun sens à cacher ni à découvrir. Le pouvoir de domination des hommes de guerre EST pouvoir de domination des hommes de guerre. A = A. Il n'y a rien d'autre que cette tautologie. Tout le reste est spectacle pour cacher cette évidence. Il n'y a aucun désir coupable d'inceste à réprimer ni au niveau de la nature ni à celui de la société ethnique. Le phallus cache l'insignifiance naturelle du désir. Le phallus se donne en spectacle pour cacher l'arbitraire de la prohibition d'un inceste à la fois nécessaire dans la matérialité des faits et réellement impossible dans la signification. Ce spectacle sera celui du pouvoir et des biens de luxe. Domination et séduction. Le pouvoir phallique est condamné au spectacle perpétuel pour cacher que le pouvoir ne repose sur rien d'autre que sa propre affirmation de puissance magique. Dès l'apparition du signe, le spectacle du signifiant cherchait à cacher le silence du signifié sur ce point.

Au niveau individuel, dans les sociétés primitives, le couple et son érotisme n'ont pas de véritable existence. Encore moins d'autonomie. Il faudra la propriété privée et la circulation marchande pour que chacun devienne propriétaire ou responsable, tant de sa capacité de travail que de ses désirs. Comme la valeur d'échange pour Marx, l'Oedipe de famille devra attendre que Freud le découvre. Pour cela, il faudra lui laisser le temps de se former. C'est pourquoi il est aussi délicat d'appliquer la grille freudienne aux sociétés primitives que la grille marxiste aux sociétés non salariales.

Hubert Houdoy

Créé le 25 Mars 1998

Modifié le 11 Juin 1998


* Suite

Une lecture familiale d'Oedipe


* Précédents

Economie du temps

Robinson Crusoé


L'île de Robinson

Le travail comme narration

Propriété ou possession

Trois niveaux d'Organisation


* Compléments

Thématique de la Civilisation

Thématique de la Globalité

Thématique de la Totalité


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* Bibliographie

Vie et aventures de Robinson Crusoé

Daniel Defoe

Maxi-Poche, Classiques étrangers

Bookking International, Paris, 1996

Tome 1, 348 pages, 10 Francs

Tome 2, 315 pages, 10 Francs

L'Anti-Oedipe

Capitalisme et schizophrénie

Gilles Deleuze, Félix Guattari

Les Éditions de Minuit

Paris, 1972

Maudits mots

Se parler

Anne Sauvagnargues

Philo, Seuil

Paris, 1996


* Définitions

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Mise à jour: 16/07/2003