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Un
changement de représentation du travail
Précédents
Plan
Introduction
1. Un emploi
plus adulte
2. Travail et citoyenneté
Conclusion
Introduction
1. Un emploi plus
adulte
L’Etat-providence a joué un grand
rôle dans l’intégration des femmes sur le marché du
travail. Les grandes administrations publiques ou para-publiques ont
favorisé une première transformation des activités
féminines traditionnelles en activités salariées et
socialement reconnues. Mais cette croissance artificielle du secteur public
connait la même crise que la grande entreprise
taylorienne. Ce n’est pas le travail qui
disparaît mais l’emploi salarié sans initiative qui entre
en crise durable.
Une recherche d’
autonomie voire une revendication d’indépendance
se font jour malgré les incertitudes de l’emploi. Pour ceux qui
ont été sacrifiés à la rentabilité,
après des années de bons et loyaux services,
l’épreuve qui ne les tue pas les rend plus fort. Souvent
concernées par le chômage, les femmes sont très
présentes dans la création d’activités. Elles
devraient jouer un rôle central dans les prochains changements.
C’est leur statut social qui est en jeu.
Les
événements de 1968 ont été présentés
comme “La révolte contre le Père”, parfois en la
personne du général de Gaulle. Trente ans plus tard, la crise de
l’Etat-providence est probablement la faillite d’une
maternisation de l’Etat . L’emploi à vie,
l’emploi fourni, l’emploi garanti ne sont plus de mode.
L’activité ne passera pas toujours par le salariat.
“On aura d’autres formes d’activité qui
ne seront pas l’emploi salarié tel qu’il a
été défini durant les Trente Glorieuses (p. 34)”.
Nous devons passer de l’emploi fourni à l’
employabilité et souvent à l’
activité inventée .
Cette
transformation du travail concerne les entreprises comme les activités
familiales:
Travail et
citoyenneté
Le parallèle que fait
Dominique Schnapper entre le travail et la citoyenneté nous semble
très pertinent. Il est complémentaire de celui que fait Alain
Touraine entre instrumentalité et
culture. Le progrès de la productivité des
entreprises, nécessaire à la résorption du chômage,
ne se fera pas sans un progrès de la notion de citoyenneté. Nous
devons lutter contre le retour à la notion de communauté. Le
lien social doit devenir beaucoup plus adulte. Il s’agit de contacts
volontaires entre des personnes préalablement plus
autonomes.
“Les liens communautaires sont souhaitables,
ils donnent aux individus les moyens d’entretenir des échanges
chaleureux, affectifs, avec des proches, ils permettent de compenser les
risques de désocialisation liés à la “crise”
(p. 67)”. Mais ils ne peuvent justifier un retour aux formes les plus
anciennes de la domination familiale ou clanique. “Si
les liens communautaires débouchent sur le mariage forcé ou
l’excision des petites filles, ils doivent être condamnés
(p. 67)”. C’est ce qui sépare la communauté du
communautarisme ou la participation de l’appartenance.
Le défi contemporain est le suivant: Au lieu
d’opposer la logique productiviste et les relations humaines, il faut
les réconcilier. Les femmes ont commencé à se
reconnaître et à faire reconnaître leurs compétences
le jour où elles sont allé les exercer à
l’extérieur de la famille. Cela veut dire qu’elles doivent
choisir entre l’image de mère (inadaptée pour ceux qui en
ont fini avec l’enfance) et celle de femme.
Le travail ne
doit être ni le lieu privilégié du père
(“papa travaille, maman reste à la maison”) ni celui de la
mère (maternisation de la fonction publique) mais le lieu
d’émergence des adultes. Un travail qui ne soit pas totalement
coupé, clivé, des relations affectives (amour ou amitié)
permet le projet personnel du sujet
personnel . Ce n’est pas seulement le travail
à distance (géographique) qui émerge,
mais aussi l’ amour à distance
(psychologique) qui se développe. Travail et
amour sont les deux pôles des nouvelles activités à
distance.
L’entreprise citadelle et l’administration
bureaucratique ne seront plus les seuls lieux de travail. Si un tiers secteur
doit se développer, il ne sera peut-être pas celui des
associations. Elles fonctionnent trop souvent comme de grandes familles. Elles
perpétuent parfois des relations de parents à enfants. Elles ont
de grands progrès à faire dans le sens de la
professionalisation. Elles doivent intégrer la contrainte de
productivité si elles veulent lutter contre les causes du chômage
plutôt que de se limiter à son traitement social. De nouvelles
ONG ont largement amorcé le mouvement. Nous y voyons un prototype des
organisations nouvelles. Les infirmières ont déja beaucoup
gagné à ne plus être considérées comme des
bonnes soeurs. Elles gagneront encore à être des femmes
plutôt que des “vraies mères pour nous”. Les patients
y gagneront aussi en dignité.
Répétons le,
c’est à juste titre que Dominique Schnapper relie travail,
citoyenneté et famille. La perte de l’emploi s’accompagne
trop souvent d’une dissolution du couple et d’une perte de la
sensation de citoyenneté. D’où
l’élargissement de la notion étroite de famille et son
ouverture sur le monde.
Les services à la personne sont
une ouverture de la famille. L’école et l'hôpital ont
ouvert la voie. Nous savons que le mode de vie
détermine la productivité. Le notre n’est pas
étranger à la persistance du chômage. Le rythme
“dodo-boulot-métro” est une parfaite conséquence du
contrat taylorien: travail idiot contre loisir. Ce contrat
devient coûteux aux entreprises et impossible aux banlieusards. Si nous
croyons au télétravail, ce
n’est pas pour son aspect technologique. Ce n’est pas seulement
pour remplacer “métro” par “e-mail”.
C’est parce que nous y voyons un développement de l’
autonomie psychologique . C’est parce qu’il
évite le clivage entre la “pensée
boulot” et la “pensée dodo”.
La
productivité doit transformer les conceptions du travail, de la famille
et de la patrie. Nous employons cette formule pétainiste pour bien
montrer la nature d’une tendance à leur fusion communautaire.
Elle est la signature du totalitarisme. Ces trois
institutions doivent rester distinctes, mais chacune des trois doit
intégrer ce qu’elles refoulaient toutes, au temps du travail
idiot: la productivité globale et le
développement.
Alors, tout devient plus
cohérent. “L’ économie sociale ou
solidaire ne peut consister à créer des entreprises non
rentables (p. 80)”. “Il faut redonner aux gens qui ne participent
pas à la production concurrentielle le sentiment, juste, qu’ils
ont leur utilité sociale - tout le monde a besoin de se sentir utile.
Un des moyens est de professionnaliser les nouveaux secteurs
d’activité (p. 81)”.
“A long terme,
pour redonner sa noblesse aux emplois du social au sens large, il faudra les
payer mieux. Mais ce n’est possible que si la
productivité du secteur concurrentiel le permet (p.
82)”. “De plus en plus de personnes devront dans l’avenir
mener des carrières où ils devront redéfinir leur
compétence, s’adapter à des entreprises et des exigences nouvelles, passer
d’un emploi à l’autre, d’une entreprise à
l’autre (p. 93)”.
L’externalisation de la fonction de
gestion des ressources humaines devrait faciliter cette transformation. Une
autre organisation du travail doit être possible entre les chasseurs de
têtes, les recruteurs, les consultants et les
cabinets de replacement. Ils ont, eux aussi, tout intérêt
à travailler en réseau. Aucune
formation initiale ne protégera plus pour l’ensemble de la vie
professionnelle. Pour changer plusieurs fois de métier, il faut
apprendre à apprendre, de manière autonome, mais en
réseau.
Conclusion
L’Etat-providence est en crise
financière car l'impôt sur les salariés touche une limite
interne. L’impôt payé par les fonctionnaires ne peut
subventionner la fonction publique. Même en économie, le
mouvement perpétuel n’est pas possible.
L’impôt des retraités ne peut payer les indemnités
des chômeurs.
L’entreprise citoyenne est un leurre.
“Elle n’a pas pour fonction d’embaucher des chômeurs
mais de gérer un projet économique (p. 73)”. Non, nous
n’allons pas vers la fin du travail. Nous allons vers de nouvelles
formes de travail. Nous devons changer la structure des emplois pour atteindre
une productivité suffisante. C’est la condition du retour de la
croissance. Bien sur, la croissance n’est pas la multiplication des
gadgets qui “tuent le temps” des loisirs. Le
défi de la croissance de demain est le double développement du
secteur de la connaissance et des services à la personne.
Si le travail change, la citoyenneté peut et doit
changer. Nous vivons une crise de la démocratie . Le
mode de représentation politique, hérité de 1789, bien
que modifié par le suffrage universel, le vote des femmes et
l’élection du Président de la République au
suffrage universel, reste vieillot. Le citoyen vote une fois tous les deux ou
trois ans tandis que le consommateur vote plusieurs fois par jour. Les NTCI
nous offrent des lieux pour un nouvel échange politique. L’agora
et le forum ne permettent pas la démocratie directe dans les grandes
nations. Mais internet permet des régions virtuelles et des organisations virtuelles. Ces nouveaux lieux
d’expression ne seront pas inféodés à des
organisations partisanes. Ils n’ont pas à se limiter à des
cercles de réflexion. Ils n’attendent pas l’élection
de leur leader politique à la présidence pour trouver un
début de réalisation.
Les organisations
virtuelles mêlent la société, la culture et
l’emploi. C’est ce que font les trois
chapitres du Réseau d'Activités à Distance. Ces
transformations requièrent une production marchande
suffisamment rentable pour les financer. Non, il ne faut pas travailler moins.
Nous devons travailler plus et mieux pour rester concurrentiels. Le secteur de
l’économie sociale ne se
développera que si la sphère capitaliste peut le financer.
Celle-ci ne sera rentable que si le tiers secteur est tourné vers la productivité globale de notre mode de vie.
Créé le 6 Juin 1997
Modifié le 9 Avril 1998
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appelé à recevoir des modifications.
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le message:
“Merci de m’avertir des modifications à Un
changement de représentations ”
Définitions
Les termes
en gras sont définis dans le glossaire
alphabétique du Réseau d'Activités à Distance.
Bibliographie
Les citations
sont tirées de:
Dominique Schnapper ,
“Contre la fin du travail”, entretien avec Philippe Petit,
Conversations pour demain, Textuel, Paris, 1997
111 pages
79 F
Liste des Auteurs nommés sur le
R.A.D.
Compléments
A la recherche des Déterminations
Économiques de la Valeur
Flexibilité, Inflation et Chômage
Théorie keynésienne du chômage
Retours
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